Délestage et crise énergétique au Bénin : la vérité sur la centrale électrique de Maria-Gléta

Le délestage, de plus en plus criard, a fait naître beaucoup de doutes sur les turbines à gaz de Maria-Gléta réceptionnées il y a 6 mois. Aux yeux de beaucoup de Béninois la centrale électrique de Maria Gléta constitue un mystère.

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Pour le gouvernement, à travers le très militant ministre des mines et de l’énergie, Barthélémy Kassa, la centrale fonctionne. Les détracteurs,  quant à eux,  n’ont de cesse de clamer que Maria Gléta est encore un éléphant blanc. Qui a raison, qui a tort ? Pour répondre à cette interrogation des Béninois, une équipe de la rédaction s’est rendue ce vendredi sur le site. Enquête.

Aussi surprenant cela puisse paraître, la Centrale de Maria-Gléta est fonctionnelle. Sept des huit turbines à gaz construites par l’entreprise canadienne, Cai, et réceptionnées il y a un peu plus de 6 mois, marchent. Et très bien même. La huitième- la numéro 3- dont le démarreur avait explosé, il y a quelques mois, est également fonctionnelle et est en passe d’être réceptionnée. Telle que constatée sur le site ce vendredi, la centrale est bien sécurisée. A chacune des huit unités de production énergétique, désormais toutes fonctionnelles, son générateur. Il existe même un  générateur de secours. En plus de cette disposition, l’entreprise Cai a installé deux groupes électrogènes de grande capacité pour prendre le relai en cas de coupure du courant électrique. L’ensemble du système de production est reliée à une salle de commande «moderne» d’où tout est géré et suivi. La quantité de combustible, la quantité d’énergie produite, les turbines etc. «Tout dysfonctionnement est visible à l’ordinateur et automatiquement l’alerte est donnée», indique un agent de la Sbee  présent sur le site. Selon les techniciens de la Cai et de la Sbee rencontrés sur le site de Maria-Gléta, le système ainsi installé et sécurisé, est capable de fournir  dans les conditions climatiques de notre pays, environ 65 mégawatts à raison de 8,5 mégawatts par turbine. A en croire le responsable de l’entreprise constructrice, la centrale de Maria-Gléta d’un montant de 33 milliards- chiffres de la société- est «aux normes et elle remplit les conditions contractuelles». C’est dire que les turbines à gaz de Maria-Gléta n’ont pas de problème.

Si telle que décrite, la centrale est fonctionnelle et aux normes pourquoi le délestage sensé être atténué par l’énergie produite par les turbines de Maria-Gléta s’est accentué dans les foyers et entreprises béninoises ? De nos différentes investigations, il ressort que le délestage est d’abord une question sous-régionale avec des spécificités dans chaque pays. Et que le noir dans lequel se trouvent le Bénin et ses populations, a diverses origines.

Difficultés d’approvisionnement de la Ceb

Pour satisfaire la demande en énergie électrique des différents foyers et sociétés et cela, à plein temps, le Bénin a besoin d’une quantité d’énergie d’environ 250 mégawatts. Cette quantité d’énergie est fournie à la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee), société distributrice, par la Communauté électrique du Bénin (Ceb), société bi-étatique commune au Bénin et au Togo. Pour satisfaire la demande en énergie des deux pays, cette dernière société qui a le monopole notamment de la production, l’importation et le transport du courant électrique dans ces deux pays, s’approvisionne auprès d’autres pays voisins que sont  la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigéria. Pour des raisons internes à eux, ces différents pays fournisseurs d’énergie ont soit, revu à la baisse la quantité exportée vers le Bénin et le Togo via la Ceb soit l’ont carrément interrompu. Le Nigéria est passé de 200 mégawatts à 100 et le Ghana, de 50 à 30 mégawatts. La Côte d’Ivoire a simplement mis fin à ses exportations. Donc aujourd’hui, seuls 130 mégawatts sont acheminés des pays voisins vers la Ceb qui, elle, répartit cette quantité entre le Bénin et le Togo, à raison de 65 mégawatts par pays. En plus de cette quantité, la Ceb produit elle-même sur son site de Maria-Gléta, 20 mégawatts également répartis entre les deux Etats-parties.

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Avec les 12 mégawatts produits par la Sbee sur son site d’Akpakpa, la quantité d’énergie aujourd’hui disponible- sans la production de la centrale de Maria-Gléta- tourne autour de 90 mégawatts. Ce qui fait un gap d’environs 130 mégawatts. Ce déficit d’énergie devrait être réduit de moitié avec la mise en service de la centrale électrique de Maria-Gléta. Mais pour diverses raisons, ce n’est pas encore le cas.

Maria-Gléta et ses difficultés

Si la centrale électrique de Maria-Gléta, comme constatée, est fonctionnelle, son bon fonctionnement souffre d’un certain nombre de difficultés dont la disponibilité du combustible. Dans le contrat de construction de la centrale il est prévu que les turbines soient alimentées par le gaz naturel. Ce choix est d’autant plus judicieux que le coût de production de l’énergie est moindre. Mais le bémol, c’est que ce choix des autorités n’a pas été suivi de prévision. Les autorités ont manqué de commander auprès du Nigéria, le gaz naturel. Ce manque d’anticipation combiné à des problèmes d’infrastructures adéquates au Nigéria- une sous-station de gaz naturel pour alimenter les pipelines- fait qu’aujourd’hui, c’est au jet A1 que la centrale est alimentée. Ce qui rend le coût de production très élevé par rapport à celui auquel la Sbee cède l’énergie aux consommateurs.  En ces temps de crise, la différence entre le coût de production aujourd’hui et celui de cession est aujourd’hui subventionnée par le gouvernement.

Selon les techniciens de la Cai, c’est cette difficulté de disponibilité du gaz naturel qui a contraint la Sbee, société exploitante de la centrale, à signer un contrat d’assurance ne couvrant que cinq des sept turbines aujourd’hui réceptionnées par le gouvernement. Et cela seulement pendant quatre heures de temps par jour. Le pic de consommation étant entre 19 heures et 23 heures, à en croire les spécialistes, c’est dans cette tranche d’heures, que sur ordre de la Sbee, la Cai met en marche le nombre de turbines qui ne peut pour des raisons d’assurance excéder cinq. Soulignons que jusqu’au jeudi 27 mars dernier, seules deux turbines étaient mises en route. Mais le vendredi dernier, quatre étaient allumées et produisaient environ 32 mégawatts.

Il convient d’indiquer que l’énergie produite par la centrale de Maria-Gléta est transportée par le réseau de la Ceb vers les consommateurs. «Cela fait que quand la Ceb a un problème sur son réseau (cas du jeudi dernier), il y a également un black out- une coupure», a expliqué un responsable de la Cai qui fait état des pourparlers en cours pour que la Cai installe son propre réseau.

La crise énergétique que vit actuellement le Bénin est donc un problème complexe né d’une succession de difficultés dont la dépendance de l’extérieur et le manque de vision des différents régimes qui se sont succédé. Cela dit, on comprend aujourd’hui que la satisfaction des besoins en énergie des populations reste, en dépit des promesses gouvernementales, un problème entier que la centrale de Maria-Gléta est loin, à elle seule, de juguler.

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La Nouvelle Tribune

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