Affaires ICC-Service et consorts : le gouvernement installe la confusion

(Et si Mme Lawson démissionnait…) Le débat contradictoire entre l’avocat d’ICC- Services, Me Hervé Gbaguidi, et Mme Sévérine Lawson hier sur Golf Tv a fini d’édifier tout le peuple sur les velléités du gouvernement. S’il donne l’impression de vouloir le paiement des spoliés, le gouvernement a toutefois affiché une autre volonté. Celle d’utiliser le comité de suivi pour faire obstruction à une décision de justice qui pourrait livrer des «secrets».

Un mystère plane toujours sur les vraies intentions du gouvernement. Depuis quelques jours, cette affaire d’escroquerie à grande échelle, dont ont été victimes des milliers de Béninois, se fait de plus en plus présente dans les médias. Dans les grognes, les canards et sur les antennes des radios de la place, d’anonymes compatriotes et même des journalistes élèvent le ton pour demander à ce que les responsables d’ICC-Service, emprisonnés depuis des mois, soient libérés afin qu’ils puissent payer leurs clients. Dans la ligne de mire des détracteurs, le comité de suivi et sa présidente, Sévérine Lawson. Ainsi acculée, elle a fini par sortir de son gong. De réactions en réactions, on en arrive au débat d’hier qui a opposé Me Gbaguidi à Mme Lawson.

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Alors que le premier a défendu bec et ongle la poursuite d’une procédure judiciaire sans fioriture, la violation de la Constitution, l’entorse portée à la procédure judiciaire, la présidente du comité de suivi s’est cramponnée à soutenir sa commission administrative qu’elle semble dédouaner d’un certain nombre d’entorses graves portées à la loi. A l’entendre, ce n’est pas le comité de suivi qui rembourse les clients. Il n’a fait de perquisition chez aucun responsable d’ICC-Service, encore moins auditionné ces derniers. Pourtant, tout le monde sait ce qui s’est passé. Sur le plateau de Golf TV, la présidente du comité de suivi a tenté habillement de se dédouaner de tous les dérapages commis dans la conduite de ce dossier. Parfois, elle a été obligée de citer la commission d’enquête judiciaire qu’elle montre comme la structure qui gère le volet judiciaire du dossier. Chose qui contraste bien avec le comportement du comité qui est toujours monté au créneau et s’affichant devant les médias comme la seule structure qui s’occupe du règlement du dossier. Si tant est que le comité de suivi, l’un des trois organes créés par le gouvernement pour gérer cette crise, n’as pas toutes les prérogatives qu’on le croyait détenir, alors à quoi sert-il? C’est ce qui fonde le raisonnement de Me Gbaguidi qui a tenté, tout au long du débat de montrer que le comité de suivi a joué tout le temps un mauvais rôle, celui de faire obstruction à une procédure judiciaire encore en cours. Comment une commission se disant administrative peut-elle choisir de saisir des biens immobiliers, des véhicules et de les vendre, d’extraire de prison des personnes inculpées mais présumées innocentes dans une affaire et de les «écouter»? Comment peut-il faire rembourser des clients alors que l’affaire est encore en instruction? Que cache alors le comité de suivi? Pourquoi la commission d’enquête judiciaire n’est jamais montée au créneau pour situer les uns et les autres? Autant de questions qui chagrinent les cœurs et amènent certains à soupçonner le comité de suivi de jouer un jeu flou.

La partie non visible de l’iceberg

Si cette affaire est confiée à la justice, on se demande si les vrais juges qui conduisent ce dossier ne sont dans les lambris dorés de la Marina. Et pour cause, alors que les enquêtes suivent leur cours, les responsables de ICC-Service sont curieusement déplacés. Ceci confirme les inquiétudes de Me Gbaguidi qui dénonce une trop grande immixtion du gouvernement dans ce dossier. Et rien ne semble être fait exprès. En effet, on note depuis le début de cette affaire une volonté de ralentir les enquêtes, le procès et la manifestation de la vérité. Tous ceux qui peuvent dire une part de vérité dans cette affaire sont traités comme des escrocs ayant pillé les populations, jetés arbitrairement en prison et réduits au silence. C’est ce qui explique cette volonté d’éloigner Guy Akplogan et consorts de Cotonou à un moment où la presse a commencé à faire certaines révélations sur l’affaire. En isolant Akplogan et ses compères, le gouvernement veut s’assurer qu’il y aura moins de possibilités de faire entendre sa cause dans les médias. Idem pour les autres personnes impliquées. Armand Zinzindohoué, l’ancien ministre de l’intérieur et supposé grand acteur de l’escroquerie est persécuté, limogé et poursuivi devant la Haute Cour de justice. Georges Constant Amoussou, ex-procureur général est aussi accusé d’intelligence avec les responsables d’ICC-Service et lui aussi embastillé à Akpro-Missrété. Un cousin de Yayi, acteur clé, lui aussi, a subi le même sort. Jeté en prison depuis, personne ne semble s’occuper de son sort. Tous ceux qui doivent parler sont ainsi réduits au silence. Me Hervé Gbaguidi se plait d’ailleurs à ironiser cette attitude du gouvernement: «C’est l’histoire de Pierre qui a renié Jésus». Ainsi, personne ne pourra rien savoir sur les folles rumeurs qui ont couru les rues de Cotonou comme celle qui a fait croire que la première dame serait allée au siège d’ICC-Service sous escorte militaire pour retirer ses avoirs. Tout au moins, l’opinion publique n’est pas amnésique. Elle peut comprendre que depuis que cette affaire a éclaté, les marches de soutien qui essaimaient le pays ont disparu. Simple coïncidence de calendrier?

Pourquoi Lawson doit démissionner?

La présidente du comité de suivi a été fortement contredite sur le plateau de Golf TV par Me Gbaguidi. Il s’agit là d’un affront pour cette brillante magistrate, ancienne juge d’instruction réputée très compétente qui a joué un rôle majeur dans l’affaire dite des frais de justice criminels. Hier, elle a perdu son latin puisque ces arguments n’étaient pas juridiques. Le seul geste d’honneur qu’il lui reste à poser est de déposer son tablier par acte de démission pour sauvegarder sa dignité afin de ne pas être le dindon de la farce dans une affaire où elle n’a pas grand-chose y voir.

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