Le Bénin impulsera-t-il une nouvelle dynamique à la CEDEAO ?

Au plus tard au mois de Mars prochain, un Béninois occupera le siège de Président de la Commission de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) dont le siège est à Abuja au Nigéria. Ce changement à la tête de l’une des institutions-clé de l’organisation sous-régionale, donnera-t-il l’occasion au Bénin de mieux préparer l’Afrique de l’Ouest aux multiples défis du 21ième siècle ?

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C’est un véritable tournant qu’ont opéré les chefs d’Etat et de Gouvernement en transformant, en 2006, le Secrétariat de la CEDEAO en Commission dotée de pouvoirs élargis. Cela a contribué à renforcer les pouvoirs du Président de la Commission dans la gestion quotidienne des défis auxquels l’organisation sous régionale doit faire face. Il est vrai que les grandes décisions et les principales orientations restent le privilège exclusif de la Haute Autorité des Chefs d’Etat et de Gouvernement des 15 pays membres, mais l’existence d’une Commission dirigée par un Président traduit, en théorie tout au moins, la ferme intention d’aller vers l’intégration des Etats et des peuples. Après plus de 40 ans d’existence – c’est en effet le 28 Mai 1975 que fut signé le Traité de Lagos créant la CEDEAO – le leitmotiv demeure encore aujourd’hui: ‘Une Vision, Un Destin’.

Au moment où le Burkinabé Kadré Désiré Ouédraogo s’apprête à passer le flambeau à un Béninois, il est intéressant de faire une prospective – ne serait-ce que partielle – des défis auxquels le nouveau Président de la Commission devra faire face :

Terrorisme, migrations, monnaie unique : Tout d’abord le défi sécuritaire : les actions déstabilisatrices d’organisations terroristes telles que Boko Haram, Al-Qaeda au Maghreb Islamique et d’autres mouvements armés empêchent la sous région de s’attaquer aux problèmes de pauvreté. Dans son Plan d’Action, le nouveau Président de la Commission devra faire des options claires : soit continuer à combattre les groupes terroristes par la force jusqu’à leur éventuel anéantissement, ou soit trouver un terrain d’entente avec eux. La diplomatie, après tout, n’est-elle pas l’art de chercher à concilier ce qui paraît irréconciliable ? Le Président nigérian Muhammadu Buhari a d’ailleurs annoncé les couleurs il y a quelques jours en déclarant que son gouvernement était prêt à parler à des leaders représentatifs de Boko Haram. Le nouveau Président de la Commission de la CEDEAO devrait aussi effectuer des démarches similaires auprès des Chefs d’Etat du Mali et du Niger, dont les pays font également face aux actions déstabilisatrices de multiples groupes et organisations terroristes.

Ensuite, comment faire pour réduire sensiblement les migrations massives des ressortissants ouest-africains vers le Maghreb et l’Europe, au prix de risques incalculables pour leurs vies ? Que proposera le nouveau Président de la Commission de la CEDEAO pour donner à ces millions de jeunes gens, des raisons de rester dans la sous-région et contribuer à son progrès économique ? C’est vrai que les cycles rapprochés de sécheresse, la désertification rapide, l’appauvrissement accéléré des sols, ainsi que la raréfaction croissante des sources d’eau ne laissent souvent aucun choix aux jeunes agriculteurs, éleveurs et pêcheurs. C’est ici que le Plan d’Action du nouveau Président de la Commission de la CEDEAO devra faire preuve de beaucoup de créativité, pour qu’à travers des politiques sous-régionales dynamiques, et avec l’appui de la coopération internationale, les migrants d’aujourd’hui deviennent plutôt des acteurs du progrès demain.

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Enfin, la création d’une monnaie unique, avec une Banque Centrale Unique pour les 15 pays membres de l’organisation sous-régionale : ceci peut paraître irréaliste, vu la multiplicité des instruments de paiement en circulation en Afrique de l’Ouest depuis plusieurs décennies. Mais c’est pourtant la meilleure porte de sortie du piège dans lequel sont pris un certain nombre de pays, notamment ceux de la zone CFA. L’arrimage de leur monnaie à l’Euro, bien que constituant un élément de stabilité monétaire qui facilite les échanges, coûte pourtant très cher aux pays membres. Comment des économies faibles, dont les richesses ne se limitent qu’à quelques produits d’exportation – hydrocarbures, café, cacao, coton, arachide, etc. peuvent-ils faire jeu égal avec des économies aussi avancées que celles de l’Allemagne Fédérale ou de la France par exemple ? Le pari semble perdu d’avance. C’est en prenant la vraie mesure de leurs poids économiques respectifs que les pays membres de la CEDEAO devraient décider de quelle monnaie ils ont besoin, ceci en concertation avec les pays membres de la zone Euro, les Etats Unis et la Chine. Vue sous cet angle, une monnaie commune reflèterait mieux les réalités économiques de la sous-région, et les taux de convertibilité ne seraient plus dictés par la toute-puissance du dollar américain et de l’Euro. La même réalité implacable pénalise d’ailleurs le Naira du Nigéria, le Cedi du Ghana, le Dalasi de Gambie, et le Dollar libérien. Du papier sans vrai pouvoir libératoire, auquel on préfère souvent les devises occidentales, et peut-être bientôt, le Yuan chinois ! Ce ne sont là que quelques défis auxquels le nouveau Président de la Commission de la CEDEAO devra trouver des réponses appropriées. De toute évidence, la tâche ne sera pas aisée, mais il faudra oser

Pays

Capitale

Superficie

Principales Exportations

Monnaie

Bénin

Porto-Novo

112.622 km2

Coton

CFA

Burkina Faso

Ouagadougou

274.200 km2

Coton, or, productions animales

CFA

Cap Vert

Praia

4033 km2

Café, huile de palme

Escudo

Côte d’Ivoire

Yamoussoukro

322.461 km2

Cacao, café, pétrole, produits forestiers

CFA

Gambie

Banjul

11.300 km2

Arachide

Dalasi

Ghana

Accra

238.540 km2

Or, diamant, manganèse, pétrole

Cedi

Guinée-Conakry

Conakry

245.857 km2

Café, arachide, huile de palme, bauxite, produits forestiers

Franc guinéen

Guinée-Bissau

Bissau

36.125 km2

Noix de cajou, huile de palme

CFA

Libéria

Monrovia

111.370 km2

Hévéa, café, cacao

Dollar libérien

Mali

Bamako

1.240.190 km2

Mil, coton, or

CFA

Niger

Niamey

1.267.000 km2

Productions animales, uranium, pétrole

CFA

Nigeria

Abuja

923.773 km2

Pétrole, gaz, cacao, hévéa

Naira

Sénégal

Dakar

196.190 km2

Arachide, phosphates, produits de pêches

CFA

Sierra Leone

Freetown

71.740 km2

Diamant, café, huile de palme

Leone

Togo

Lomé

56.600 km2

Coton, phosphates

CFA

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