Tentatives de contrôle de l’organe de lutte contre la corruption

Le projet de loi contre la corruption et autres enrichissements illicites introduit au parlement par le gouvernement et qui y est en étude, devra être adopté par les députés incessamment. Mais, des sources internes à certaines organisations de lutte contre la corruption, on apprend que le nouveau projet de loi, tel qu’il a été modifié, noie le principe même de lutte contre la corruption.

L’annonce de l’introduction du projet de loi contre la corruption dans les points à l’ordre du jour de la session extraordinaire du parlement béninois avait créé un soulagement au sein de l’opinion publique et des organisations de lutte contre la corruption. Pourtant, avant l’adoption du nouveau projet de loi, après étude par les députés, les voix se lèvent au sein des structures existantes de lutte contre la corruption pour décrier un cadeau empoissonné. Il prévoit la création d’un organe de lutte contre la corruption dénommée Autorité nationale de lutte contre la corruption. C’est un organe sous la tutelle du président de la république qui comptera 11 membres tous nommés par décret pris en conseil des ministres avec un mandat de 03 ans renouvelable une fois. Et 08 d’entre eux sont désignés par l’exécutif.

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Le constat fait est que le nouveau projet de loi ne fait aucune allusion à l’Observatoire de lutte contre la corruption(Olc) qui est une structure crée par décret présidentiel. Mais là ne réside pas le problème. Si le gouvernement décide de passer d’un Observatoire à une Autorité, c’est sans doute dans l’optique d’avoir à la traque de la corruption et l’enrichissement illicite une institution ayant plus de prérogatives et un pouvoir renforcé. Sur les 19 membres que compte l’Olc, 06 sont désignés par le gouvernement dont 1 seul par le président, 11 par la Société civile par la Société civile et les privés et 2 par l’Assemblée nationale. Pourtant dans l’Autorité que prévoit le projet de loi en cours, 08 sur les 11 membres, donc la majorité, sont désignés par l’exécutif. Et c’est là que le bât blesse. L’on redoute une structure de lutte contre la corruption contrôlé par le pouvoir en place.

L’autre aspect de l’analyse laisse entrevoir une Autorité sujette à l’instrumentalisation politique. L’expérience de la gouvernance au Bénin et en Afrique a montré qu’à côté de la compétence et sous réserves d’autres critères, la couleur politique constitue un critère de choix lorsqu’il revient à l’exécutif de désigner des membres devant siéger dans une institution. Ce qui voudra dire que 08 des 11 membres de la prochaine Autorité de lutte contre la corruption seront des partisans du président de la république. Par conséquent, en son temps, l’Autorité sera utilisé comme un instrument de menace pour les opposants. Et comme c’est l’habitude, le filet ne va qu’attraper les prévaricateurs de l’opposition et laisser la main libre à ceux de la mouvance. Les spécialistes auront le temps d’apprécier. Mais observant de près la composition du prochain organe de lutte contre la corruption au Bénin, une question de réelle indépendance et d’impartialité dans le traitement des dossiers se pose. On craint alors que le vote de cette loi et la mise sur pied de l’Autorité n’est qu’une « reforme cosmétique » pour calmer les ardeurs des organisations existantes de lutte contre la corruption et de la communauté internationale qui ne cessent de mettre en exergue le manque de volonté politique dans l’insuffisance juridique qui existait quant à la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite au Bénin.

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