A l’Assemblée, Talon pèche par omission de la révision de la Constitution

Globalement bien apprécié de l’ensemble des députés, le discours sur l’état de la nation prononcé ce jeudi 22 décembre au parlement par le Président de la République a occulté la sulfureuse réforme de révision de la Constitution sur laquelle  beaucoup de parlementaires l’attendaient de pied ferme.

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C’est fait ! Arrivé au pouvoir en avril dernier, le Président Patrice Talon a honoré son premier grand oral à l’Assemblée nationale où il a prononcé son premier discours sur l’état de la nation à la tête de laquelle il est depuis 8 mois. « Assez concis, assez court, assez ramassé » est ce discours selon les termes de Valentin Djènontin, député Fcbe et ancien ministre du régime de Boni Yayi, le grand rival de l’actuel locataire de la Marina. Si à la vérité il faut reconnaître que c’est l’un des meilleurs discours du genre entendus par les Béninois pendant  ces dix dernières années, malgré toutes les flatteries qu’on entend et entendra à son propos, le Président Talon a volontairement omis d’évoquer un sujet de grande importance et qui lui tient à cœur : la révision de la Constitution. Pendant les 21 minutes de discours, Patrice Talon n’a à aucun moment évoqué ce dossier qu’il tenait à évacuer avant que l’an 2016 n’égrène ses jours.

Péché par omission

Depuis les campagnes électorales, dans son projet de société et à plusieurs reprises le Président Talon a martelé qu’il faut réviser la Constitution afin de passer à un mandat présidentiel unique au Bénin. « Je pense qu’il nous faut impérativement réformer notre modèle politique tel qu’il est issu de l’historique conférence nationale de février 1990…j’engagerai sous peu le processus de révision de notre constitution » avait-il annoncé dans son discours du 31 juillet, à la veille de célébration de la fête nationale ajoutant :« mais avant l’ultime étape de saisine du parlement, je compte recueillir par une consultation en forme référendaire, l’appréciation de l’ensemble du peuple béninois sur les choix que j’ai opérés ».

Que ce soit sur le fond ou sur la forme que prendra cette importante réforme, des divergences notoires font jour. Alors que certains jugent inopportune cette réforme, d’autres se demandent quelle sera la durée du mandat unique. Face à l’apparente résistance menaçant de faire capoter cette réforme, une commission politique du nom de Djogbénou, son ministre de la justice a été installée sans résultat pratique faute de consensus sur la question du mandat unique.

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A cela s’ajoute le projet de tenue d’un séminaire dont on ignore les tenants et aboutissants. La procédure de consultation populaire annoncée par le Président de la République est contestée. Les explications du professeur Théodore Holo, Président de la Cour constitutionnelle ne sont pas favorables à cette procédure dite de contournement des députés. « La mise en œuvre du référendum est soumise à une procédure qui paraît plus exigeante lorsqu’il s’agit de la Constitution et dont l’inobservance ne peut échapper à la censure » menace le Président Holo au détour d’un séminaire à Lokossa fin août. Sur ce, a rappelé le numéro1 des sept sages béninois,  « Tout projet ou proposition de révision de la Constitution pour être soumis au référendum doit au préalable être voté à la majorité des 3/4  membres de l’Assemblée nationale ». Depuis cette sortie, silence radio du côté du gouvernement. Un silence lourd que le Président Talon devrait rompre ce jeudi mais visiblement, l’homme qui a plus d’un tour dans son sac, maintiendra le flou autour de son ultime but.

Amadouer les députés

Ce qu’on qualifierait à tort d’oubli apparaît une stratégie qui ne dit pas son nom. Comme, il a commencé par le faire depuis peu, le Président Talon est dans la logique de faire l’âne pour avoir le foin. En lieu et place des explications sur cette réforme, il a consacré une bonne partie du discours à parler d’unité nationale, de synergie d’actions des institutions, de changement de mentalité. « Aucune main ne sera de trop face à la tâche qui nous attend, et je puis vous assurer qu’en conjuguant nos efforts pour l’intérêt général, nous parviendrons à faire de notre pays, un pays stable, un pays uni et de paix, un pays à économie prospère et de bien-être partagé » a-t-il mielleusement dit, lui qui se présente aussi comme le « poulain » des députés. Et quand on sait que l’enfer est pavé de bonnes intentions, vigilance doit être de mise pour ne pas se faire berner

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