Décision Dcc 015-002 : la lettre de Lucien Chédé à Boni Yayi

Le 03 janvier 2015, suite à la requête de M. Lucien Chédé, la Cour constitutionnelle a rendu une décision sur la liste civile du Chef de l’Etat. Quelques mois après, le requérant revient sur la décision, commente les arguments du sécretaire général du gouvernement et propose que le Chef de l’Etat commette le ministre compétent pour la rédaction d’un projet de loi sur la question.

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ANALYSE ET COMMENTAIRE  SUR LA DÉCISION DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Par Décision DCC 15-002 du 13 janvier 2015, la Cour Constitutionnelle a décidé ce qui suit :

Article 1er : le Président de la République et les membres de l’Assemblée Nationale ont violé la Constitution.

Article 2 : la présente décision sera notifiée à Monsieur Lucien Gbénou A. CHÉDÉ, à Monsieur le Secrétaire Général du Gouvernement, à Monsieur le Secrétaire Général Administratif de l’Assemblée Nationale et publiée au Journal Officiel.

 En d’autres termes, la Cour Constitutionnelle rend responsables de l’exploitation efficiente de sa décision, les trois : personne (le requérant) et personnalités (les deux administrateurs) citées à l’article 2.

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Il est donc séant que le requérant que je suis, donne mon appréciation sur les conséquences de la décision de la Cour et apporte des suggestions ou contributions dans une démarche citoyenne.

Merci à la Cour ; les sept membres nommés par le Président de la République et le Bureau de l’Assemblée Nationale ont fait montre  de " compétence professionnelle et de grande probité."(Article 115 de la Constitution)

COMMENTAIRE

J’avais fini par désespérer, puisque depuis Avril 2012, je n’ai reçu que l’accusé de réception de la poste en ce qui concerne ma "lettre ouverte "recommandée adressée à l’Assemblée Nationale et parue dans la presse.

La décision de la Cour m’a permis de comprendre que celle-ci faisait un "travail de fourmis" à travers l’instruction du recours depuis mai 2012. Encore une fois, merci messieurs et mesdames communément désignés par "les sept sages".

Avant d’aborder l’application de la décision de la Cour, il sied de faire quelques commentaires tirés de « l’instruction du recours »,  comme il suit :

A. Pour le Secrétaire Général du Gouvernement ;

•           «…la seule tentative pour pallier ce vide juridique fut la prise du Décret n°90-359 du 23 Novembre 1990 », non ce décret ne peut entrer dans le vide juridique puisqu’il existait avant la loi n°90-32 du 11 Décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin ; par contre le Décret n° 92-311 du 23 Novembre 1992 pouvait être un justificatif s’il n’avait pas recueilli en son temps l’avis de la Cour Constitutionnelle (article 100 de la Constitution) et dès lors, il ne pouvait plus être considéré comme un vide juridique  ;

•           « …c’est ce traitement… de un million deux cent quarante et un mille six cent soixante deux (1.241.662) francs CFA qui a été appliqué au Président Mathieu KÉRÉKOU » ; pourquoi considérer seulement le traitement appliqué au Président Mathieu KÉRÉKOU alors que le Décret  92-311 avait été pris par le Président Nicéphore Dieudonné SOGLO ; la mémoire administrative de la Présidence devrait pouvoir le constater. Ce dernier n’en avait-il pas bénéficié ? " il faut rendre à César ce qui est à César".

•           « …cette situation a amené l’actuel Chef de l’État…à une légère augmentation  du salaire des membres du gouvernement… », c’est quoi une « légère augmentation » ? et avec quel texte réglementaire ?

•           « la finalisation du projet de loi a été confiée à un comité composé de certains ministres et du Secrétaire Général du Gouvernement », quels sont ces ministres, l’objet du projet de loi ne rentre-t-il pas dans les attributions d’un ministère ?

•           « …le ministre en charge des Finances…ne viole pas l’article 26 de la Constitution en procédant à un traitement discriminatoire lié à la position sociale …étant donné qu’une régularisation de sa rémunération se fera dès que la loi sera votée » ; ce Béninois de la diaspora a donc raison lorsqu’il s’exclame : "YAYI peut vider les caisses du Trésor Public en demandant 10 ans de rappel de salaires !!! "

•           Enfin il est à souligner qu’aucune disposition de la Constitution n’est mineure, négligeable ou facultative ; les collaborateurs du Président de la République doivent avoir à cœur de l’aider à respecter sa prestation de serment (article 53) : " …jurons solennellement de respecter et de défendre la Constitution que le Peuple Béninois s’est librement donnée ; ". Que l’on se souvienne que le Président KÉRÉKOU avait été contraint de reprendre sa prestation de serment pour avoir négligé ou oublié un groupe de mots.  

