Les cérégales de Togbédji Ahokpa: Du Dèguè béninois sur les tables en France

Togbédji Ahokpa est un jeune entrepreneur d’origine béninoise vivant en France. Il a fait le pari d’adapter le dèguè du Bénin avec des produits français, et d’industrialiser le concept.

Publicité

Nous sommes allés à sa rencontre pour qu’il nous parle de son expérience. Comment est-il parvenu à ce projet? Quelles sont les difficultés qu’il a rencontrées et ses ambitions pour le futur. Découvrez les cérégales de M. Ahokpa.

Merci M. Togbédji Ahokpa, de vous apprêter à nos questions. Présentez-vous.

Bonjour, je suis Togbédji AHOKPA. Béninois, jeune entrepreneur dans le secteur de l’agroalimentaire.

Vous êtes promoteur d’un yaourt au millet artisanal et naturel appelé « Les cérégales ». Parlez-nous de ce produit alimentaire.

Le yaourt au millet/Vanille est la première référence que distribue l’entreprise. Le projet a débuté en 2013. Il nous a fallu, dans un premier temps, reproduire la recette maison sur du matériel semi-industriel. Donc créer le produit. Pour chaque ingrédient, nous nous approvisionnons chez les meilleurs agriculteurs. C’est un choix. Le lait est issu de Froment du Léon, une vache rare (300 dans le monde) qui produit un lait riche mais en petite quantité. Nous avons souhaité mettre en valeur ce lait parce qu’il existe une multitude de races, dans le monde, qui produisent un lait meilleur que ce que nous trouvons en magasins aujourd’hui mais qui sont oubliées par l’industrie car produisant peu.

Publicité

Les Cérégales c’est du yaourt et des céréales, le millet. C’est une céréale très riche en protéine mais également avec une charge microbienne élevée. Le défi réel pendant cette période de recherche a été de trouver l’alchimie entre le yaourt, produit vivant, et la céréale, tout en travaillant à maintenir une durée de vie d’au moins 3 semaines. Nous l’avons fait. La vanille est la première saveur et encore sur cet ingrédient nous utilisons de la vraie, vanille bourbon. N’étant pas du domaine agro, j’ai tout appris, de la fabrication du yaourt, auprès de professionnels de l’agro.

Lancer un produit alimentaire en France, qui a une bonne réputation alimentaire à l’échelle mondiale, n’est pas chose aisée car je n’ai pas souhaité faire comme la plupart des africains qui fabriquent dans leurs cuisines pour vendre autour d’eux. Nous nous sommes battus pour avoir toutes les autorisations. Nous avons travaillé avec les agents du ministère de la Santé qui nous ont permis de faire valider le processus de production et d’avoir les autorisations de vente sur le marché. C’est long et éprouvant, mais c’est ce que font Danone , Nestlé, … alors nous l’avons fait. Aujourd’hui, nous sommes distribués et nos clients ce sont: Carrefour, U express, Intermarché, des restaurants, des hôtels, … C’est une innovation sur le marché français. C’est un produit gourmand car je suis moi-même un gourmand, naturel et donc sain.

M. Togbédji Ahokpa comment êtes-vous parvenu à la réalisation de ce projet agro- alimentaire ?

N’oubliez pas que tout est affaire de volonté, de détermination, de lucidité. Avec tout cela, les opportunités se présentent à portée de main. Vous avez bien compris qu’il est indispensable de se convaincre résolument de ce qu’on sait faire, savoir bien le faire pour en convaincre les gens. Je suis contre ceux qui pensent que quand on est noir ou étranger, on ne peut pas réussir en Europe ou ailleurs dans le monde. Là, se trouve le génie de l’entrepreneur. Comme vous le savez, dans aucun pays, le gouvernement ne change le quotidien des populations. C’est une mission qui revient aux entrepreneurs. Quand j’ai intégré cette vision, je me suis rendu compte que peu de choses pourraient me stopper. À cela, s’ajoute une grosse dose de travail. Comme chez tout entrepreneur, je ne connais pas les vacances, les week-ends. Je dors peu mais c’est ce que j’aime car je crois à une meilleure alimentation dans le monde.

Ce yaourt est similaire au « Dèguè » consommé au Bénin. Est-ce à dire que c’est une spécialité béninoise que vous avez exportée en France ?

Le yaourt est consommé un peu partout maintenant en Afrique, à peu de choses près, notamment au Bénin et en Côte d’Ivoire, mais la différence pourrait se trouver au niveau du goût et cela est dû à plusieurs paramètres. Le BENIN à une longue tradition de yaourt, fabriqué traditionnellement et de manière industrielle. J’ai des amis, originaires de plusieurs pays d’Afrique, qui consomment mes produits. Donc, vous constatez que notre première référence, chez LES CÉRÉGALES, bénéficie ainsi de plusieurs influences positives qui font d’elle un produit qui fait plaisir aux papilles, un produit sain.

Quels sont les tests de reconnaissance « qualité » que votre produits a subis ?

