Table ronde de Paris : les réserves du Prof Joseph Djogbénou en trois points

Le Gouvernement annonce l’organisation d’une «Table ronde» du 17 au 19 juin 2014 dont l’objectif serait de mobiliser les investisseurs autour des projets de développement (Ports, aéroports, hôpitaux,  routes etc.).

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A ne considérer que l’état de délabrement avancé de toutes les infrastructures du Bénin, et l’extrême pauvreté de la population, on devrait saluer une initiative de cette importance.  Or, on ne peut que s’interroger sur la méthode, la légitimité du gouvernement et les motivations réelles qui la soutiennent.

1°) La méthode. A s’en tenir aux différents relevés du Conseil des Ministres, la Table ronde serait organisée exclusivement par le gouvernement, sans que les forces politiques, notamment celles de l’opposition aient été associées ou, à tout le moins, consultées. Or, la dimension des engagements attendus (plus de 3 000 milliards F CFA); la nature et l’importance des projets identifiés, les délais probables d’exécution, auraient pu appeler le Gouvernement à réaliser le plus large accord politique possible autour de l’initiative.  L’inexistence d’un tel accord ou son impossibilité a dû justifier la délocalisation de l’organisation de la Table ronde à Paris. En outre, si, comme on le subodore, les projets devraient être réalisés au moyen du partenariat public-privé, la base légale d’un tel financement n’est pas encore effective, la loi sur les contrats BOT (BuildOperate and Transfer) n’étant pas encore adoptée par l’Assemblée nationale.

2°) La légitimité. Au fond, la véritable question est la légitimité d’un gouvernement en fin de mandat à engager les investisseurs étrangers et l’Etat à cette hauteur. Un gouvernement en fin d’un mandat non reconductible est condamné à gérer les affaires courantes et finaliser les chantiers qu’il a déjà ouverts. Engager sans aucune concertation politique et sociale l’Etat à cette hauteur conduit à mettre les gouvernements à venir devant un fait accompli, cequi, pour le moins, constitue une anomalie politique et démocratique. Au demeurant, cette manière de procéder accroit le risque de l’investissement aux dépens du Bénin.  La sagesse recommande à transformer les propositions du gouvernement en projet de société qui sera débattu par les candidats dans le cadre des échéances politiques majeures qui attendent le Bénin. Il est même dans l’intérêt des investisseurs de requérir une validation politique a priori des projets par le choix des électeurs avant de s’engager utilement.

3°) Les motivations réelles. Si le gouvernement s’engage, avec autant de ressources, à lever les fonds d’une aussi grande importance, dans les conditions exposées, alors même que pendant plus de huit ans il n’a pensé à le faire, il est à craindre que les motivations soient éloignées des aspirations du peuple à la paix, à la gouvernance de qualité et au respect de la Constitution. En outre, vu le nombre record d’éléphants blancs créés en moins de huit années d’exercice du pouvoir par le régime en place y compris le projet de réalisation d’une LEPI dont la supposée correction piétine toujours, mettant en péril l’organisation à bonne date des élections au Bénin, le doute reste permis quant au sérieux et à la finalité réelle de cette vaste campagne de mobilisation de ressources. Le Professeur Joseph DJOGBENOU appelle chacun à la vigilance absolue et invite la communauté internationale à éviter, en l’absence de tout cadre juridique fiable, de toute preuve de transparence, de toute consultation politique, à encourager un gouvernement à mettre fin à l’expérience démocratique sous le prétexte d’un développement économique qui peine à démarrer depuis 2006. Il convie le Gouvernement, les Institutions de la République et l’ensemble des composantes de la classe politique à assurer avec loyauté le seul programme qui lui reste, et qui, au demeurant, est inscrit dans la Constitution par le peuple : l’organisation transparente des élections législatives et présidentielle.

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