Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, Chers Collègues députés,Les biens et les malheurs qui nous arrivent ne nous touchent pas selon leur dimension, mais selon notre sensibilité.
Il se joue à Placondji, un drame, dans l’indifférence totale des députés. Oui, un drame humain, dans l’indifférence de tous !
Il a été décidé, sur ordre, a-t-on dit, du gouvernement et pour satisfaire, a-t-on expliqué, le besoin de ceux qui sont assez riches et convaincants pour qu’un gouvernement en arrive à prendre la décision de raser Placondji, sans égard aucun pour les hommes, encore moins pour les droits.
La furie des bulldozers du Génie Militaire n’a cependant pas pu étouffer les cris de détresse de populations méprisées, bafouées dans leur dignité, écrasée par la force aveugle des puissants du jour.
Pour ces enfants, pour ces femmes, pour ces populations, je voudrais, chers Collègues, vous dire que le gouvernement a dépassé les limites de l’acceptable.
Le vendredi 04 mai 2012, en effet, à la tête d'un impressionnant détachement de policiers et de militaires, un Ministre de la République, en l'occurrence, celui chargé de l’Environnement, de l'Habitat et de l'Urbanisme, Monsieur AHANHANZO GLELE Blaise ordonna la destruction sans ménagement des habitations. Un communiqué a été brandi par la suite, un communiqué conjoint lapidaire, par lequel le Ministre de l’Environnement et le Maire de Cotonou alléguaient, sans aucun fondement que lesdites populations avaient été indemnisées et relogées depuis 1980 sur un site qu’ils ne sont ni en mesure de nommer, ni de montrer.
L'opération qui s'est poursuivie les 5 et 9 mai 2012 a été ponctuée de bastonnades sauvages, d'arrestations, d'humiliation et de traitement dégradants pourtant proscrits par notre Constitution et les lois de la République. Tout y est passé, démolition systématique, à commencer par les lieux de culte, plus de 400 maisons détruites, jetant dans la rue, en cette saison des pluies, et à quelques jours seulement des examens de fin d'année, des milliers de personnes, dont naturellement, les écoliers, élèves, étudiants, femmes et personnes âgées.
C'est ainsi que le « gouvernement de la refondation » a choisi de remercier les descendants de ceux qui, de Grand Popo à Cotonou en passant par Ouidah, au prix de leur sueur et de leur sang, terminant parfois leur vie dans la ventre des requins, ont joué les premiers rôles, dès le début du 19ème siècle, dans la construction de l’économie naissante de ce territoire, successivement livrés aux négriers, aux colons et paraît-il, à nous-mêmes depuis 1960 : le Dahomey devenu Bénin. Le Port Autonome de Cotonou, aujourd’hui poumon de l’économie nationale est le témoignage vivant des sacrifices consentis par ces peuples.
Malgré les cris de détresse des populations meurtries, aucune mesure de protection, ni sanitaire, sociale ou humanitaire n'est perceptible de la part du gouvernement. Pire, le Ministre AHANHANZO-GLELE revint à plusieurs reprises sur les lieux du crime, accompagné d’autres ministres du gouvernement et de leurs amis italiens, présumés investisseurs comme on en a vu déambuler, dans ce pays, pour réaffirmer la puissance et la suprématie de l’argent et de la magouille, face aux populations jetées aux intempéries. Les dernières nouvelles ne sont pas bonnes : nous apprenons que l’étendue des destructions n’a pas assouvi la soif d’espace de la toute puissance finance internationale et de la boulimie magouilleuse de nos gouvernants. Ils s'apprêtent à faire déferler les bulldozers sur le reste des habitations.
L’histoire des peuples est jonchée, il est vrai, d’actes de barbarie. Mais avons-nous besoin, au 21ème siècle de recourir aux recettes dont nous connaissons les effets à terme ? Comment voulez-vous, que les populations Xwla et Xwélà, ne s’indignent point, alors qu’on les traite, dans leur propre pays, comme des parias qui ne méritent ni justice, ni attention bienveillante.
Vous savez, Chers Collègues, comment les mêmes populations sont traitées au Nigéria, au Gabon, au Congo, en Côte d’Ivoire et que sais-je, sans jamais bénéficier de la moindre assistance de la part de leur gouvernement. Leur gouvernement au contraire, vient de délivrer le « certificat de bon à humilier, à détruire sans ménagement » aux autres pays, afin que personne ne se trompe, sur ce qu’est devenu un Xwla ou un Xwéla pour la République du Bénin, à savoir, des sous-hommes. Faut-il insister, Chers Collègues, que cette dérive-là, est inadmissible ?
Comment pouvons-nous imaginer, que les populations de Placondji, ne savent pas avec précision, comment fut réglé le cas du marché central de Parakou, lorsque le gouvernement voulut y installer ledit marché ? Le cas récent de l'aéroport de Tourou a-t-il été traité avec la même méthode ? Les vendeurs de moutons de Zongo, à Cotonou, situé comme Placondji, dans le même 5ème arrondissement ont-ils été traités comme des sous-hommes ? Je salue par ailleurs, la célérité avec laquelle les vendeurs de friperies de Missèbo, toujours dans le même 5ème arrondissement, sont aujourd'hui recasés dans la commune de Sèmé-Kpodji.
Mais je vous demande chers Collègues: les Xwla et les Xwéla ne méritent-ils pas un traitement tout au moins égal à celui appliqués aux autres ? Relisons notre Constitution, des articles 18 à 23, et rendons-nous compte, que nous avons quelque à chose à faire, peu importe nos chapelles respectives. Nous ne pouvons pas rester insensibles à cette situation.
Excellence Monsieur le Président, chers Collègues, par ma voix, les populations Xwla et Xwéla installées déjà en 1830 à XWLACODJI, jadis appelé « quartier Popo » vous appellent à la solidarité républicaine.
Aussi, par la présente déclaration, le Groupe Parlementaire Union fait la Nation voudrait-il solliciter l’intervention de la Représentation Nationale, pour rappeler au gouvernement qu’il ne doit pas s’octroyer le droit aux dérapages dans lesquels, il s’entête et s’empêtre et l’inviter à respecter les droits des peuples XWLA et XWELA. La force des bulldozers et les bâillonnettes de l’armée n’ont jamais réduit durablement et impunément les peuples au silence. Aucune performance économique réalisée au bout du canon ne sert un peuple. Le dialogue et le respect des droits des peuples, me semblent la voie la mieux indiquée pour gérer ce type de situation.
En comptant sur votre solidarité républicaine et l’engagement de notre auguste Assemblée pour faire respecter notre constitution et les droits humains, nous vous prions, Monsieur le Président et Chers Collègues, d’agréer, l’expression de ma haute considération.