Liberté de presse : sauvée au Togo, menacée en Tunisie et au Burundi

03 mai 2013. Journée mondiale de la liberté de presse. En Afrique, si des pays doivent faire preuve de plus d’attention dans le cadre du traditionnel bilan sur l’état de la liberté de presse, ce sont, entre autres, la Tunisie, le Burundi et le Togo. Et pourquoi ? Tableau.

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Tunisie : lois à combattre

En Tunisie, une nouvelle loi en vue sur les medias, fait planer l’Epée de Damoclès sur la liberté de presse. C’est un projet de loi présenté à l’Assemblée nationale constituante par le Congrès pour la République, un allié du parti islamiste Ennahda au pouvoir. Le texte prévoit des peines allant de 3 mois à 3 ans de prison pour quiconque critiquerait le Président de la République, les membres du gouvernement, ainsi que les instances relevant de leur pouvoir.» Il y a aussi l’article 21 de la nouvelle Constitution en cours d’élaboration, qui vise la restriction de la liberté de presse. Selon nos confrères de Rfi, reprenant des propos, cet article «favorise le retour de la censure et la création d’une instance de contrôle et de surveillance équivalente au ministère de l’Information sous un régime totalitaire.»

Tout porte à croire, selon des observateurs, que la question de la liberté de presse telle que traitée par la Troïka au pouvoir, chapeautée par le parti islamiste Ennahda, est l’une des grosses désillusions de la Révolution du Jasmin. Avec l’environnement actuel et ces nouveaux textes en cours d’élaboration, on a l’impression que les méthodes anti-liberté de presse de l’ère Ben Ali n’ont pas disparu. Elles sont juste remodelées. La période post-révolution est marquée par une montée de la violence et des agressions contre les journalistes, qui ont pourtant joué gros dans le départ de Ben Ali.  "Le secteur de l'information et les journalistes sont plus que jamais menacés par les tentatives du pouvoir de restreindre les libertés par le biais de la loi", a déclaré à l’Afp Néjiba Hamrouni, présidente du Syndicat national des journalistes tunisiens.

En réponse à ce climat hostile à la liberté de presse, les syndicats et associations de journalistes, soutenus par la société civile, organisent une grande mobilisation ce 03 mai, pour protester contre la menace qui plane sur la liberté d’expression. Ils le feront via une nouvelle coalition (journalistes acteurs de la société civile) créée pour défendre la liberté de presse.  

Burundi : ne promulguez pas, M. le Président !

Au Burundi, chez Pierre Nkurunziza, l’on n’est pas loin du sort réservé à la liberté d’expression en Tunisie. Le Sénat burundais a adopté, le 19 avril, un projet de loi qui définit de nouvelles infractions liées aux métiers de la presse, et prévoit des amendes exorbitantes pour les journalistes qui les commettraient, a-t-on appris d’Amnesty international.

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La nouvelle loi, en attente d’être promulguée par le président Pierre Nkurunziza restreint le droit de couvrir des sujets liés à la sécurité publique ou à la sûreté nationale, et de diffuser des informations qui menacent l'économie ou  insultent le président. Tout manquement pourrait valoir au journaliste une amende pouvant aller jusqu'à six millions de francs burundais (environ 3 760 dollars des États-Unis.) Pis, Le projet de loi tel qu'il est actuellement rédigé pourrait rendre les journalistes passibles de poursuites pénales, uniquement pour avoir fait leur travail, a indiqué Amnesty International. Dont le directeur Afrique, Netsanet Belay, a déclaré que : «La liberté d'expression au Burundi est gravement menacée par cette loi répressive, qui se prête aux abus, et place les journalistes à la merci des autorités.» C’est pourquoi, il demande au Président Nkurunziza de «rejetter ce projet de loi et de veiller à ce que les journalistes soient en mesure de travailler librement, sans que pèse sur eux la menace d'une action en justice. »

Si elle est promulguée, cette loi viendra en réalité aggraver le sort des journalistes dans un pays où ils sont déjà exposés aux actes de harcèlement et d'intimidation et aux arrestations arbitraires, uniquement en raison de leur travail.

Togo : De justesse

Au Togo, le pire pour la liberté de presse a été de justesse évité. Et ce à cause de la pression des journalistes dont les membres de la Cour Constitutionnelle semblent avoir entendu le cri de cœur. Chez ce voisin (du Bénin) de l’Ouest, une nouvelle loi organique de la Haute autorité de l’audiovisuelle et de la communication, chargée de réguler et protéger la liberté de presse, renforce ses pouvoirs et lui donne même le droit d’interdire un journal. Les acteurs des medias du pays, ayant vu le danger pointer à l’horizon, ont manifesté, fait des journées presse morte, pour désapprouver le nouveau texte et demander aux autorités de revenir sur leur décision.

Lire aussi : Les journalistes togolais se mobilisent contre un projet de loi qui renforce la HAAC

En mars, la Cour Constitutionnelle togolaise a cassé le texte, faisant constater que «les articles 58, 60, cinquième et sixième tirets, 62, dernier tiret, 63, troisième et quatrième tirets, 64 et 67, de la loi organique adoptée le 19 février 2013, portant modification de la loi organique n°2009-029 du 22 décembre 2009 relative à la HAAC , ne sont pas conformes à la Constitution"

Le cas togolais devrait peut-être servir d’exemple aux journalistes béninois. D’autant plus que dans ce pays qualifié de laboratoire de la démocratie, sans aucune grille de sanction préétablie, la Haute autorité de l’audiovisuelle et de la communication se donne le droit d’interdire un journal, sans même recourir à la justice.

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