Vers un nouveau modèle économique pour la Tunisie : contraintes majeures à une croissance généralisée

TUNIS, Tunisie, 30 avril 2013/African Press Organization (APO)/ Le Gouvernement de la Tunisie, La Banque africaine de développement (http://www.afdb.org) et le Gouvernement des États-Unis ont publié le rapport intitulé « Vers un nouveau modèle économique pour la Tunisie : contraintes majeures à une croissance généralisée ».

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Ce nouveau rapport, cherche à cerner les principales contraintes à la croissance en Tunisie afin d’identifier les domaines où les réformes sont le plus nécessaires. La présente étude s’emploie à définir ces obstacles tels qu’ils se sont manifestés pendant les années qui ont conduit à la révolution et sous leur forme actuelle. Elle se fonde sur l’hypothèse communément admise que l’investissement dans le secteur privé et l’entreprenariat sont, en définitive, les clés d’une croissance économique durable et suit l’approche du diagnostic de croissance proposée par Ricardo Hausmann, Dani Rodrik et Andrès Velasco.

L’application du cadre méthodologique a mis en évidence deux grandes catégories de contraintes à la croissance économique en Tunisie :

Tout d’abord, l’absence d’institutions efficaces pour assurer la responsabilisation du secteur public, l’Etat de droit et les contrôles et les contrepoids au pouvoir, aboutit en Tunisie à la faible protection des droits de propriété et l’établissement de barrières à l’entrée. Les droits de propriété et les libertés d’investissement sont fondamentaux pour le développement de l’esprit d’entreprise et pour l’investissement, l’innovation et la prise de risque, et sont donc essentiels à la réalisation de la croissance, l’amélioration de la productivité et l’augmentation des salaires et des niveaux de vie. L’effort doit aussi être soutenu afin d’établir un cadre solide de gouvernance économique, avec des institutions qui fournissent aux investisseurs un ensemble clair et transparent de règles ainsi que l’assurance qu’ils seront en mesure de récolter les fruits de leurs investissements.

Deuxièmement, bien que les programmes de sécurité sociale et de protection du travail visent à améliorer la rémunération, les avantages et la sécurité économique des travailleurs, de nombreuses mesures actuellement en place en Tunisie ont été contre-productives dans la réalisation de ces objectifs et n’ont profité qu’aux travailleurs les plus fortunés. Plutôt que d’améliorer la fourniture d’emplois acceptables, elles se traduisent par une réduction des investissements, plus d’informalité, une rémunération inférieure des travailleurs, la hausse du chômage et augmentation de l’insécurité économique. Les entreprises restent petites et utilisent diverses méthodes pour contourner les exigences liées à l’embauche formelle des travailleurs, dont un recours à l’informalité et la sous-déclaration des employés. Leur incapacité à ajuster l’emploi en fonction des conditions de marché les décourage de grandir afin de réaliser des économies d’échelle et d’investir dans la formation des travailleurs. Cette dynamique réduit l’innovation et la croissance de la productivité et rend les entreprises tunisiennes moins compétitives à l’international. Des solutions alternatives pour la conception de systèmes de sécurité sociale et la protection du marché du travail doivent être considérées dans le but de protéger les personnes plutôt que les emplois spécifiques.

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Ces contraintes majeures se ressentent au niveau national et ont par conséquent des effets néfastes aussi bien dans les régions enregistrant une croissance plus rapide que dans celles à la traîne. Si l’on estime en général que l’absence d’investissement dans l’infrastructure et la mauvaise qualité de l’éducation réduisent les opportunités d’investissement et d’emploi dans les régions peu développées, l’absence de la demande produits et de travailleurs issus de ces régions tient surtout aux marchés nationaux et internationaux. En effet, les contraintes identifiées dans ce diagnostic seraient encore plus pesantes sur la croissance des régions à la traîne.

Les contraintes identifiées affectent les entreprises exportatrices et les firmes étrangères à un moindre degré que les entreprises essentiellement tournées vers les marchés intérieurs. Les entreprises exportatrices bénéficient d’exonérations sur les charges sociales et d’autres impôts pendant plusieurs années et, compte tenu de leur grande taille et de leur productivité plus élevée, ces entreprises sont mieux à même de respecter les exigences du marché officiel du travail. Ces entreprises semblent également avoir été moins touchées par les violations des droits de la propriété pendant l’ancien régime. Cependant, les contraintes identifiées sont encore de nature à inhiber les investissements et la création d’emploi par les entreprises exportatrices elles aussi. Entre temps, ces contraintes constituent un énorme obstacle pour les entreprises tunisiennes desservant le marché intérieur – dont certaines auraient pu autrement fournir les entreprises exportatrices ou exporter directement mais ne peuvent pas, dans l

es conditions actuelles, se développer ou innover au niveau requis pour être compétitives à l’international. Bien que la Tunisie se soit appuyée sur une politique industrielle et divers moratoires fiscaux pour promouvoir l’innovation et la compétitivité, les efforts supplémentaires du gouvernement visant à subventionner directement ou promouvoir l’innovation ne pourront pas déboucher sur la transformation de l’économie si ces contraintes majeures ne sont pas levées.

Outre les deux contraintes majeures relevées plus haut, des risques ont apparu depuis la révolution, susceptibles devenir des contraintes majeures si on n’y remédie pas efficacement. Il y a d’abord le risque que les troubles sociaux deviennent persistants et généralisés, ce qui découragerait les investissements au cours des prochaines années. Ce risque a pour corollaire l’instabilité macroéconomique qui pourrait s’installer si les pressions sociales et économiques internes l’emportent sur l’engagement du gouvernement à préserver la stabilité budgétaire. En plus de ce risque, l’analyse met en évidence les problèmes qui minent le secteur financier, la faible qualité de l’éducation primaire et secondaire, en particulier dans les régions à la traîne, la nécessité d’une meilleure gestion des ressources en eau et les limites actuelles de la capacité et de la gestion portuaires de la Tunisie. Si ces problèmes ne constituent pas actuellement des contraintes majeures, ils pourraient devenir des contraintes plus sérieuses à l’avenir.

À la lumière des résultats de cette analyse, la Banque africaine de développement et ses partenaires fourniront l’appui à la Tunisie pour que ce pays lève ces contraintes et parvienne à une croissance plus forte, durable et généralisée.

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