Bénin : Ces confidences qui clouent le bec à Yayi et ses partisans

Dans deux tribunes publiées dans votre quotidien La Nouvelle Tribune et chez notre confrère « Matin Libre », Reckya Madougou et Jean-Paul Monchau, respectivement ancien ministre de Boni Yayi et ancien ambassadeur de France au Bénin font des confidences qui confirment que derrière le projet de réforme constitutionnelle porté par l’actuel Chef de l’Etat se cachait l’ambition d’un troisième mandat. Rappels et extraits. 

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Le projet de révision constitutionnelle du président Boni Yayi visait-il à lui offrir l’opportunité d’un troisième mandat ?  La réponse à cette question a polarisé  le débat public au Bénin pendant les années 2012, 2013, 2014 et même 2015. D’un côté, les soutiens et sympathisants du Chef de l’Etat. Croyant au discours public tenu par ce dernier, ceux-ci étaient convaincus que le projet de révision constitutionnelle ne cachait aucune ambition pernicieuse du buffle de Tchaourou. Parce qu’en effet, officiellement le projet visait à renforcer la démocratie béninoise et à améliorer la gouvernance des affaires publiques. Les principales réformes autour desquelles le Chef de l’Etat et ses soutiens politiques ont bâti leur communication sont, l’institutionnalisation de la Cour des comptes, la constitutionnalisation de la Cena (Commission électorale) et de l’imprescriptibilité des crimes économiques. A priori, l’introduction de ces nouveautés dans la loi fondamentale ne devrait pas mettre les compteurs à zéro, permettre au président Boni Yayi d’obtenir un troisième mandat. Et ce, contrairement à l’article 42 de la Constitution qui limite à deux le nombre de mandat présidentiel.  Surtout que, le Chef de l’Etat a affirmé à maintes reprises et devant d’éminentes personnalités, sa volonté à respecter la Constitution du 11 décembre 1990. Il a  pris cet engagement devant le Pape Emérite Benoit XVI, les présidents français Nicolas Sarkozy et François Hollande ainsi que l’américain Barack Obama. Cependant, une grande partie de l’opinion publique et de la classe politique avaient des réserves concernant ses professions de foi. Ces réserves trouvaient leur fondement dans certaines subtilités contenues dans le projet de loi portant révision introduit à l’Assemblée par le gouvernement, des confidences issues de certains cercles très proches du régime, le discours de certains membres de la famille politique de Boni Yayi  et la stratégie de forcing qu’a voulu employer le régime pour faire passer une réforme très controversée ; en l’absence de tout consensus, menaçant la stabilité socio-politique du pays.

Personne n’a contredit Reckya Madougou

Malgré le rejet populaire et politique, le Président Boni Yayi a foncé tête baissée. Le texte est sur la table des députés. Le projet de révision a été le principal thème de campagne des législatives du 26 avril 2015 ; mettant aux prises révisionnistes et anti-révisionnistes sur le ring électoral. Pour la présidentielle 2016, le débat est moins centré sur la révision de la Constitution. Cependant, concernant les ambitions inavouées du président Boni Yayi, des voix se font entendre. Des écrits de deux éminentes personnalités viennent confirmer qu’il y avait derrière le projet de réforme, une intention de sauter les verrous pour garantir à Thomas Boni Yayi un troisième mandat présidentiel. La première personnalité est Réckya Madougou, ancienne ministre de la Microfinance, puis Garde des Sceaux du Président de la Pépublique. Elle a passé cinq ans au gouvernement (2008- 2013). Dans une tribune publiée début février dans les colonnes de notre confrère, Matin Libre, l’experte internationale en finance inclusive et ambassadrice Unit Life/Onu pour l’Afrique, connue pour son franc parler, a souligné que l’idée d’un troisième mandat était « voulu en sourdine par certains thuriféraires » du régime. Mieux, l’ancienne madame «touche pas ma Constitution» relate des circonstances de sa dernière discussion avec Boni Yayi sur le sujet.  « Notre échange le plus mémorable sur le sujet aura duré 2 heures d’horloge et s’est déroulé le 14 octobre 2014 en présence de quelques témoins qui s’en souviendront en me lisant », raconte-t-elle. Jusqu’au moment où nous mettons sous presse, les déclarations de la ministre Madougou n’ont fait l’objet d’aucun démenti, ni par le président de la république, ni par ses actuels fidèles soutiens.

Les soupçons confirmés

Les confidences de Reckya Madougou sur l’existence d’un complot du troisième mandat sont renforcées par celles de Jean-Paul Monchau, Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de France au Bénin de 2011 à 2013, période où les affaires empoisonnement, coup d’Etat et révision de la Constitution battaient leur plein. On se rappelle que le séjour béninois de l’Ambassadeur Monchau a été écourté suite à des brouilles entre les autorités béninoises et lui. « Les citoyens béninois garderont en mémoire les scandales qui ont marqué ces années et les histoires abracadabrantesques qui ont fait régulièrement la « une » des medias ou alimenté les rumeurs les plus folles », rappelle-t-il dans une lettre à ses « amis béninois », publiée par La Nouvelle Tribune vendredi dernier, reprise dans la parution de ce jour (voir page 5). « Mais, poursuit-il, pour l’avenir, les Béninois auront réussi à éviter le pire : la modification de la Constitution et le troisième mandat.» Il ajoute que «Boni Yayi avait en tout cas bien compris que je prenais ses déclarations au pied de la lettre et qu’il n’aurait pas, avec moi, un avocat auprès de Paris pour appuyer l’idée d’un troisième mandat. Du coup, je suis passé dans le camp des « ennemis » de Boni Yayi et il fallait que je parte, comme d’autres avant moi : Jean-Marie Ehouzou, Robert Dossou, Pascal Irénée Koupaki , Albert Tevoédjré… autant de personnalités, comme bien d’autres, dont les prises de position constituaient des obstacles à son projet de maintien à la tête de la République et qu’il fallait donc écarter.» Les faits, les confidences et l’histoire interpellent le président Boni Yayi

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