Dialogue économique: l’heure de vérité

Ite misa est. C'est du latin. Partez, la messe est dite. Le dialogue économique public/privé, au terme de trois jours d'échange, a libéré des participants venus de tous horizons.

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Ils ont eu à limer cervelle contre cervelle pour remettre sur les rails l'économie de notre pays. Une économie qui n'a que trop tourné en roue libre. Une économie qui se mord la queue, à l'image du serpent de la légende. L'ère du renouveau économique s'ouvre. Quand en partagerons-nous les fruits?

Saluons la belle moisson d'idées et de propositions qui serviront à daller les chemins de nos ambitions et de nos initiatives. Nous engagerons de grandes réformes. Nous nous donnerons des repères sûrs. Nous agirons moins à l'aveuglette, au petit bonheur la chance. Mais que vaudraient, à  la fin, ces grands déploiements si nous devions perdre de vue les petits riens qui font le quotidien d'une économie? Nous voulons parler de nos petits bobos qui expliquent nos grandes défaillances. Quels sont-ils ?

Parlons des jours fériés. Ils sont trop nombreux à notre goût. Ils jalonnent une année civile comme des flaques d'eaux stagnantes le long d'un chemin. Les crapauds peuvent y trouver un milieu idéal. Mais non les hommes et les femmes sincèrement engagés à sortir de la boue du sous-développement; résolument déterminés à se hisser à la hauteur des peuples qui gagnent; honnêtement conscients que nous ne travaillons pas encore assez et qu'il nous en faut plus et davantage pour nous situer au niveau des meilleurs. Un jour férié, chômé et payé a un coût. S'il n'était pas justifié comme tel, le manque à gagner serait formellement établi au préjudice de l'économie nationale. C'est à la lumière d'une telle réalité qu'il faut déterminer, en toute connaissance de cause, les jours qui méritent ou non d'être fériés, chômés et payés. Il n'est pas sain qu'un pays pauvre dissipe ses maigres ressources.

Embrayons sur les retards et l'absentéisme. Ce sont des plaies suppurantes qui gangrènent l'administration, paralysent l'entreprise, brisent l'essor d'une économie. Le retard à son travail, l'absence, sans raison, de son lieu travail, cela revient à voler du temps, donc de l'argent, à son entreprise. "Time is money". Le temps, c'est de l'argent. S'il en est ainsi, c'est qu'il y a parmi nous beaucoup de détourneurs qui s'ignorent.

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Des pays qui s'interdisent de naviguer à vue, savent ce que coûtent à leur économie ces graves manquements. Si à l'image de ces pays, nous devons donner de la voix aux chiffres, ils nous diront haut et fort comment nous nous pénalisons nous mêmes, en nous comportant comme les premiers prédateurs de notre économie. Ils nous montreront comment nous jetons par la fenêtre d'une main, ce que nous souhaitons recevoir comme primes diverses de l'autre main. En somme, le scénario du voleur qui crie au voleur. En somme, le scénario de celui qui continue de se tirer une balle dans le pied, sans cesser d'accuser les autres d'être les responsables de son malheur.

Nous pouvons, par ailleurs, montrer comment le travail, chez nous, est hachuré de temps morts. Ce qui, bien sûr, ne peut ni nous enrichir ni nous sortir de notre sous-développement. Amusons-nous à calculer le coût des heures que nous perdons, au cours d'une journée de travail, pendus à notre téléphone, traitant des affaires complètement étrangères à ce pour quoi nous sommes payés. Réservons le même traitement à nos bavardages, à nos commérages, à nos promenades d'un bureau à l'autre. L'expression bien connue "Il s'est déplacé" cache à peine la dime que nous prélevons indument sur l'intérêt général au nom de nos petits intérêts égoïstes.

Enfin, faisons remarquer que le Bénin est l'un des rares pays d'Afrique à avoir rejeté, dans l'administration, le principe de l'avancement au mérite. Option innocente que d'avoir préféré l'avancement automatique, mécanique par ancienneté, et sans frais? C'est là un raccourci honteux pour une économie moderne. Celle-ci a des exigences de concurrence et de compétitivité qui excluent tout carriérisme, tout laxisme. Noyer les meilleurs dans la médiocrité générale, c'est faire le lit de l'incompétence, c'est accorder une prime à l'ignorance, c'est jeter à la poubelle des valeurs qui donnent au travail tout son sens. Alors question: comment pouvons nous faire du neuf, comment pouvons-nous avancer vers le renouveau économique, sans nous débarrasser, au préalable, de nos vieux habits, sans tuer le vieil homme qui sommeille en nous?  Le forum économique national, c'est maintenant qu'il commence.

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