Reconduction des membres de l’Assemblée à la Cour constitutionnelle : Yayi coince Nago et consorts

Alors que tout le monde a les yeux tournés vers les tribunaux,  un épisode important de l’avenir politique de notre pays a été joué dans l’indifférence totale mardi dernier à Porto Novo. L’Assemblée nationale, après maintes tergiversations, a fini par reconduire ses quatre anciens représentants à la Cour constitutionnelle.

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Nago qui œuvrait tant pour le changement de ces membres, a été mis en minorité au sein du bureau et contraint d’accepter cette reconduction de gens proches du Chef de l’Etat.

 « En 2016, Yayi ne sera plus président mais il sera toujours au pouvoir », cette déclaration a été faite par Bénoît Dègla en 2011 alors nommé fraichement ministre de l’intérieur et après que le président Yayi venait de remporter par un K.O surprenant l’élection présidentielle de 2011. Loin d’être une prophétie dont le ministre n’en a pas le talent, il se peut que cela se réalise et qu’à partir d‘Avril 2016 Yayi soit toujours au pouvoir sans être président de la république. En fait, le message du patron des flics est assez précis. Si Yayi quitte le pouvoir, son remplaçant sera toujours quelqu’un qui est resté dans l’économie de sa politique, un de ses disciples qu’il pourra manipuler et utiliser à dessein. Et un pas majeur de cette entreprise a été franchi mardi dernier à l’hémicycle avec le premier round de la constitution de la prochaine Cour constitutionnelle, celle là même qui va gérer le contentieux électoral en 2016. 

Lire : Cour Constitutionnelle : l’Assemblée Nationale désigne enfin ses 4 représentants

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Et que s’est-il passé à Porto-Novo ? Réunis pour désigner les quatre représentants de l’Assemblée nationale à la Cour constitutionnelle, les membres du bureau de l’Assemblée n’ont fait qu’un service minimum. Ils n’ont fait que reconduire leurs anciens représentants alors qu’ils avaient la latitude de choisir les quatre entre les 24 candidats qui leur ont été envoyées. Curieuse décision n’est-ce pas ? Surtout que l’actuel président de l’Assemblée nationale Mathurin Nago avait très tôt pris les taureaux par les cornes en convoquant les membres de son bureau pour cette désignation. Il a voulu ainsi prendre le devant des choses pour ne pas être obligé à jouer les seconds rôles comme ce fut le cas en 2008. Mais il n’a pas connu grand succès dans son entreprise parce qu’il a rencontré  une farouche opposition des autres membres du bureau, pourtant de la même majorité présidentielle comme lui, mais qui l’ont combattu dans sa volonté de faire un choix consensuel et de nommer un membre proposé par l’opposition. Ce jeu s’apparente bien au jeu de coulisses du Chef de l’Etat qui aurait utilisé les autres membres du bureau pour bloquer le président Nago dans son initiative. Depuis ses dernières déclarations où il a été très critique contre le gouvernement et l’embargo décrété contre certains ministres, les relations entre Yayi et Nago se sont légèrement brouillées. Le premier en a profité à fond pour affaiblir le second.

Un jeu dangereux

On se rappelle qu’en 2008, les quatre membres ainsi reconduits par l’Assemblée nationale ont été désignés par le gouvernement à la place de l’Assemblée nationale. En effet, voulant prévenir les conséquences fâcheuses de la fronde parlementaire qui commençait à peine à l’Assemblée et qui a fait perdre la majorité au Chef de l’Etat, ce dernier a entrepris avant délai de faire désigner par le bureau de l’Assemblée dirigé par Nago 1, acquis totalement à sa cause, les quatre membres. C’était aussi au moment où une menace de destitution planait sur la tête de Mathurin Nago. Au cours d’une réunion du bureau, raconte Saka Fikara, alors premier questeur, « le président Nago nous a dit que le Chef de l’Etat a envoyé la liste de ceux qui doivent être représentants de l’Assemblée nationale à la Cour constitutionnelle ». En conclusion, c’est le gouvernement qui avait désigné et les quatre membres de l’Assemblée et les trois autres que Yayi a personnellement choisi. C’est dire donc que leur reconduction s’apparente au maintien du lobby yayiste dans cette cour qui sera totalement acquis à sa cause encore. Et là, c’est Nago qui sort perdant. En 2016, ceci risque de jouer contre lui et tous les autres candidats qui n’auront pas l’onction de Yayi lorsqu’on sait qu’au fil des années, la Cour constitutionnelle est devenue un maillon incontournable dans  pour gagner l’élection présidentielle. Si donc Yayi a encore la possibilité de contrôler entièrement cette cour, c’est dire que le président qui sera élu en 2016 sera bien celui qu’il aura voulu.

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