Il y a tellement d’incohérences et de gymnastiques intellectuelles  dans la réponse à la Cour qu’il vaut mieux arrêter la "saignée" ; ce commentaire n’est pas dirigé contre la personne du Secrétaire Général, mais c’est juste pour rappeler que le Bénin dispose aujourd’hui d’École d’Administration, dont les récipiendaires (nos enfants ou petits- enfants) et les formateurs, se réfèrent aux études de cas in situ (la présente décision de la Cour dans le Journal Officiel est une référence documentaire) . Les responsables de nos administrations et plus singulièrement ceux des Hautes Institutions de l’État devront être attentifs à cette donnée et faire attention dans leurs argumentaires juridiques ou administratifs publics.

B. Pour le Secrétaire Général  Administratif de l’Assemblée Nationale ;

•           Le 12 septembre 2014 : « … après toutes les recherches effectuées par nos services techniques, il est apparu que l’Assemblée Nationale n’a initié aucune loi fixant la liste civile…. » ; avec les Nouvelles Technologies, l’Assemblée Nationale ne dispose donc pas de fichiers des lois qu’elle a pu initier ! Depuis le 13/4/2012 où ma lettre ouverte a été accusée de réception, le Parlement aurait pu initier une proposition de loi pour éviter que les députés soient traités de " godillots et analphabètes" comme me l’a envoyé par courriel, ce Béninois de la diaspora, furieux de la violation de la Constitution par les deux premières Hautes Institutions de l’État. La "mondialisation" n’est pas un slogan ; c’est l’image du Bénin "démocratique" qui est écornée et aucun citoyen (même de la diaspora) ne peut  rester insensible.

•           Ce silence depuis le 13/4/2012, rappelle la situation ayant donné lieu à la Décision DCC 98-068 du 19 Août 1998 (pour violation de l’article 30 de la Constitution par l’Assemblée Nationale et le Gouvernement à la 2ème législature parlementaire) dans des termes identiques à ceux de l’article 1ier ci-dessus. Même l’actuel Président du Parlement (6ème législature)  en sait quelque chose et sans doute bénéficie-t- il de l’application de cette décision comme la plupart des professeurs d’université élus députés dès lors.

Commentaire d’ordre général

Enfin comme commentaire d’ordre général, le salaire brut mensuel  déclaré pour le Président de la République, moins de deux mille (2000) EUROS  ne paraît-il pas humiliant et ridicule ? En dix (10) ans au pouvoir (Président KÉRÉKOU ou Président YAYI), il suffit de faire la somme des salaires (salaire mensuel x 12 x 10) et de comparer le résultat aux milliards de FCFA (millions d’EUROS) pour certains comités ou commissions en quelques mois ; ceci peut faire l’objet d’un sujet d’épreuve d’examen de CEPE, le premier diplôme de notre système (!!!).

Ainsi en 25 ans d’existence, l’article 48 alinéa2 n’a jamais eu une loi d’application mais plutôt un  décret dans le meilleur des cas ! Il est à espérer que l’article 56 n’est pas dans la même situation puisque : « le Président de la République nomme…les Hauts fonctionnaires dont la liste est fixée par une loi organique. » faudra t-il une saisine de la Cour Constitutionnelle pour constater encore un vide ou une distorsion ?

QUE FAIRE ?

Secrétaires Généraux et Administratif, et requérant, cités à l’article 2 ci-dessus, avons le devoir citoyen de concourir rapidement au redressement de l’image écornée de la République. " Le linge sale se lave en famille ", mais il est évident aussi que ce n’est pas tous les enfants de la famille qui mettent les mains dans la bassine.

1)         Alors, il faut que rapidement le Président de la République commette  en urgence le ministère de son gouvernement compétent, à la rédaction d’un projet de loi (une semaine, un mois, il y a tellement de compétences pour réussir cette tâche, les moyens existent aussi) qui sera examiné en Conseil des Ministres. Il ne s’agit plus de mettre en place une commission ou un comité ; car : pour enterrer ou envoyer à la morgue un dossier, on crée une commission ; en témoigne le nouveau découpage territorial : une véritable hydre de la décentration dans sa mise en application, les douze (12) Départements n’existent que sur papier et dans l’esprit .

2)         Le Président de l’Assemblée Nationale ou le Bureau de l’Assemblée Nationale peut demander  aux différents groupes parlementaires, d’élaborer de propositions de loi (les moyens existent et les compétences aussi dans chaque parti ou groupe de partis) à examiner en urgence par la Commission des lois et en session parlementaire extraordinaire. Cela pourrait concourir à corriger quelque peu, l’image de « députés godillots et analphabètes » exclamée par ce Béninois de la diaspora.

 

Lucien Gbénou A. CHÉDÉ

Février 2015

 

Copie :

– COUR CONSTITUTIONNELLE, 3ème Pouvoir (à titre de compte rendu)

– Secrétaire Général du Gouvernement, 1er Pouvoir (pour attribution et exploitation)

– Secrétaire Général Administratif de l’Assemblée Nationale, 2ème Pouvoir (pour attribution et exploitation)

– Presse, 4ème Pouvoir (pour diffusion)

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