Correction de la LEPI au Bénin : l’imposture et le dilatoire toujours en marche

S’il y a des Béninois qui doutent encore de la capacité de leur Président a nuire a son propre pays a sa démocratie, ils ont été servis avec la séance marathon tenue le Lundi  14 Octobre 2013. Le Chef de l’Etat, assisté de responsables d’institutions censées jouer le rôle de contre-pouvoir et de ses partisans, a clairement fait l’option de mettre notre pays a genoux et sa démocratie en péril.

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 Il n’y a pas de doute, nous sommes ici en présence d’un plan « B » au cas où le projet de révision de la constitution qui prend l’eau de partout, serait définitivement noyé.

Boni Yayi ou l’art de se lever très tôt

Si le Chef de l’Etat dispose d’un talent que personne ne peut lui contester, c’est bien sa capacité à se lever très tôt et à planifier ses coups.  Procéder ainsi pour faire avancer le pays au plan économique ne lui réussit pas autant qu’anticiper un plan de destruction de ses adversaires, fussent-ils politiques, operateurs économiques ou hommes des médias.  En 2005, alors que beaucoup de gens ne se sont pas du tout rendu compte, il a tissé sa stratégie de conquête du pouvoir d’Etat au Benin en utilisant sa position de Président de la Boad et les intrigues d’auto-flagellation de la classe politique.  Les Béninois, surtout la classe politique, très préoccupée par le combat pour empêcher le Général Mathieu Kérékou et ”ses janissaires » de réviser la constitution pour obtenir une rallonge, ne l’ont pas vu venir. La suite on la connaît.  

En 2006, après sa prestation de serment comme Président de la République, il entreprit immédiatement de travailler contre vents et marées pour se maintenir au pouvoir. Point n’est besoin de revenir sur les ingrédients qu’il a utilisés y compris la fameuse Lépi pour concocter le fameux KO de triste mémoire, avec la complicité active de la Représentante Résidente du Pnud. Mais nous l’avons consommé et avec lui, son régime dit de la refondation continue de détruire les fondements démocratiques de notre pays.  La séance du lundi dernier s’inscrit également  dans cette stratégie d’anticiper sur son plan et de mettre tout le monde devant le fait accompli, grâce à une stratégie de report sans fin qui risque d’ébranler le processus démocratique en établissant une tradition de non-respect des échéances électorales.

Un montage peu flatteur pour notre pays et sa démocratie

Pour ceux qui ont suivi cette séance, le chef d’orchestre avait conçu son rôle en choisissant les acteurs de telle sorte que lui, l’acteur principal, l’auteur de toute cette déconfiture, tire la conclusion lui permettant de prendre les Béninois et l’opinion internationale a témoin sur sa volonté  de voir les élections municipales, communales et locales se tenir en 2013.  Quel cynisme!

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On se souvient encore qu’en 2010, au plus fort de l’élaboration de la Lépi, la clase politique, préoccupée par la manière cavalière dont cet outil se concoctait, au mépris de tout consensus, avait souhaite que la balle soit posée a terre et qu’une évaluation objective soit conduite pour permettre de remettre en route, un processus consensuel. Le silence avec lequel le locataire de la Marina avait répondu à cet appel plusieurs fois répétés, n’avait  d’égal que sa volonté farouche d’exploiter la confusion autour de ce processus pour gagner un second mandat.  Même les marches de protestation initiées par les leaders de certains partis politiques n’ont pu émousser l’ardeur de Mr Boni Yayi et de son complice Arifari Bako de confectionner leur Lépi  Même l’idée de corriger ou de reprendre la LEPI n’a rencontré que difficilement l’agrément du Chef de l’Etat. L’audit recommandé par l’Organisation Internationale de la Francophonie(Oif) ne sera jamais fait avant que l’Assemblée Nationale instrumentalisée n’embouche la trompette trompeuse et suspecte de la correction.

Avec le spectacle du lundi dernier et les acteurs que nous avons vu,  y compris l’honorable Saka Lafia, un des concepteurs de la « théorie régionaliste » de conservation du pouvoir, un autre plan est en cours. Le chef de l’Etat veut -il vraiment d’une Lépi irréprochable?  Si oui, comment pense t-il que cela se fasse? Quel rôle assigne t-il au COS-Lépi malgré les dysfonctionnements déballés devant lui? Où pense t-il que le Cos-Lépi va trouver l’argent pour poursuivre en toute objectivité et en toute transparence un travail qui nécessite tant d’argent et qui n’a pas encore de ligne de crédits dans le budget de l’Etat exercice 2014? A quelle qualité de Lépi s’attend-il , quand la question de la parité est toujours suspendue à la toute puissance de sa mouvance?  

Par ailleurs, si tant est que les partenaires techniques et financiers ont , à juste titre, rejeté toute idée de mettre leurs ressources dans un gâchis organisé, a t-on un plan de financement pour réaliser la correction dont le coût estimatif est de 14 milliards? Les Ptfs ont été d’ailleurs bien inspires de rejeter la demande du gouvernement car qui crée le désordre et la confusion doit payer la facture. Nous sommes en 2013 dans un monde en pleine modernité au plan de la gouvernance des Etats et il n’est pas compréhensible, ni acceptable que ce soit le premier magistrat, celui qui est suppose être le garant de la paix, de la sécurité , et du fonctionnement harmonieux des institutions qui les mélange, sème la confusion pour en tirer des intérêts bassement personnels.

