Bénin : La vie quotidienne sous Patrice Talon

Le jour se lève sur la terre de Gbèhanzin et de Kaba. La saison des pluies s’annonce. Les ondées ne sont pas rares. Cotonou s’inonde inexorablement, fidèle à sa réputation.

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Les souvenirs de l’élection présidentielle s’estompent. Les uns se dégrisent de l’euphorie de la victoire. Les autres finissent de cuver leur échec. A certains carrefours, des reliquats têtus de quelques affichettes de campagne continuent de nous faire le pied de nez.

Une nouvelle administration s’installe. Elle se donne d’emblée la couleur, l’odeur et la saveur de la rupture et du « nouveau départ ». Mais, rupture d’avec qui et d’avec quoi ? Départ vers quelle destination ? Les Béninois ne se sont jamais autant interrogés. Jamais ils n’ont autant mis en équation leur présent et leur avenir. A la recherche obstinée d’une inconnue qui se fait décidément têtue, résolument rebelle.

Aux sièges des différents partis politiques, en hibernation forcée depuis qu’ils ont été mis hors course, on regarde vers la commission chargée des réformes politiques et institutionnelles. De quoi demain sera-t-il fait ? A quelle sauce, accompagnée de quelle pâte, sera-t-on mangé ? Quel jour nouveau éclairera le nouveau paysage partisan ?

Au marché international de Dantokpa, on n’est pas à la joie. La baisse drastique du cours du naïra, la monnaie nigériane, a tout gelé, malgré un chaud soleil de déception partout visible. Elle se lit sur tous les visages. Elle se laisse voir sur tous les étalages. Mais les braves gens de marchands et de marchandes ne perdent pas pour autant espoir. « Dieu fera » entend-on dire, ici et là. Ces gens-là en ont vu pire. Ils sont blindés contre l’adversité. Ils sont habités par l’inébranlable certitude qu’ils bénéficient de la protection divine.

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Dans la buvette d’à côté, la discussion s’anime. Elle porte sur la décision du gouvernement d’assainir et de sécuriser le monde du bâtiment. Est ainsi interdite l’importation de certains matériaux de construction qui ne seraient pas aux normes. Le fer est notamment visé. Le consensus semble se faire moins autour du caractère salutaire d’une telle mesure. Mais davantage autour de l’uppercut foudroyant servi par le gouvernement aux bénéficiaires de ce trafic honteux. Quelque chose comme un air de « béninoiserie » flotte dans l’air. C’est très béninois, en effet, qu’on soit contre quelqu’un ou quelque chose. Mais très rarement qu’on soit pour quelqu’un ou pour quelque chose.

Le charbon de bois brutalement banni par une décision du gouvernement. Le charbon de bois promptement réhabilité par une autre décision du même gouvernement. Un journaliste, un rien critique, parle de rétropédalage. Un opposant qui clame haut et fort qu’il n’a pas voté Patrice Talon, lâche, tout jubilant, le poison assassin : « Ce va et vient malheureux est la preuve d’une incompétence notoire. Nous avons affaire à un gouvernement ventilateur ».

Les syndicalistes sont aux aguets. La trêve qu’ils observent depuis participe de la stratégie du caïman : dormir les yeux ouverts. Aussi font-ils et refont-ils leurs comptes. Aussi revisitent-ils leurs cahiers de doléances. L’état de grâce   accordé au nouveau locataire du Palais de la Marina ne doit pas être compris comme une impasse sur le front social.

Sur les ondes des radios, les grogneurs grognent sans désemparer. La suspension du Bénin de toutes compétitions bénéficiant du label de la FIFA fait l’objet de tous les commentaires. Les uns parlent d’une mesure salutaire. Il faut couper l’herbe sous les pieds de la maffia qui cherche à prendre le football béninois en otage. Les autres s’apitoient sur le sort et le devenir de milliers de jeunes gens brutalement écartés d’une occupation qui les préserve de l’oisiveté et de la délinquance. D’autres se veulent plus radicalement critiques. Le gouvernement est mis à l’index au motif qu’il n’aurait pas levé le petit doigt pour éviter à notre pays cette suspension de la FIFA.

C’est mercredi, jour de conseil des ministres. Le soir venu, tout le monde se mobilise. Chacun à son poste radio ou devant son téléviseur. Des décisions marquées du sceau de la rupture. Des nominations consacrant de nouveaux responsables à diverses fonctions. Des mesures qui entretiennent l’espoir d’un nouveau départ. Des pages du livre Bénin qu’on tourne. Des cartes d’un Bénin nouveau qu’on trace. Tant qu’on vit, l’espoir est permis. Ainsi va le Bénin, sous le Président Patrice Talon

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