Quand on jouit d’une femme, on ne finit jamais d’en payer la dette

Les Béninois, on le sait, sont des machos. Ils sont convaincus qu’à partir du moment où ils ont savouré un tendron, ils sont condamnés à traîner une dette à vie. Autrement dit, tant qu’une ex vient les solliciter pour un service, ils doivent y répondre. La décence, paraît-il, le recommande. 

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La loi de la nature l’exige. C’est ce qu’a connu le sympathique Jean-Louis, jeune transitaire au Port Autonome de Cotonou.

Ce garçon n’est pas peu fier de sa réussite. Ayant fait fortune modeste dans les formalités douanières, il a lancé, dans la foulée, les travaux de sa première maison, un duplex à Calavi. En attendant, il vit dans un appartement middle class à Cotonou, dans une cour qu’il partage avec deux autres ménages, en plus des canards, des dindons et même des moutons dont les crottes et les cris créent une sacrée ambiance dans la maison. Car son propriétaire, un vieux retraité a misé sur l’élevage de la volaille et des quatre pattes pour rendre ses fins du mois moins rocambolesques. D’ailleurs, pour avoir l’œil sur ses locataires, il a installé sa fille ainée dans la maison, dans un entrer-coucher sommaire, un studio dans lequel Abdou Diouf ne pourrait jamais entrer, ni écarter les deux bras.

Or Lucie, belle plante aux jambes longues, au sourire sirop, à la poitrine achalandée déteste l’inconfort et surtout le ridicule de sa situation immobilière. Etudiante dans un collège universitaire, elle aime, comme certaines de ses camarades, paraître un cran au-dessus de sa classe sociale, avec des bijoux en or, des talons aiguille, des sacs à main Gwenchy ou Dior, des tchigans, des leyci, bref, toute la coquetterie d’une executiv woman.

Devant cette situation, il n’y a que Jean-Louis, le jeune transitaire de la maison, qui peut être à même de résoudre l’épineuse équation. C’est-à-dire, agrandir le studio de la charmante, en faire un petit bijou. Bien sûr, contre cette bonne volonté, il ne demande qu’à être servi en sensations fortes. Il y a longtemps que le bonhomme rêvait de palper son déhanché exquis. Marié à une commerçante qui s’était boudinée au bout de deux maternités, il ne pense qu’à s’abreuver corps et biens à cette nouvelle adresse. Et le temps lui donne raison. Ce qui était censé n’être qu’un échange de bons procédés devient une véritable passion. Bien sûr, les deux tricheurs ne peuvent pas consommer dans la maison. Ils préfèrent se risquer dans les « passages ». Mais comme dans ces cas-là, les titulaires finissent toujours pas lever le lièvre, le secret éclate au grand jour.

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Munie d’une machette, Madame a menacé de répandre les entrailles de sa rivale si celle-ci ne sortait pas de la vie de son homme. D’ailleurs, pour ne pas se poubelliser la vue, elle s’empresse de ramasser ses affaires, quitte le foyer et va s’installer à Calavi dans la nouvelle maison encore en chantier. Embarras de Jean-Louis. Contre mauvaise fortune bon cœur, le transitaire décide, une semaine plus tard, d’imiter son épouse. Mais d’abord, il lui faut résoudre un autre impératif : récupérer chez son propriétaire l’équivalent de deux millions de francs pour le bail de deux ans qu’il avait signé pour la location.

-Niet ! lui oppose aussitôt le vieux retraité.

-Comment non ? s’énerve le jeune transitaire.

-Tu as été avec ma fille, non ?

-Et alors ?

Le retraité a ri, il a montré sa gencive gonflée d’autant de goguenardise que de provocation.

-Quand on a joui d’une femme, lui jette-t-il sentencieusement, on ne finit jamais d’en payer l’addition. Ce que tu dois à ma fille, tu me le dois également. Une femme est d’abord avant tout une banque poilue. On y met de l’argent sans en retirer un seul kopek. Pour ta propre gouverne, faut que tu le saches.

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