Paradoxal Bénin. Voici un pays qui n’est premier en rien, mais un pays qui ne perd aucune occasion pour se mettre en pole position pour-ci et pour-çà, par-ci et par-là. Nous avons revisité l’actualité récente de notre pays et nous avons fait une pleine moisson de « premiers » et de « premières ». Ainsi, le Bénin reste le Bénin, à la fois sympathique et énigmatique, ouvert et ténébreux.
C’est une première, l’élection, sur le fil, d’Adrien Houngbédji à la Présidence de l’Assemblée nationale. De mémoire de Béninois, aucun de ses compatriotes, avant lui, n’a réalisé un tel exploit : le privilège d’un triple accès au perchoir. Le 19 mai dernier, l’homme est entré aussi bien dans l’histoire que dans la légende politique de son pays, avec un beau tableau de chasse : 1991-1994, 1999- 2003, 2015-2019.
Au plan institutionnel, la Commission électorale nationale autonome (CENA) nouvelle formule a organisé ses toutes premières élections, avec les législatives qui s’achèvent. La Cour constitutionnelle, version Théodore Holo, passe sa toute première épreuve électorale avec ces législatives. La Cour suprême, version Ousmane Batoko, se prépare à gérer ses toutes premières élections locales, communales et municipales. C’est ou ce sera le baptême du feu pour les uns et pour les autres.
Au plan politique, certains députés fraîchement élus et couverts de l’onction populaire ont eu à entacher leur tout premier acte politique d’une procédure des plus discutables : la procuration. Si la loi l’autorise et l’encadre, les calculs politiciens en font une arme détestable. C’est une faute d’inaugurer une mission aussi noble par un acte aussi sale.
Au plan scolaire, c’est la première fois que le Bénin, depuis longtemps, connaît une année sans grève. L’école béninoise a été épargnée des secousses qui la mettent à mal chaque année. Que le ciel de l’école reste invariablement clair et serein, une année scolaire durant, c’est incontestablement une première. A la limite, c’est un miracle. A la satisfaction de toutes les parties prenantes à la vie de l’école, des syndicats d’enseignants aux parents d’élèves, des apprenants aux autorités académiques.
Au plan des innovations politiques, on signalera comme une toute première expérience significative la mutation qui a conduit certains ténors de la société civile à faire l’option d’entrer en politique. Le parti « Alternative citoyenne » est ainsi née des œuvres, entre autres de Me Djogbénou, d’Amégbédji, d’Olohidé et autre Aladatin. Il n’est pas excessif de dire, qu’avec une telle expérience, nous entrons en laboratoire. Une recherche novatrice est en cours. Nous devons en suivre les résultats, étape après étape. D’autant plus que, pour les législatives, pour un essai ce fut un coup de …Me Djogbénou. Il s’est fait élire député et entre ainsi au Parlement.
Au plan du développement, la période de campagne des législatives a été exceptionnellement riches en premières pierres posées ici et là et arrosées de fort beaux discours. Nous n’avons rien contre les premières pierres. Bien au contraire. Surtout quand elles annoncent de grandes et belles réalisations appelées à renforcer et embellir notre patrimoine national. Par contre, nous gardons un regard fort dubitatif sur les premières pierres alibi, sur les premières pierres de circonstances. Elles portent les promesses d’un échangeur ici, d’un hôpital là et plus loin d’une université. Tout cela participe d’une fallacieuse stratégie de communication et d’un marketing politique folklorique. Les premières pierres sans présent ne risquent pas d’avoir un avenir. Elles se laissent bouffer, à la fin, par la brousse environnante. Il est dit que la nature a horreur du vide.
Au plan de la coopération bilatérale, un pays donateur, en l’occurrence les Pays-Bas, pour la première fois, dénonce l’usage fait de son assistance au Bénin au titre d’un projet touchant au secteur de l’eau. C’est diplomatiquement admis que nos partenaires au développement se fassent des plus discrets sur de tels dossiers. Le Danemark, hier, face à l’appétit glouton des nôtres, a suspendu sa coopération et fermé boutique. Sans mot dire. Les Pays-Bas, aujourd’hui, mettent le pied dans le plat et donnent de la voix. C’est une première.
Au titre des divers, notons que la Première Dame, candidate aux élections législatives dans la 5 ème circonscription, n’a pu se faire élire. Un échec à tenir pour une première dans l’histoire politique de notre chère République des premiers et des premières.
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