Le dernier pied de nez de Laurent Gbagbo à ses ennemis

Le baroud d’honneur de Laurent K. Gbagbo n’est pas achevé. Combien de temps peut-il encore durer ? Combien de morts va-t-il coûter ? Au moment où les derniers combats font rage, la Côte d’Ivoire tout entière attend de pouvoir pousser un soupir de soulagement. Le pays est exsangue. Economiquement anéanti et politiquement dévasté. Ravagé et souffreteux. Laurent Gbagbo l’a ainsi voulu. Jusqu’auboutiste jusqu’au bout. Jusqu’au bout du bout. En refusant de signer sa reddition, Laurent Gbagbo fait un dernier pied de nez à Alassane Dramane Ouattara. Et tend un véritable piège à cons. Que dans l’euphorie de la victoire toute proche, pas grand monde n’analyse à sa juste mesure.

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Laurent Koudou Gbagbo n’est décidément pas né d’hier. Jusqu’au bout, il est en train de démontrer, au nez et à la barbe de ses adversaires que ce qui lui arrive, n’est que le fait d’ennemis extérieurs à la Côte d’Ivoire. Tenez, au moment où tout le monde parie sur la fin inéluctable de l’homme et de son régime devant le délitement de son armée et de son système, face à la conquête complète du pays par les Forces républicaines de Côte d’Ivoire, Laurent Koudou Gbagbo refuse encore d’abdiquer. A-t-il envie de servir de martyr à la cause qu’il prétend incarner ? Ou a-t-il quelque chose de plus à démontrer ? Les circonstances créées ces derniers jours par  cette résistance absurde sont en de nature à servir la cause nationaliste de Gbagbo, mort ou vif.

Premièrement il y a eu les frappes des hélicoptères de l’ONUCI et de l’opération Licorne sur ce qui restait de forces de défense fidèles au Président ivoirien sortant, mais surtout, il a entamé ses ultimes négociations avec l’Ambassade de France à Abidjan. Faut-il croire que ce choix tient seulement du fait que la résidence de l’Ambassadeur de France se trouve seulement à quelques mètres de la sienne dans le quartier chic de la Riviera ? Je pense pour ma part qu’il s’agit d’un scénario encore une fois savamment orchestré par le « boulanger d’Abidjan».

Laurent Koudou Gbagbo a toujours voulu présenter les événements qui rythment la vie des ivoiriens depuis septembre 2002 comme le résultat de l’animosité que la France a accumulée vis-à-vis de lui pour des raisons d’autodétermination exacerbée de sa part. Une tentative de recolonisation de la Côte d’Ivoire. De fait, la France serait le soutien le plus actif des forces rebelles d’alors, décidée comme elles à le faire partir du pouvoir. A travers le choix que Laurent Gbagbo a donc fait de l’ancienne puissance coloniale pour négocier avec lui les termes d’une trève et nous a-t-on fait croire, d’une éventuelle reddition, il a définitivement dénié à Alassane Dramane Ouattara une quelconque légitimité. Il démontre avoir combattu la France et avoir été vaincu par la France. Aidée bien sûr des troupes des Nations Unies dont les bombardements sur les camps militaires pro-Gbagbo et sur sa résidence dans la nuit du 4 avril, prouvent, à profusion, que le « Président élu » des Ivoiriens, n’est en fait qu’une marionnette aux mains de la communauté internationale.

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L’argumentaire n’est pas bête. Il peut servir et il servira à coup sûr les partisans zélés d’un nationalisme africain qui voient en Laurent K. Gbagbo un résistant. Elle a même quelque chose de séduisant. Ce n’est pas sans réfléchir que le régime écrit ainsi les dernières lignes de son histoire. C’est une autre perception de lui-même que Laurent Gbagbo s’offre ainsi dans l’inconscient collectif de demain.  Loin de l’image funeste du chef de clan instigateur présumé des charniers de Yopougon et d’autres, de la disparition forcée de centaines, peut-être même de milliers d’adversaires, des tristement célèbres escadrons de la mort. Loin de l’image sordide de l’homme politique fourbe qui accorde le baiser de Judas et refuse de reconnaître sa défaite, qui organise  la confiscation du pouvoir, qui préfère envoyer à la mort des centaines de ses partisans que de se rendre à l’évidence d’un combat sans espoir.

Dans l’allégresse de la victoire presque obtenue, ni Alassane Ouattara et ses partisans, ni la France, ni l’ONU n’ont compris le subterfuge. Il est vrai qu’il valait sans doute mieux que Laurent Gbagbo « débarrasse le plancher », quels que soient les moyens utilisés. C’est probablement ainsi que l’entendaient les futurs vainqueurs. Et quand il sera temps de se rendre compte de l’erreur, il sera trop tard. De toute façon, il se trouvera toujours des rhétoriciens pour essayer de démontrer la banalité de la stratégie de Laurent Gbagbo. Mais jamais suffisamment convaincants pour que l’homme n’ait pas déjà pris de l’altitude.

Comme dit le proverbe en langue fon au Bénin, « on peut ne pas aimer son ennemi, mais il faut avoir l’honnêteté de reconnaître, quand c’est le cas, que son habillement lui sied ». Sans doute n’est-ce pas le moment de faire de l’esprit, mais Laurent K. Gbagbo vaut bien une messe.

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