Retard, quand tu nous tiens!

Elus locaux, restez en postes. La République vous offre de jouer les prolongations. Une loi pour entériner le fait. Plus de vide juridique. Considérez que tout est ainsi pour le mieux dans le meilleur des mondes.

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Voilà le commentaire qu’on peut s’autoriser de faire dans la perspective, chaque jour confirmée, que les élections locales ne se tiendront pas à bonne date.

Les Béninois auraient dû se rendre aux urnes ce mois de mars de l’an de grâce 2013. Mais rien, sur le terrain et pour le moment, ne renvoie à ces élections locales. Nous sommes loin d’être prêts et nous nous pressons lentement. Tout semble en place pour conclure à un retard dans l’organisation de ces élections. La révision de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) est largement encore ouverte. Le code électoral devant régir les élections en République du Bénin n’est pas voté.

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Un élève du cours primaire le comprendrait aisément : sans liste électorale, pas d’élection. Sans code électoral fixant les règles du jeu, pas d’élection non plus. Voilà des chantiers à boucler avant tout appel des populations aux urnes. Pour l’instant, on semble nous inviter à lever les yeux vers le ciel, à prendre notre mal en patience.

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Pourquoi le retard, dans l’organisation des élections, devrait-il être vu comme allant de soi, comme étant dans l’ordre normal des choses ?  Une élection non organisée à bonne date est à l’image d’un train qui entre en gare avec du retard. Quelques mots d’excuses à l’adresse des usagers et l’on estime qu’on s’est assez dédouané pour être quitte de tout. Nous établissons, en ce qui nous concerne, une étroite relation entre le retard dans l’organisation des élections et le retard du pays sur les chemins de son développement. Pour quelles raisons ?

Premièrement. Le retard dans l’organisation des élections n’est que le reflet d’une habitude de retard dans tout ce que nous entreprenons. Parce que cela n’arrive jamais par hasard. Il faut donc voir au-delà des élections. Il faut accéder aux causes réelles de notre défaillance individuelle et collective. Que font   les peuples et les institutions qui ne connaissent presque jamais de retard ? Ils montrent une rigueur à toute épreuve. Ils ont un sens élevé de la méthode et de l’organisation. Ce que requiert la conduite vertueuse de toute entreprise, de toute mission. Ils tiennent un chronogramme et planifient leurs actions. Ils bénéficient d’un système d’alarme ou d’alerte qui les prévient de tout risque de retard. Ils mettent ainsi un point d’honneur à être là où il faut, à l’heure qu’il faut, avec des résultats qu’il faut. Disons-le de la manière la plus sérieuse possible : qui commence à rater le coche des élections, doit s’attendre à rater le train de la vie.

Deuxièmement. Toute habitude renforce, en l’amplifiant, une manière de se comporter, une manière d’agir. Parce que toute habitude suppose fréquence et répétition. C’est parce qu’il en est ainsi que l’on dit : «Qui a bu, boira» ou encore « Qui a volé un œuf, volera un bœuf». Ainsi, l’habitude du retard, par rapport à nos obligations constitutionnelles notamment, finit par nous faire marquer le pas en tout et sur tout. Le retard a la vertu de nous faire produire de la mauvaise graisse. C’est la cause d’une surcharge pondérale fatale. En effet, qui souffre d’un excès de poids s’alourdit de plus en plus et est à l’heure à ses rendez-vous de moins en moins.  Voilà la pente glissante qui conduit droit au fond de l’abîme. Retard pour les élections locales aujourd’hui. Retard pour les élections législatives demain. Retard pour l’élection présidentielle après-demain. Déjà, retard via les élections dans le redémarrage de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Bénin (CCIB). Ici, les élections consulaires s’ajournent les unes après les autres comme l’on dépouille une branche de ses feuilles. Et l’on ne fait que tourner en rond depuis. Mais, jusqu’à quand ?

Troisièmement. Il apparaît ainsi que nous payons un lourd tribut à chacun de nos retards. C’est toujours cher payé et il en sera toujours ainsi. Il y a comme une incompatibilité rédhibitoire entre retard et développement. L’avenir, dit l’adage, appartient à ceux qui se lèvent tôt. Les lève-tard ne décollent pas du présent. Ils se privent d’avenir. Comme l’a dit le fabuliste, rien ne sert de courir, il faut partir à point. Le retard, comme on le dit à Cotonou, met «le pays sur répondeur». N’est-ce pas le chemin pour le mettre, enfin et hélas, hors tension ?

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