À Tokyo, le Bénin étale sa misère, grandeur nature

(Le cri d'alarme de son 1er secrétaire d’ambassade) Un agent diplomatique –et pas des moindres- en poste à l’extérieur qui saisit le Secrétaire général du ministère de tutelle -les affaires étrangères- pour se plaindre de la non mise à sa disposition, pendant longtemps, du matériel basique de travail –l’outil informatique, la chose est réelle et se passe à l’ambassade du Bénin à Tokyo, la capitale du Japon.

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Il était déjà inimaginable le social précaire des officiels béninois partout dans les ambassades de leur pays à l’extérieur, que leurs conditions de travail se révèlent, elles aussi, des plus indignes d’un «État souverain» de l’Afrique de l’ouest qui se présente comme une des chevilles ouvrières de la démocratie pluraliste sur le continent. On admet encore plus difficilement la chose qu’à l’ère des nouvelles technologies de l’information et de la communication, l’ambassade du Bénin au Japon, -pays le premier en matière de technologique informatique- soit celle ne disposant pas d'un seul ordinateur ni même d'une imprimante! Cette incroyable histoire à vous couper le souffle est pourtant vraie, si on s’en tient à la plainte du 1er secrétaire de l’ambassade à son secrétaire général à Cotonou, après moult tentatives infructueuses auprès de son supérieur hiérarchique direct, le chef de mission, l’ambassadeur Alassane Yasso.

En effet, sa première tentative en direction de ce dernier remonte au 21 juillet 2011. A cette date, l’homme était déjà visiblement épuisé et impuissant de ne plus pouvoir mettre, après deux ans, des moyens matériels acquis sur fonds propres (ordinateur et imprimante) au service de l’administration publique. Pour cause d’obsolescence et de pannes techniques. Et il y a quelques mois, il est contraint de retirer le matériel sans plus pouvoir assurer la continuité de ses taches. Mais le comble est qu’il se heurte à l’immobilisme et au manque d’initiative de l’administration de l’Etat pendant que son chef a promis d’«instruire les services compétents de la mission d’en rendre compte au département…».

De guerre lasse, à espérer une solution à «sa misère», notre premier secrétaire se rend compte que son sort était, comme définitivement scellé. D’où, il jette son dévolu sur ses responsables au pays, à qui il se plaint de la situation globale de l’ambassade, en la matière. Laquelle, hélas, est la chose la mieux partagée entre collègues de la même juridiction.

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Dans une correspondance au secrétaire général du ministère, celle de la dernière chance et de celui qui a tout essayé en vain (voir fac-similé ci-joint), le diplomate explique comment depuis qu'il est en poste le 29 juin 2009, l'ambassade n'a jamais mis les moyens de travail requis à sa disposition. Jusqu'à tout récemment encore (8 décembre 2011), c’est le statu quo. Et on assiste désormais à un blocage systématique du fonctionnement de l’administration de la jeune ambassade.

Comme on le voit, le Bénin organise de lui-même en grandeur nature, l’exposition à l’extérieur des tares et faiblesses de sa souveraineté ainsi mise à mal. Les membres de sa communauté dans la diaspora nippone, eux, expliquent la situation par l'attitude d'un ambassadeur, en fin de mission, qui tente de tout bloquer.

Fac-similé

  • Fichier 1
  • Fichier 2
  • Fichier 3

Le sens de notre intérêt pour l’ambassade du Bénin au Japon

L'épisode relatif à l'affaire du trafic d’immigrés Philippins clandestins qui entache la représentation diplomatique du Bénin au Japon est celui par lequel nous sommes véritablement entrés dans la bergerie. Et alors que nous avions fait notre boulot, sur le sujet, en vertu de la déontologie et l’éthique qui caractérisent notre profession –beaucoup en parlent, mais peu de gens savent de quoi cela retourne- nous avions dû répondre à une assignation en justice. De la façon la plus malhonnête qui soit. Les faits de l’espèce sont avérés, probants et connus de tous à l’ambassade à Tokyo comme au ministère à Cotonou. Ils ont même d’abord valu le rappel au pays de l’ambassadeur en poste là-bas et la levée de l’immunité diplomatique du 1er secrétaire, toutes choses donnant lieu, plus tard, à la «perquisition autorisée» par le gouvernement béninois de son «territoire à l’étranger». Cela, en vue de la manifestation de la vérité. Malgré les détails ci-dessus disponibles et les lourds éléments à charge du dossier, il nous a été signifié un beau matin un acte d’accusation formulé contre l’auteur de l’article (votre serviteur) et sa rédaction solidairement coupables avec leur directeur de publication, du délit de diffamation. Ce délit dont tout le monde affuble si facilement et couramment les journalistes. Et au terme d’une procédure judiciaire qui s’est banalement étalée sur 6 mois, les juges du tribunal de 1ère instance de Cotonou, notamment appuyés de la clairvoyance du procureur de la République -censé défendre les intérêts de l’État et de la société- en ont conclu non seulement au professionnalisme de votre quotidien préféré mais aussi et surtout au sens du devoir hautement citoyen des rédacteurs qui l’animent.

C’est le lieu de féliciter d’une part l’ensemble des magistrats pour la qualité de leur décision, sans influence et de remercier le collège d’avocats ayant pris en charge le dossier pour nous voler au secours et nous assister toute la procédure durant, à savoir le jeune et brillant avocat Me Nicolain Assogba du cabinet Me Joseph Djogbénou et l’inénarrable Me Magloire Yansunu qui reste plus que pugnace.

Au fond, dans ce dossier, l’accusation était sûre et certaine que le grand secret dont l’affaire était entourée ainsi que la distance entre Tokyo et Cotonou ne nous permettraient pas d’entrer en possession des éléments tangibles de preuve exigibles en pareille circonstance. Et les preuves, nous en avons obtenu -même si péniblement- et avons fait les recoupements nécessaires à la production d’une série de deux articles –dont l’un en cours de procès- suffisamment étayés pour faire mouche.

Depuis lors, nous avons compris qu’il y avait des choses qu’on nous cache et avons pris, un peu plus encore, l’option de ratisser plus large le secteur afin d’apporter plus d’info à nos lecteurs. Et Dieu sait si il y en à gogo, les unes aussi abracadabrantes que les autres, dont celle révélée ici. Nos sources? Elles nous viennent d’horizons diverses: des ministères, au sein de la diaspora comme dans les juridictions. Elles nous viennent de partout depuis que notre crédibilité est établie, et pas forcement des personnes impliquées signataires de lettres et autres documents administratifs, lesquelles sont mises en exergue dans nos articles. Ces dernières ont simplement le malheur d’être au cœur des événements. Suicidaire donc de s’attaquer à elles injustement et sans preuve. Il faut se mettre à l’esprit, sans jamais l’oublier, que sans être agent de renseignements, le journaliste n’emprunte pas moins des méthodes d’agent secret. Il faut bien qu’il réussisse son métier, le plus professionnellement possible- pour ensuite espérer en vivre.

 

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