Notre produit a subi tous les tests de qualité que subissent les produits que vous trouvez en grande surface. Rien de plus. La validation de ces tests nous a permis de pouvoir commercialiser nos produits. Les tests sont assurés par le ministère de la santé.

A la date d’aujourd’hui, quelle est votre capacité de production et de distribution?

Même si la mise au point nous a pris plus de deux ans, la commercialisation n’a débuté qu’en 2016. Nous sommes distribués à Rennes et depuis peu à Saint Malo. Notre ambition est de pouvoir faire goûter, très vite nos gourmands produits à toute la France. Nos capacités de production et de distribution sont, aujourd’hui, sans limites. Nous nous sommes bien préparés.

Parvenir à réussir dans l’entreprenariat agro-alimentaire dans un pays comme la France où le taux de chômage grimpe n’a certainement pas été une mince affaire pour un étranger africain comme vous. Quelles sont les difficultés que vous avez eues et comment les aviez-vous surmontées ?

Merci pour votre question. Dans la vie, rien n’est aisé à faire et aujourd’hui, surtout par les temps qui courent et encore plus pour les jeunes étrangers, on ne doit pas s’attendre à voir l’alouette tomber rôtie du ciel. Que voudrais-je dire? Les difficultés sont nombreuses et multiformes. Il serait vain de chercher à les énumérer toutes ici. Ce qu’il faut retenir, et c’est le plus important à mon avis, est quand vous choisissez de faire quelque chose, il faut commencer en tout premier lieu réussir à vous en convaincre solidement, de manière indécrottable en vous forgeant un mental de gagneur. En deuxième lieu, il faut investir tous les aspects de l’activité dans laquelle vous avez volontairement choisi d’œuvrer. Je lorgne ainsi l’impérieuse nécessité de se former, de s’informer surtout pour ensuite pouvoir informer et convaincre.

Deux ingénieurs qui ont travaillé sur le produit témoignent

Vous comprenez donc qu’il y a une indispensable action sur soi et une action sur les autres, toutes faites d’abnégation, de volonté inébranlable, de don de soi. Au bout du compte, on se rend compte qu’il y a en fait de la place pour tout le monde et pour chacun. Il faut seulement savoir apprendre à choisir. Ce n’est pas facile, mais quand vous vous rendez compte que vous êtes à l’étranger et que surtout vous avez des responsabilités à l’égard d’autres personnes, vous n’avez pas d’autres choix que de vous employer résolument àavoir votre place dans la société, d’ailleurs où que vous vous trouvez.

M. Togbédji Ahokpa, quelles sont vos ambitions futures ?

Mes ambitions futures, c’est d’abord de faire de mon entreprise une structure forte par ses capacités de production, de gestion, de financement, de communication et de commercialisation. En somme, construire une organisation solide pouvant servir de socle à mes projets et à ma vision de ce que le monde, ainsi que les hommes et les femmes qui y vivent doivent être. C’est ensuite, et vous l’avez certainement deviné, de permettre aux humains de pouvoir manger à leur faim. Il s’agit-là d’une grande vision qui va de l’Europe à l’Afrique. Et en cela, je ne compte pas me cloisonner dans le seul secteur de l’agroalimentaire. Je vais investir d’autres secteurs vitaux de la vie et de l’existence humaine pour donner un sens concret à ma créativité. C’est d’une manière générale un bref aperçu de ce qui m’anime. Les idées sont déjà là, les projets et les plans de formalisation existent aussi.

Pour finir, avez-vous des conseils à l’endroit de vos jeunes compatriotes béninois diplômés sans emplois au Bénin ?

Les jeunes doivent se convaincre de ce que l’État ne peut plus à lui seul offrir du travail. Il faut donc qu’ils cherchent ailleurs, qu’ils fassent surtout preuve d’imagination créatrice. D’ailleurs, l’État ne paie pas bien ses fonctionnaires qui, même après avoir occupé de très hautes fonctions dans la Fonction publique, végètent dans des situations déplorables à la retraite. Et ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas fait preuve d’hommes consciencieux dans les dépenses ou dans leur vie. Seulement et tout simplement parce que le salaire payé par l’État est minable. Donc, si on était intelligent, on ne chercherait pas à travailler pour l’État en tant que fonctionnaire si on tient à gagner un salaire à la hauteur de ses efforts, de ses peines et de son diplôme. Alors, je dis « imagination créatrice » parce qu’il existe d’énormes possibilités pour se mettre au service de son pays et rentabiliser enmême temps son intelligence. Il y a plein de domaines qui sont encore vierges et inexplorés ou inexploités et il suffit simplement de mettre en œuvre ses capacités créatrices pour surtout démontrer ce que l’on sait faire et non ce qu’on appris ou ce pour quoi on détient un diplôme. Et ce qu’on sait faire, il faut y mettre conviction, savoir-faire et passion. Pour conclure, je dirai: allez entreprendre et n’oubliez pas que la réussite d’un pays dépend de la santé de ses entrepreneurs.
Je vous remercie infiniment

Visiter le site des Cérégales (cliquer ici)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité