Yacouba Fassassi : Pourquoi les populations de l’Ouémé voteront pour Lionel Zinsou

Les élections de Février 2016 seront l’occasion d’une recomposition du paysage politique de notre pays, le Bénin. La saison des pluies…des billets franc CFA sera en réalité de l’eau versée sur le dos du canard des électeurs quand il s’agira de Porto-Novo.

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En effet,  la débauche d’efforts à coup de billets de banque et des gadgets  électoraux ne va pas changer certaines convictions profondément ancrées dans l’imaginerie populaire des Porto-Noviens. La précampagne sera un avant goût de la campagne et les résultats attendus pourront valablement se mesurer à l’aune des foules drainées par différents candidats lors des meetings populaires. C’est pourquoi, le Bénin une fois encore, va surprendre et étonner le monde au soir du 6 mars 2016, car les foules drainées, à Porto-Novo, pendant les périodes de précampagne et de campagne  vont voter effectivement pour le candidat pour lequel  elles s’étaient déplacées.  La politique est  une autre religion pour les Porto-Noviens et comme dirait Karl Marx, la politique, à Porto-Novo, est l’opium du peuple. Il en découle, qu’à Porto-Novo, la foule est le peuple qui vote et le peuple qui vote est la foule : les deux, la foule et le peuple qui vote font un. Cette foule colorée, bigarrée et enthousiaste qu’on a vu au Stade Charles de Gaulle de Porto-Novo le samedi 30 janvier pour applaudir à tout rompre le candidat Lionel Zinsou est bel et bien une partie du peuple qui vote et votera à Porto-Novo pour ce candidat là, Lionel Zinsou. Ainsi comme à la Kaaba, à la Mecque, sur la Place Saint Pierre à Rome, la ferveur et la foi  qui transforment une foule en un rassemblement de fidèles, la même ferveur et la foi dans cette « église » politique qu’est le PRD à Porto-Novo nous autorisent à affirmer que la foule et le peuple qui votent à Porto-Novo et qui étaient au Stade ne font qu’un.  Ainsi, les candidats qui passent à tour de rôle au Stade mythique Charles de Gaulle de Porto-Novo d’où le  candidat Général Mathieu Kérékou lançait toujours toutes ses campagnes pour les élections présidentielles savent pertinemment qu’ils sont venus passer un test de popularité. Et à juste titre,   et mieux que quiconque, ils doivent savoir si oui ou non ils ont réussi à passer ce test  de passage à l’étape de candidats crédibles. Iowa, dans les élections présidentielles américaines, tient lieu de test de popularité et de réussite pour les candidats. Porto-Novo est le Iowa des élections présidentielles au Bénin. Porto-Novo ou plus précisément le Stade Charles de Gaulle  de Porto-Novo est le cimetière des candidats à toute élection présidentielle  au Bénin tout comme Iowa est le cimetière des candidats aux élections présidentielles  aux Etats Unis.

Des candidats plus ou moins liés à Porto Novo

Pour tout observateur objectif seul le candidat  Lionel Zinsou, et dans une certaine mesure, Abdoulaye (Abdou) Bio Tchané, a réussi à ce test.

Porto-Novo, ville aux trois noms, Adjachè, Hogbonou, Porto-Novo est en réalité un gros village où les gens sont très attachés à tout ce qui est porto-novien, aux liens de parenté.

Le candidat Abdoulaye Bio Tchané est par exemple, tout comme Lionel Zinsou, Patrice Talon et Sébastien  Germain Ajavon   perçu comme un Porto-Novien. En effet, Abdou est le fils de ma tante Aladja Modukpe Paraiso Bio Tchané. Il a passé toute son enfance à Porto-Novo.

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Lionel Zinsou est, de par sa grand- mère paternelle, de la famille Zamba de Porto-Novo, au quartier Oganla dans le Troisième Arrondissement de Porto-Novo.

Patrice  (Pat) Talon est un Porto-Novien par alliance, son épouse  est Porto-Novienne, et Patrice a un amour spécial pour Porto-Novo ou il a construit une très belle maison dans le quartier  Djrado les Palmiers de Ouando dans le Cinquième arrondissement de Porto-Novo.

Sébastien Germain Ajavon est un Porto-Novien. Il a grandi à Porto-Novo où sa maman a été une grande femme d’affaires dans le secteur de la poissonnerie et des volailles au grand marché de Porto-Novo. Quand il parle  goun, c’est un grand art, c’est de la haute rhétorique, et c’est un trait particulier du Porto-Novien : se battre avec l’arme de la parole, Porto la Bouche.

Voilà donc quatre fils de Porto-Novo qui n’ont évidemment pas attiré la même foule, soulevé la même fureur et déclenché la même ferveur dans Porto-Novo. Pourquoi ?