Expert en dilatoire et en imposture

Le Chef de l’Etat ignore que la LEPI a des problèmes. Pour lui, « nous n’avions rien avant » et la Lépi constitue une telle avancée qu’après avoir investi 40 milliards pour la realiser, nous devons en etre fiers puisque comme le dit Sacca Lafia et les autres affidés, la Lépi du Benin est en or, l’autre dira que le Benin a fait la meilleure LEPI jamais vue dans sa carrière onusienne. Si donc la correction de la LEPI n’est pas un enjeu important tel que l’a déjà indique un membre influent du gouvernement, on ne peut être étonné de la nonchalance et l’incompétence actuellement investies dans sa correction. En outre, que vient chercher l’approche  » arbre à palabre » dans la conduite d’un Etat qui  a une constitution qui ne fait encore du mal à personne et ou chaque institution est censée jouer son rôle dans le strict respect de la loi.  Cette posture de Chef de village qui est la tendance naturelle du Président Boni Yayi ruine la crédibilité de l’Etat et confine notre pays dans la perception post-coloniale de l’enfant malade de l’Afrique. Le Chef de l’Etat est censé conduire notre pays vers la modernité en évitant toute attitude visant a instrumentaliser les institutions et tirer parti d’une confusion dont lui-même est à la base. A l’observer au cours de la séance, il n’a pas boudé son plaisir face a cette confusion qui laisse l’impression qu’il détient a lui seul la clé du respect ou non des échéances électorales dans notre pays, ce qui ne devrait pas être le cas.  Nous sommes toujours en République Bananière ou personne ne veut prendre ses responsabilités pour éviter de faire les frais de la foudre présidentielle. Et pour avoir adopté la politique du « singe de la sagesse » au plus fort de la confection assez tumultueuse de la Lépi, au moment ou Nicéphore Soglo, Bruno Amoussou, Adrien Houngbedji, Antoine Idji Kolawole, Lazare Sèhouéto et leurs militants réclamaient la pause pour discuter et créer les conditions de réalisation consensuelle de la Lépi, le Chef de l’Etat est aujourd’hui le seul responsable de ce cafouillage qui le conforte dans sa position de pêcheur en eau trouble.  Cette posture est loin de ce qui est attendu d’un homme  d’Etat qui aime son pays.

Le sacrifice pour le consensus

Les Députés et autres Maires de la majorité présidentielle dite plurielle ont donne leur vision du consensus. Une véritable honte devant l’eternel! Pour eux, le consensus demande du sacrifice, ce qui n’est pas faux. Mais c’est un message envoyé a tous ceux qui souhaitent que se fasse le consensus autour du projet de révision de la constitution. A les entendre, ceux qui souhaitent le consensus dans le cadre de ce projet, doivent être prêts a faire des sacrifices dans le cadre de la correction de la Lépi, en laissant la mouvance les conduire et perfectionner la fraude a travers un semblant de correction de la Lépi. Les vrais motifs de tout ce cafouillage sont ailleurs et comme rien ne peut rester cache tout le temps, ils se découvriront et les Béninois verront clair dans leur plan.  En tout cas, telle que la correction de la Lépi est partie, les Béninois sont très loin d’être rassurés sur son aboutissement.

Sommes-nous fixés sur la  date des prochaines élections municipales, communales et locales?

Apres cette séance-spectacle, que peut-on retenir qui ait un sens pour l’avenir de la démocratie béninoise. Sinon que la fumée autour de la lépi s’est épaissie. On a surtout découvert que le Chef de l’Etat est presse pour que les élections se tiennent « à bonne date (s’il vous plait), après l’avoir fait reporter sine die. Nous avons aussi découvert les frères,  amis et soutiens inconditionnels du Président s’embrouiller dans des considérations honteusement accessoires (rapport de force dans la désignation de cca et consorts) ou les uns veulent profiter du microphone pour régler des comptes a leur ancienne formation politique ou encore jeter l’anathème sur ceux qui hier encore considérés comme des soutiens inconditionnels, donnent aujourd’hui l’impression de lâcher la machine perdante de la révision de la constitution.  A la fin de ce spectacle, les Béninois attendent toujours un calendrier clair et précis pour l’organisation des élections. L’obtiendront-ils un jour? A quel prix et avec quelle liste?

Opposition, où es-tu?

Il est vrai que tout ce spectacle gratuitement offert au peuple béninois et devant l’opinion internationale maintes fois invoquée par le Chef de l’Etat lui-même ne s’est pas produit sans la complicité de l’opposition.  Déclarée ou non, l’opposition politique, du moins ce qui en reste, donne l’impression de laisser le Chef de l’Etat et ses collaborateurs assoiffes de pouvoir conduire notre pays vers le ridicule avec d’énormes hypothèques sur sa jeune démocratie. L’absence de media entre leur main ou l’inaccessibilité aux medias d’Etat pour s’exprimer ne peut les absoudre d’une passivité  frustrante.  Quand on a choisit de faire la politique, il faut la faire en prenant tous les risques que cela comporte y compris les sacrifices qui s’imposent. C’est cela qui a fait la grandeur des grands hommes dont il n’est pas nécessaire de citer les noms ici.  S’ils sont restes immortels ou des icônes irremplaçables, c’est qu’ils ont osé dire non, dans une constance irréfutable. Ils ont aussi et surtout combattu l’arbitraire sans avoir de grands moyens. Nous n’y sommes pas encore au Benin, en dehors de quelques rares exemples, c’est la jouissance qui demeure le leitmotiv de la vision politique.  Ainsi, le peuple peut toujours attendre dans l’espoir des lendemains qui chantent.

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