Mesdames et Messieurs, Qu’il vous souvienne que durant la campagne pour les élections législatives en 2007, le Chef de l’Etat avait pris l’habitude d’ordonner la fermeture des micros et des caméras avant de s’adresser, en langue nationale, aux populations des régions septentrionales de notre pays.
Malgré ces précautions et même à cause d’elles, les archives regorgent des contre-vérités assénées à nos concitoyens ainsi que des haineux propos régionalistes de celui qui venait de jurer « de se conduire partout en fidèle et loyal serviteur du peuple. »
Qu’il vous souvienne de son interview « à cœur ouvert », avec la presse béninoise le 1er Aout 2012. Le peuple béninois et le monde entier découvraient, sur les écrans de la télévision, la nature véritable et les convictions profondes de celui qui conduisait les affaires publiques au niveau le plus élevé de l’Etat: irresponsabilité, agressivité, tribalisme, incohérence, absence de vision et de boussole. Les populations, qui espéraient trouver dans les propos présidentiels des débuts de solution aux difficultés qui les accablent, apprennent avec stupéfaction que le Chef de l’Etat n’en savait rien et n’y était pour rien. Seuls ses adversaires politiques devaient répondre des conséquences désastreuses de sa politique. Si ce ne sont pas des opérateurs économiques peu vertueux, ce sont les syndicalistes forcément corrompus et manipulés ou les «caïmans et crocodiles » tapis dans les eaux du marigot dans lequel il a plongé, c’est-à-dire, la «classe politique» globalement «médiocre».
Dévoilant ses instructions confidentielles à nos concitoyens du nord qu’il déclare être « les siens », le Chef de l’Etat les exhorte à affronter ceux du Sud et à aller demander des comptes aux dirigeants syndicaux. Aussi renvoie-t-il, plus tard, dans la catégorie des « petits », les évêques catholiques qui ont osé parler de dialogue et de doute sur les prétendues tentatives d’empoisonnement et de coup d’Etat dans leur lettre pastorale du 15 août 2013. Le contenu agressif et la tonalité méprisante de la lettre que le Chef de l’Etat a cru devoir adresser à la Conférence épiscopale traduisent sa conception du rôle et de la place des corps constitués et des Institutions de la République.
Propos menaçants : Boni Yayi récidive dans la « méconnaissance » de la Constitution
C’est pour en faire une nouvelle illustration que, le 7 janvier 2014, le Chef de l’Etat s’est lancé dans un discours haineux, injurieux, agressif et décousus en réponse aux vœux que la société civile lui a formulés. Bien qu’il se soit trouvé des compatriotes pour soutenir de telles dérives, la riposte est venue de la jeunesse qui les a unanimement condamnées sur les réseaux sociaux.
Depuis le lundi 27 janvier 2014, les jeunes ont reçu la réponse à leur audace. Séquestrés au palais de la présidence de la République durant plusieurs heures, ils se sont vu infliger les pire humiliations, malgré leur message de détresse et d’appel au secours. Atterrés, désorientés, épuisés et dégoûtés, ils ont été condamnés à écouter des déclamations sans aucun rapport avec leurs légitimes revendications. Les états d’âme du Président de la République ont remplacé la recherche de solutions à leur quête d’emplois. Aucune proposition n’a projeté une lueur d’espoir si bien qu’une fois libérés, ils s’en sont retournés, dépités, la tête basse, plus démotivés et plus désespérés que jamais.
Après huit ans de matraquage médiatique, quel citoyen se surprend encore de la persistance et de la constance du Chef de l’Etat dans la violence verbale, les propos haineux et régionalistes, la mise à l’index et le dénigrement de certains citoyens à travers des accusations mensongères, les menaces contre tous ceux qui osent penser autrement que lui, etc. ?
Qui se surprend encore du déni permanent dans lequel le Chef de l’Etat s’enferme face à l’état délabré de notre économie, au démantèlement de l’Etat de droit et de la Démocratie, à la destruction des bases d’une administration véritable ?
Qui se surprend de la manipulation systématique des indicateurs de la contreperformance du gouvernement dans tous les domaines et de la tendance à ne jamais reconnaitre ses propres responsabilités, désignant en permanence des boucs-émissaires ?
Personne ne saurait en douter, le 27 janvier, le Chef de l’Etat a encore une fois, étalé les meilleurs arguments dont il dispose pour construire un pays de paix et de stabilité sociale, à savoir, provoquer, étaler du mépris pour les autres, déformer les faits connus de tous, dénigrer les uns, diffamer les autres. Pour éteindre l’incendie qui se déclare dans notre maison commune, il déverse de l’essence sur le toit. Il encourage la répression sauvage des responsables syndicaux, des opposants, des opérateurs économiques qu’il n’a pas réussi à transformer en hommes-liges.
Le Chef de l’Etat a tout simplement violé la Constitution et renié son serment. Il n’en est pas à la première édition. Son objectif constant reste la liquidation de la démocratie et l’instauration d’une dictature qu’il qualifie de développement. C’est pour y parvenir qu’il s’attaque à l’Etat de droit et qu’il sollicite la complicité de la Cour Constitutionnelle.
L’Union fait la Nation, face à cet entêtement dans la destruction de notre pays et dans son avilissement, appelle à un sursaut patriotique des forces vives de la Nation. L’urgence d’une solution conforme à nos lois et à notre Constitution s’impose chaque jour. C’est le moment de prévenir, c’est le moment de prémunir notre pays contre le type de drames vers lesquels conduisent les Chefs incendiaires, qui divisent les citoyens et les opposent les uns aux autres, qui demandent à la jeunesse de « se mettre debout » et de se constituer en son « bouclier », après l’avoir gavée de contre-vérités, d’amalgames, de présentations approximative et tendancieuse des faits et des données.
L’heure est grave. Nous en appelons à toutes les forces politiques, à toutes les forces sociales, à toutes les forces morales et spirituelles de notre pays, afin qu’elles prennent leurs responsabilités. Nul ne saurait dire demain, qu’il ne savait pas. C’est le moment pour que les patriotes, toutes tendances confondues, se donnent la main pour mettre un terme aux dérives suicidaires.
Elu président, Monsieur Yayi Boni n’est pas au-dessus des lois de la République. Ce pays ne lui appartient pas en propriété privée. Il doit du respect aux institutions, à son propre serment, aux représentants des travailleurs, aux représentants du Peuple. L’histoire nous enseigne que les dictatures les plus féroces se sont progressivement installées avec les mêmes approches, avec les mêmes pratiques, avec le même style au bénéfice du silence et de l’inaction des populations abusées.
C’est le moment de réagir. C’est le moment d’agir. C’est le moment de prévenir.
Cotonou, le 30 Juin 2014.
Laisser un commentaire