Débrayage dans le secteur du transport au Bénin : les conducteurs désertent les rues

Les conducteurs et transporteurs semblent se plier à la motion de grève décrétée par leurs responsables syndicaux samedi dernier .Le constat fait ce lundi est inhabituel .

Publicité

Un jour pas comme les autres pour les conducteurs du Bénin .Les descentes faites par notre équipe de reportage sur certaines rues de Cotonou en disent long. C’est la motion de grève décrétée samedi  dernier par les responsables syndicaux de ce secteur qui est suivie par les conducteurs. Il est 9h ce lundi 17 septembre 2012. Notre équipe descend sur la voie de Fidjrossè mais l’affluence n’est pas au rendez-vous. Les véhicules  communément appelés ‘’Tokpa –Tokpa’’  qui font d’habitude le trajet Fidjrossè, Agla, Dekoungbé et vis-versa sont quasiment absents. Seuls les véhicules personnels ont droit de cité. Ce qui prouve l’effectivité de la grève .Nous descendons sur la place de l’étoile rouge. Pendant une heure d’horloge, c’est le statu quo. Ici, les taxis et mini – bus qui viennent habituellement de Calavi, Godomey, cocotomey , pahou et Ouidah en direction du marché de saint Michel et de dantokpa  se font rares .IL sonne 9h 30 minutes et le seul mini bus que nous apercevons passe devant les usagers qui attendent toujours et retourne au garage. «C’est la grève qui se poursuit», signale un racoleur. Même les bus qui effectuent les grandes distances jusque dans le nord du pays ne circulent pas. Les  conducteurs signalent très tôt aux passagers qu’il n’ y a pas de travail .L’un des jeunes qui orientent les passagers vers les bus à l’étoile rouge marque un arrêt à côté de trois jeunes filles et un garçon assis à l’arrêt du bus Ben Afrique et leur demande de reporter leur voyage.   «Cette grève aura de graves conséquences sur les usagers», laisse entendre un voyageur qui va à Gbodji dans l’Atacora .
Sidoine M. Avadji(Stag)

 Un tour à Dantokpa et le constat est plutôt désolant. Les véhicules de Porto -Novo, semé-kpodji, sakété  sont absents laissant plusieurs passagers en attente.

La grève n’est pas suivie qu’à Cotonou

Nous sommes sur le parc des véhicules qui viennent d’habitude de Dassa, Glazoué, Savalou, Savé, Bohicon, Abomey  et c’est l’absence totale. Les passagers qui quittent d’habitude Cotonou pour rejoindre ces différentes localités attendent en vain et jusqu’à midi aucun signe .Une rare minorité semble continuer le travail.

A  l’étoile rouge pendant que  nous y sommes, nous voyons à notre grande surprise le Bus Ben Afrique stationner devant le siège érigé pour son arrêt. Plein à craquer, l’arrivée de ce bus a fait la joie de ceux qui, de Godomey vont à tokpa .En attendant une sortie de crise, la grève se poursuit donc.

Publicité

La grève qui secoue le secteur des transports a eu diverses conséquences et des fortunes pour les différents acteurs du milieu.

«Le malheur des uns…»

La grève de 72 heures déclenchée hier par le conseil des syndicats de conducteurs, transporteurs et travailleurs assimilés du Bénin (Cosycotrab) pour dénoncer les tracasseries routières et autres rançonnements dont ils font l’objet a été largement suivie paralysant du coup toutes les activités de transport dans le pays. Cette situation de boycott et de manifestation de mécontentement s’est révélée un calvaire pour les usagers de moyen de transport en commun. «Je devais me rendre à Dassa pour régler des affaires personnelles, mais impossible d’effectuer mon déplacement», se plaint Jean-Eudes, un jeune homme rencontré sur le parc auto de Calavi ce matin. Josiane, une autre habituée des transports en commun, est contrainte à la marche du fait du coût élevé des taxi-motos pour se rendre à Abomey-Calavi. «Je ne peux pas payer plus de 300 Fcfa pour me rendre à la mairie et comme cela semble impossible aujourd’hui, je préfère marcher un peu», a-t-elle confié d’un ton catégorique. Plusieurs citoyens ont été contraints, du fait des mouvements de grève du Cosycotrab, à sortir un peu plus de sous pour le déplacement à Zem, qui est pourtant «beaucoup plus risqué que les taxi-villes» et certains à annuler leur voyage.
Yao Hervé Kingbêwé

«…fait le bonheur des autres»

Si  l’opération «route morte» du Conseil des syndicats de conducteurs, transporteurs et travailleurs assimilés est préjudiciable aux usagers de transport commun, elle a été pour les conducteurs de taxi-motos communément appelés «Zem» et chauffeurs de bus de la ville de Cotonou, une aubaine. Les activités de ces derniers ont en effet dans la journée de ce lundi 17 septembre, connu un regain. Les conducteurs de taxi-motos ont multiplié leurs allers et retours notamment sur les grandes distances qu’ils préféraient. «Si j’arrive à faire trois tours entre Cotonou et Ouidah, je peux aller me coucher», a lancé un conducteur tout joyeux pour signifier «les bonnes affaires» qu’il était en train de réaliser. Mais comment en trois tours entre deux villes proches, un «Zem» pouvait-il réaliser un grand bénéfice ? «Ils ont doublé voire triplé le prix du transport » a répondu un citoyen ayant requis l’anonymat. «De Calavi à Vèdoko, j’ai payé 500 Fcfa alors qu’autrefois c’était à peine 300 F» nous a-t-il renseignés.   Les bus de ville autrefois vides, ont également faire de bonnes recettes même s’ils n’ont pu revoir leur tarif à la hausse. Ils débordaient de passagers au point où certains clients ont été contraints de rester débout.

Les transporteurs démontrent leur utilité

Les transporteurs ont réussi leur coup hier. Et cela doit continuer ce jour car il n’est plus à rappeler qu’il s’agit d’une grève de 72heures.  C’est du moins le constat  fait hier dans la ville de Cotonou. Carrefour Agla,  il sonnait  environ sept  heures et quart  du matin ce lundi.  Hommes et femmes de tous les secteurs confondus notamment des commerçants du marché international Dantokpa,   des usagers des  parcs de Sekandji,  quelques fonctionnaires, tous résidents au quartier à Agla et ne disposant pas de moyens de déplacement, ont été mis devant le fait accomplit. En effet, ils n’ont pas été informés de la grève des transporteurs. L’effet de la surprise est alors très grand. « Je ne comprends plus rien. Où sont passés les taxis »,  se demandaient-t- ils entre eux sans obtenir de réponse.  Au risque d’être en retard pour leurs différentes occupations, d’autres ont préféré s’offrir  le service des taxis motos mais les données ont changé.  « Je vais à Sèkandji sur les parcs automobiles. C’est combien ? », demande un usager à un « Zém ».  Sans  hésiter, ce dernier répond « 1500fcfa » au lieu de 700fcfa comme d’habitude.  La majorité des  autres passagers, n’eurent plus le courage d’arrêter un autre taxi moto. Ils continuent alors le chemin à pied.  Pour juste où ? On ne saurait le dire mais pourront-ils faire leurs différentes courses à pied pendant 72 heures ? Toute la question est là et le chemin risque d’être long.
Camille A. Segnigbindé

Un confrère raconte son calvaire

17 septembre 2012. Je dois me rendre à Ahozon ce lundi matin pour l’inauguration d’un musée d’art et d’histoire. Il sonnait 8 h 36 quand je me pointe à la petite gare sise à quelques mètres des feux tricolores d’Agla. D’autres voyageurs s’y impatientaient déjà. Le marché qu’animent de coutume, passagers, chauffeurs, racoleurs et vendeuses de pain ici chaque jour ne vit pas cette matinée. Quelques véhicules sont sur le parc. Mais ils sont au repos. Je n’eu pas à réfléchir quatre fois avant de me rendre compte qu’il s’agissait de la mise en application de la motion de grève de 72 heures annoncée la semaine écoulée par le Conseil des syndicats de conducteurs, transporteurs et travailleurs assimilés du Bénin (Cosycotrab). Je patiente quelques minutes dans l’espoir de me trouver un éventuel «taximan désolidarisé» mais en vain. Et je me suis rendu à Godomey après le coup de fil d’un confrère qui, lui aussi, devrait se rendre sur le même lieu de reportage. Sur le parc où il m’attendait, la situation est identique. Aucun taxi n’est en circulation. Faudra-t-il qu’il retourne à la maison chercher sa moto pour le déplacement? «Non. On va y aller à Zem» suggère-t-il. « Mais à combien ? Ce ne serait pas trop cher ? », lui ai-je demandé. Il me répond «J’avais négocié avec un zem qui a dit 800 F seul. A deux, le prix sera réduit.» Sautant sur la première occasion, le jeune conducteur de Zem accepte nous prendre à deux, et ce, à 1200 F Cfa». Ce n’était pas vraiment cher pour nous mais une bonne affaire pour le zem. Nous nous en convaincrons de par les discussions qui ont suivi, une fois sur la moto. «Aujourd’hui, ceux qui prennent du taxi-moto pour les petites distances pour 100 F, 200F et 300 F ne m’auront pas. Ils sont nombreux à m’appeler tout à l’heure. Mais je les ai ignorés. Je veux aujourd’hui faire les longues distances notamment Cotonou-Ouidah», nous informe notre conducteur très joyeux. «Donc ça marche pour vous ce matin ?». «Ah oui ! Mes collègues que Voilà, pointant du doigt d’autres Zem,  viennent de Ouidah», indique le jeune homme. Avant de poursuivre «Les conducteurs de taxi-villes peuvent continuer leur grève sans problème. Seulement certains parmi eux vont mourir de faim. Pour moi, c’est une occasion en or. Avec trois aller-retour (Ouidah-Cotonou) je peux aller me reposer un peu avant de ressortir.» Tel un défi, notre “zéwé’ comme on les appelle dans leur jargon, voulait réaliser ces trois tours très vite dans la matinée. Mais cela ne nous arrangeait pas. Car, il roulait à vive allure. Heureusement, il s’en est rendu compte, il a relâché un peu le gaz. Deux kilomètres de parcourus après le marché de Pahou, nous arrivons à destination. Il empoche ses sous.
Blaise Ahouansè

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité