Transhumance politique : le Prd mis en difficulté dans son propre fief

A quelques mois des prochaines élections communales, c’est la ruée des maires Prd vers la majorité présidentielle. Un à un, ils lâchent leur parti originel et font allégeance à la nébuleuse Fcbe où on leur fait miroiter la conservation de leur maroquin de maire, le développement de leurs communes et des privilèges spéciaux…

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Tous y courent presque naïvement sans trop savoir qu’ils sont eux aussi les dindons d’une vilaine farce. Le nombre des maires  Prd de l’Ouémé se réduit chaque jour comme une peau de chagrin. Le tout dernier à lâcher ce parti est le maire de Porto Novo Moukaram Océni qui a lancé le weeekend dernier un mouvement politique au nom bien insolite dénommé BP 25(Bâtissons Porto Novo 2025). Comme ses prédécesseurs dans cette option de transhumance Prd-mouvance, lui aussi devrait créer son petit club électoral qu’il doit utiliser comme ticket pour entrer dans la grande Fcbe. Et là, Moukaram Océni qui a fait montre d’une solide conviction politique au Prd a péché dans son manque criard d’ingéniosité. Tout au moins pourrait-il brouiller les pistes en ne menant pas d’activités politiques ou, s’il y tient, rallier son « BP 25 »  à d’autres forces politiques de l’opposition comme l’Un ou l’alliance Abt. Il aurait réussi ainsi habilement à se soustraire des diatribes des militants Prd et de la politicaillerie porto novienne qui l’annonçaient depuis des lunes à la majorité présidentielle. Surtout que lui, Moukaram Océni avait une situation un peu spéciale. Il écopait d’une suspension de la Direction exécutive nationale(Den) du Prd.  Décision survenue après une longue période de litige entre lui et une bonne partie de son conseil municipal et surtout après  l’implication personnelle du président Houngbédji, qui, selon plusieurs analystes, a contribué à envenimer davantage la situation.  Officiellement, on lui reprochait une gestion hasardeuse de la ville qui l’a amené à lancer, sans grande analyse, vision prospective et étude de faisabilité quatre grands projets de façon unilatérale.  Mais officieusement, on l’accuse de vouloir rempiler de force en bafouant le principe non écrit de l’alternance Goun-Yorouba à la tête de la mairie. Puis enfin, on l’accuse d’intelligence avec le pouvoir contre les intérêts de son parti , le Prd.  En cause, sa rencontre avec le président de la République, en compagnie du préfet, lui aussi ancien cacique du parti et des sages de Porto Novo.

Sur les pas des autres

Avec un tel passif politique Moukaram Océni ne devrait-il pas se calmer un peu ? Ne devrait-il pas procéder autrement. Mais le maire de Porto Novo ne s’est pas montré plus raffiné que celui d’Adjarra, Saka Yaya, parti du Prd sans tambours ni trompettes. Il lui a suffi de suivre les sirènes du pouvoir, de croire aux mêmes litanies de blocage des actions de la mairie, de risque de poursuite pour mauvaise gestion, si on n’est pas Fcbe et au maintien au poste de maire. Ce néophyte, sans grande culture politique, devenu maire après une série de manigances, juste après le décès de son prédécesseur avait vite cru à ses chantages. Plus policée, la démission du maire Saliou Akadiri de Pobè ne s’est résumée qu’à un simple courrier adressé au président du Prd. Le diplomate donnait sobrement  comme raison à son départ, les injonctions de sa base. Une raison bien curieuse puisque, bien qu’étant du Prd, Saliou Akadiri avait été coopté par une alliance composée à la fois des militants du Prd et d’autres indépendants.  Dans les antichambres politiques, on motivait sa démission par les mêmes chantages qui ont eu raison des autres. Au total, sur les neuf communes de l’Ouémé, le Prd ne contrôle que deux : Akpro-Missrété et Aguégués. Si cette dernière, plus petite commune de l’Ouémé( 9 conseillers) est souvent oubliée à cause de la modicité de ses ressources et de sa situation géographique(lacustre en grande partie), Akpro Missreté, avec son maire Michel Bahou- un Prd de race pure- a subi d’énormes pressions. Il a résisté à des enlèvements, des menaces de destitution et même des soulèvements populaires.  Pourtant, aux sorties des dernières élections communales, le Prd gagnait à partir des chiffres six des neuf communes. Mais très tôt, les manigances politiques  doublées des jeux d’annulation et des reprises à la Cour suprême ont permis aux Fcbe de gagner Avrankou et Sèmè Kpodji. Un paradoxe dans un département où la majorité est toujours acquise au Prd.

Complot politique

Si tous ces maires quittent le Prd et prennent la même direction, on peut bien douter du fait que ces démissions soient volontaires. Toutes ces démissions participent d’un plan peaufiné  depuis 2006 au moment où la guerre Fcbe-Prd faisait rage. Il vise à affaiblir sinon à faire disparaître totalement le parti de l’échiquier politique. A force de rogner des fiefs importants, on cible les grands électeurs comme les députés et les maires. Isidore Gnonlonfoun partira si vite du parti en 2007. Aujourd’hui, les exécutants du plan ont jeté leur dévolu sur les maires. On leur  envoie des émissaires, on leur fait miroiter des nombreux avantages qu’ils ont à tirer de leur appartenance à la mouvance. S’ils mordent à l’appât, on les contraint à démissionner et à rejoindre la mouvance. S’ils refusent, bonjour les persécutions, les menaces et les chantages jusqu’à ce qu’ils abdiquent. C’est ainsi que Saka Yaya, Saliou Akadiri et le gros poisson Moukaram Océni ont été atteints. Pour vite convaincre les maires Prd, il leur est servi un argument ethnique : la création  d’un grand front yoruba dans l’Ouémé et le Plateau afin de s’affranchir de l’hégémonie du Prd et de son leader Me Adrien Houngbédji.On ne doit donc pas s’étonner de voir que tous les maires démissionnaires sont yoruba ou nago. Les tireurs de ficelle ne sont personne d’autre que le ministre d’Etat François Abiola et dans une moindre mesure le conseiller politique du Chef de l’Etat Amos Elègbè qui travaille en sourdine. Ils sont épaulés par le préfet Moukaram Badarou, parti aussi du Prd et en mission pour la même cause et bien d’autres. « Sans nous, le Prd n’est rien »,se plaît à répéter l’un d’eux. C’est ainsi qu’inconsciemment, au nom d’une hypothétique fraternité Yoruba, le plan de l’affaiblissement du Prd est en marche. D’autres personnalités et leaders du parti sont dans leur cible.  Malheureusement, au sein du parti, on croit toujours à un épiphénomène. Attendant les prochaines élections communales pour reprendre du terrain mais les adversaires eux, évoluent dans leur plan et arrivent chaque jour à rogner un peu, à enlever  chaque fois un. Et ceci pourrait bien être payé cash par le parti dans un avenir proche.

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