Porto Novo ville particulière et mystique

1- Contrairement à l’idée généralement répandue, Porto-Novo ne vote par pour  de l’argent en dehors des inévitables  rafraichissements que le candidat offre aux militants et autres sympathisants après  les meetings. Porto-Novo vote plutôt pour le projet de société (ou tout ce qui y tient lieu) du candidat en ce qu’il touche aux cœurs des Porto-Noviens. Porto-Novo, comme une belle femme, aime être séduite. Le candidat Mathieu Kérékou, mieux que quiconque, connaissait Porto-Novo et arrivait souvent à s’octroyer environ  40% du suffrage des Porto-Noviens. Dans son Projet de société intitulé « Préparer le Bénin du Futur » (que nous avons écrit sous la direction du candidat) il a proposé un Programme Spécial pour la réhabilitation de la Ville de Porto-Novo et un poste de Premier Ministre réservé à un fils de Porto-Novo.  Pour les élections de 2001, Kérékou a fait identifier plusieurs sites sur le Boulevard Lagunaire de Porto-Novo pour y ériger des bâtiments administratifs qui devaient abriter les bureaux de la Haute Autorité de l’Audiovisuelle et de la Communication (HAAC), la Cour Suprême, le siège du Conseil Economique et Social (CES)…

De tous les candidats à l’élection présidentielle de Mars 2016, seul le candidat Lionel Zinsou a su exploiter cette fibre sensible des Porto-Noviens en reconnaissant publiquement au Stade Charles de Gaulle le samedi 30 janvier 2016 avoir promis au Maire de la ville, président du Comité d’organisation du Congrès extraordinaire du PRD, que « Porto-Novo  aura son deuxième pont et voire un troisième pont », « que Porto-Novo aura son université », qu’il va « donner à Porto-Novo les attributs d’une vraie Capitale », et que «Porto-Novo aura un Hôtel de Ville digne d’une grande capitale », etc..

2- Porto-Novo est une ville particulière ; c’est une ville à nulle autre pareille. Porto-Novo n’est pas une ville anonyme, sans âme. Porto-Novo est une ville famille où tout le monde se connait. Les Porto-Noviens ont un amour farouche pour leur ville, les Porto-Noviens s’identifient à leur ville. Et en réalité, les Porto-Noviens votent pour leur ville, ils ne votent pas pour un parti ou un candidat. C’est une illusion de croire que les Porto-Noviens votent aveuglement pour le PRD. Quand un parti (ou un candidat) réussit à s’identifier aux intérêts  de la ville et à faire croire aux populations qu’il est leur porte étendard, alors ce parti (ou ce candidat) a les faveurs de la majorité des Porto-Noviens. Le nom PRD, donné par feu  Président Sourou Migan Apithy à son parti créé dans les années 1950 et repris par Me Adrien Houngbedji pour désigner son parti créé à la veille de la Conférence Nationale de Février 1990,  est un nom fétiche que  progressivement les Porto-Noviens ont identifié à Porto-Novo politique. Aussi à tort ou à raison beaucoup de Béninois soupçonnent tout Porto-Novien d’être un membre du parti PRD. Même le grand Kérékou identifiait souvent  Porto-Novo au parti PRD, comme étant le parti de tous les Porto-Noviens  même si les partisans de Kérékou non PRD sont nombreux dans la ville et faisaient régulièrement un score non négligeable de 40%  pour leur candidat à Porto-Novo. Aussi Kérékou ne voulant pas des problèmes avec Porto-Novo, évitait d’avoir des problèmes avec le PRD. En effet, au  moment de la crise politique  survenue entre le PRD et Kérékou, ce dernier fit venir au Palais de la Présidence les sages et notables de Porto-Novo pour tenter une réconciliation avec la ville qui le boudait à cause du sort ou du tort qu’il aurait fait au  PRD qui l’avait soutenu au deuxième tour contre Soglo  à l’élection  présidentielle de 1996.

Le Conseiller spécial du Chef de l’Etat que j’étais avait assisté à cette audience. Le Président de la République était le seul à prendre la parole et l’audience dura à peine 10 minutes. Très courroucé et  sur un air grave, le Général  lança à la délégation des Sages de Porto-Novo « Allez dire à votre fils Houngbédji que lui et moi nous  nous retrouvions pour une confrontation à la Place Jean Bayol de Porto-Novo et il me signifiera publiquement la clause de l’accord entre lui et moi que je n’ai pas honorée. Nous, on est un militaire, on respecte scrupuleusement nos engagements. Il faut qu’il cesse donc de vous raconter des coups…. » Et le Général de poursuivre : « J’ai donné à Porto-Novo plus de postes ministériels qu’à tous les autres départements, je vous ai donné le poste de Premier ministre, des postes de Préfets et d’ambassadeurs, et que sais-je encore ?  Aucun autre Président élu ne vous donnera autant de postes jusqu’à la fin du système des choses. Et que ce soit écrit comme le disait le Pharaon. Allez lui dire cela. Et dites lui que la terre ne trahit pas la terre et que je ne peux jamais trahir  Porto-Novo, je ne peux jamais trahir l’Ouémé. Je suis de l’Atacora et le fleuve Ouémé prend sa source dans l’Atacora ».

Ainsi, on comprend facilement l’importance mystique que revêt Porto-Novo pour quiconque veut se lancer dans la politique au Bénin. Chaque pays a sa ville électorale  test, comme l’Etat de l’Iowa  pour l’élection présidentielle aux Etats Unis, Porto-Novo est au Bénin, la ville test pour établir la réussite ou l’échec d’un candidat à l’élection présidentielle. Sur cette base, sauf à souffrir de myopie politique, le candidat Lionel Zinsou a plus de chances que les autres candidats pour devenir Président de la République le 6 avril 2016,  parce qu’il  a passé le test de Porto-Novo, le Iowa du Bénin politique. Evidemment, la décision finale se trouve dans les Mains de l’Eternel des Armées.

Dr Yacouba FASSASSI
Porto-Novo, le 12 Février 2016.

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