Sommet USA – Afrique : ce que Barack Obama doit dire à Boni Yayi

A Washington  où il a réuni les dirigeants africains à un historique sommet Etats-Unis-Afrique, Barack Obama doit dissuader son homologue béninois Thomas Boni Yayi de tenter de briguer un troisième mandat ; en violation de la Constitution béninoise.

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Annoncé depuis plusieurs mois, l’historique sommet Etats-Unis-Afrique a débuté hier à Washington. Il s’agit d’une initiative du président Barack Obama à laquelle ont été conviés  la quasi-totalité des dirigeants africains, à l’exception de quatre. Des leaders de la société civile et du monde des affaires du continent sont aussi de la partie. Ce rendez-vous de haut niveau prendra fin ce mercredi 06 août 2014. Plusieurs thèmes seront abordés. Le président Barack Obama et ses hôtes parleront affaires, économie, sécurité, démocratie, bonne gouvernance et droits de l’Homme. L’objectif pour l’administration Obama est de renforcer les liens économiques et commerciaux entre les Etats-Unis et l’Afrique.

A Cotonou, on suit ce sommet avec un intérêt particulier. Non pas seulement en espérant que la délégation béninoise conduite par le président Boni Yayi rentre au pays avec des centaines de milliards de dollars. Ce sommet doit être l’occasion pour Barack Obama de dissuader de vive voix le président Boni Yayi de son envie du troisième mandat. Politiquement, le Bénin entre dans une zone sensible à partir de 2015. Le pays organisera de suite trois élections. Les Municipales, les Législatives et la Présidentielle en 2016. L’enjeu est de taille. Les rumeurs se font de plus en plus persistantes concernant les intentions de Boni Yayi pour un troisième mandat. Il est vrai que l’homme avait lui-même promis à maintes reprises de respecter les dispositions constitutionnelles ; s’en tenir qu’au deux mandats prévu par la loi fondamentale béninoise. Mais entre-temps, l’eau a coulé sous le pont. Dans certains cercles proches du pouvoir, on fait de plus en plus état de manœuvres en vue de maintenir Boni Yayi au pouvoir au-delà de 2016. Les déclarations faites par la ministre de l’Agriculture Fatouma Amadou Djibril sur la télévision privée Canal 3 le 20 juillet dernier ont donné un cachet formel aux rumeurs qui circulaient depuis à cet effet.  

Propos inquiétants

« Troisième mandat. (…) le chef de l’Etat est un homme de parole. Troisième mandat. Je sais que partout ailleurs les producteurs veulent manifester leur joie au Président de la République parce que les autres années, ce n’est pas à cette date que les producteurs à 100% sont payés…(…) je crois que le peuple va décider. Le peuple va décider. Le président Roosevelt en Amérique, c’était le Président le plus populaire de l’Amérique (…) Si le peuple béninois le veut, pourquoi pas. Donc le peuple va décider. Si le peuple veut que le président Boni Yayi fasse un troisième mandat pourquoi pas. (…) C’est le peuple qui décide et c’est le peuple qui vote pour son chef. C’est ça la vraie démocratie. C’est ça la vraie démocratie. (…) Si le peuple est conscient du fait que le président doit continuer ses actions, le peuple peut décider. Je crois que le chef de l’Etat doit faire aussi la volonté de son peuple.»

Tels sont les propos tenus par la ministre de l’Agriculture sur le plateau de Zone Franche. Pourtant la Constitution béninoise dispose en son article 42 que «Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans, renouvelable  une seule fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels. »

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Sauver le laboratoire de la démocratie

Les déclarations de la ministre n’ont été condamnées ni par la Présidence de la République, ni par le Gouvernement. Depuis le grand remaniement d’août 2013, le Gouvernement n’a plus de porte-parole. Le Président de la République non plus. On s’attendait à ce que le président Boni Yayi saisisse l’occasion de son discours de la commémoration de l’accession du Bénin à la souveraineté internationale pour rassurer ses compatriotes. Mais lors de son discours du 31 juillet dernier, il a complètement fait fi de la question. Pis, la ministre Amadou Djibril n’a pas été limogé du gouvernement pour ses propos graves. Sans grand risque de se tromper, on pourrait interpréter cette absence de réaction du chef de l’Etat ou de ses services compétents comme sa caution aux propos tenus par la ministre. Les autorités américaines doivent donc constater que le mal ne guette pas que le Burkina Faso, le Congo Démocratique et le Congo Brazzaville. Il y a de plus en plus des raisons de s’inquiéter de la situation du Bénin, pourtant réputé pour la bonne santé relative de sa démocratie dans le contexte africain.

Dans le programme officiel du rendez-vous de Washington, il n’est pas prévu de rencontres bilatérales entre l’actuel locataire de la Maison Blanche et ses invités. A priori, il pourrait donc ne pas avoir de tête-à-tête entre Barack Obama et Boni Yayi. N’empêche, les rencontres et échanges en privés, les va-et-vient d’émissaires ne manqueront pas. A Cotonou, on souhaite donc que Boni Yayi revienne de la capitale américaine totalement dissuadé de l’idée de tenter forcing pour se garantir un troisième mandat. Le 30 avril 2015 au plus tard, les élections Municipales et Législatives transparentes et apaisées doivent avoir lieu. Idem pour la présidentielle courant premier trimestre 2016. Et le 06 avril 2016, un nouveau président démocratiquement élu doit prêter serment.

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