Kandi et Ségbana : les populations brimées et terrorisées par les militaires

Du mercredi 18 au vendredi 20 juin derniers, les populations des communes de Kandi et de Ségbana ont été victimes de brimades et d’agression physique de la part de militaires.

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Au nom d’une opération nommée « nomadisation », des militaires viennent nuitamment dans les concessions des gens, saccagent tout, les violentent et arrêtent certains qu’ils accusent sans aucune preuve d’être commanditaires des affrontements meurtriers entre les pasteurs Peuls et les agriculteurs Mokolé et Bo courant janvier et février 2014. Difficile de rencontrer âme qui vit dans les villages d’Alfa Kouara(Kandi) et Lougou(Ségbana) depuis la semaine dernière. Les habitants ont vidé ces villages, fatigués de subir les agressions nocturnes des militaires qui débarquent chaque nuit pour les taper et les dépouiller même de leurs biens. Ceci, au nom d’une opération dénommée «Nomadisation» empreinte d’exactions, de brimades et des arrestations arbitraires sur les paisibles populations alors que l’objectif miroité est d’apaiser les tensions et de mettre fin aux affrontements meurtrières entre éleveurs Peuls et agriculteurs Mokolé et Bo. Pour mémoire, plusieurs affrontements ont eu lieu en janvier et février derniers entre les Peulhs et les agriculteurs des ethnies Bo et Mokolé à Lougou à Ségbana et dans plusieurs villages de la commune de Kandi dont Alfa kouara. A l’origine, les agriculteurs fustigeaient la destruction de leurs cultures par les bêtes des pasteurs peulhs. Des affrontements ont eu lieu qui ont causé la mort de quelques pasteurs. Selon les faits que rapporte le Commandant de la gendarmerie de Parakou, les agriculteurs ont décidé de tuer tous les peulhs sur leur chemin. Ce qui a engendré effectivement une quinzaine de décès et beaucoup de dégâts dans le rang des éleveurs comme celui des agriculteurs. Il fallait que l’Etat réagisse pour réconcilier les deux peuples. C’est alors qu’il y a eu des sensibilisations. Au-delà, le gouvernement via le ministère de l’intérieur a initié l’opération «Nomadisation» non seulement pour calmer les ardeurs mais pour interpeller les auteurs des infractions subvenues durant la discorde. Mais à sa mise en œuvre, cette opération se révèle une autre forme de violence sur les populations, dénoncent-elles au lendemain de la sortie des éléments de la gendarmerie de Parakou, du mercredi au vendredi dernier. C’est des intrusions très matinales dans les maisons, viols de l’intimité des populations qui sont dépouillées de leurs biens dont de l’argent, des violences physiques même sur des mineurs relâchés par la suite, des arrestations arbitraires, etc… racontent les victimes. «Ils sont arrivés à 4h. Ce sont des militaires et des gendarmes. Ils ont cassé les portes. Ils rentrent avec des lampes torches, gaz lacrymogène, ils ont pris l’argent.» raconte une victime intervenues sur une station radiodiffusion de la place. «Je donnais quand quelqu’un a tapé subitement à ma porte. Ils ont braqué une torche sur moi. Je ne voyais pas, ils ont commencé par me taper. Il y avait une dame qui a vendu de la moutarde, elle avait 4000 F qu’elle n’a plus retrouvés.» rapporte une autre. A l’arrivée, c’est une vingtaine d’agriculteurs Bo et Mokolé arrêtés et placés en détention sans aucun mandat de dépôt et une quarantaine d’autres poursuivies, a-t-on appris la semaine dernière. Aux dernières nouvelles, les chiffres ont évolué. «70 personnes arrêtées à Ségbana et 41 à Alfa Kouara».

Le commandant du groupement de la gendarmerie de Parakou, reçu par nos confrères de la même chaîne de radio, précisant que l’opération démarre plutôt à 6 heures, rejette l’information selon laquelle ses éléments prennent de l’argent et autre bien qu’ils retrouvent lors de l’opération. Mais pour les populations, c’est surtout le caractère illégal de l’opération qui est décrié. Car, après ces affrontements de janvier et février, et les sensibilisations courant mars-avril, il n’y a pas eu saisine et appréciation du dossier par une instance judiciaire du pays, du moins à leur connaissance. Tout ce passe sur coup de tête, où il suffit de doigter un individu pour que ce dernier ait les forces de l’ordre à sa trousse. Ce faisant, cette opération dite d’apaisement des ardeurs selon le commandant est plutôt en passe de rallumer la flamme de la violence entre ces agriculteurs Bo et Mokolé et éleveurs peulhs. Aux dernières nouvelles, les premières personnes sont libérées mais les militaires continuent l’opération.

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