Promotion des logements sociaux au Bénin: Un véritable serpent de mer (partie 1)

Depuis près d’une soixantaine d’années, les gouvernements successifs affichent la volonté de développer les logements sociaux. Des milliards sont engloutis avec des résultats mitigés.Le Programme de promotion de logements sociaux initié en 2009 par l’ancien Président Boni Yayi n’a pas comblé les attentes. Sur le terrain, c’est la grande désolation. A peine a-t-on atteint le 1/10 des 10.000 logements économiques…

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Site des logements sociaux à Fongba non loin de Lokossa (100 Km à l’ouest de Cotonou). Champ de désolation. Villas sans porte ni fenêtres, installations électriques et plomberie vandalisées. Site d’Agnivèdji, à quelques 500 m de la préfecture de Lokossa. Même spectacle. Bâtiments en ruine, murs lézardés et des toits au vent. Bien que l’eau et l’électricité soient disponibles, pas âme qui vive sur les lieux. Pas même un gardien dans les villas enchâssées, noyées sous de hautes herbes et abandonnées aux reptiles.

Etat des lieux

 

A Parakou (400 km au nord de Cotonou), dans une zone déjà viabilisée et habitée, le site des logements sociaux paraît un no man’s land. A peine achevées, des villas ont déjà leurs murs largement lézardés, tandis que d’autres sont bloquées à l’étape de la fondation. Le reste des matériaux de construction est abandonné aux intempéries. A Tanzoun dans la commune d’Avrankou, (50 km de Cotonou), quelques-unes des villas sont occupées. L’architecture de certaines d’entre elles a subi d’importantes modifications. La brigade de gendarmerie d’Atchoukpa occupe l’une des villas. Pourtant, le vol de matériaux relève du quotidien. Dans la commune de Calavi, à une dizaine de kilomètres de Cotonou, des sources proches de l’Agence de l’Habitat et du Foncier, confient que toutes les villas de Houèdo sont déjà vendues.

Des contentieux en vue

Parmi les villas déjà occupées, certaines ont subi d’importantes modifications architecturales souvent dues à des raisons sécuritaires. Antoine Hounkpè, après avoir acquis sa villa non loin de la préfecture de Lokossa, a dû élever les murs de la clôture « pour sécuriser sa maison », soutient son neveu présent sur lieux. Mais dans l’Ouémé et le Plateau, Constant Koudoro, Directeur départemental du cadre de vie confie que ces modifications ont créé des contentieux.

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Les villas achevées et non encore réceptionnées, celles toujours en chantier ou abandonnées devraient être sécurisées par les constructeurs. Mais cette clause du contrat n’est pas respectée : « le pillage des sites est favorisé, à mon sens, par la lâcheté au niveau de la sécurisation de ces logements. Dans les accords établis, ce sont les promoteurs immobiliers qui ont la charge de sécuriser les lieux jusqu’au moment les acquéreurs intègrent les villas puisque ces villas sont considérées comme étant sous leur protection sécuritaire. Il se fait que le système de gardiennage mis en place a montré ses limites. Les gardiens qui ont été mis là participent eux-mêmes à des actes de vandalismes parce que n’étant pas rémunéré pour le travail qu’ils font à temps », déplore, choqué, M. Orou Pibou, directeur départemental du cadre de vie de l’Alibori et du Borgou.

Une situation qui offre aux malfrats l’occasion de continuer à piller, sans être inquiétés, les gardiens des lieux étant souvent sans salaire. A lokossa, sur le site d’Agnivèdji, le gardien embauché depuis 2014 par le promoteur immobilier Agetip-Bénin, se plaint de n’avoir pas perçu de salaire depuis sept mois.

Un projet raté

C’est dans un souci de rationalisation et d’efficacité, que le gouvernement béninois a initié en 2009, le projet de construction de 10 000 logements, à réaliser par tranche, sur une durée de trois ans. Le site web de l’Agence foncière de l’habitat (Afh), bras opérationnel du gouvernement dans la mise en œuvre du projet indique l’objectif visé : « Faciliter l’accès à un logement décent et à moindre coût au plus grand nombre et par conséquent, contribuer à la réduction de la pauvreté ».

Dans sa première phase, le projet devrait permettre de réaliser 1000 logements à Cotonou, 500 à Porto-Novo, autant Parakou et 100 à Lokossa. Sur ce total de 2100 logements prévus, 1543 sont mis en chantier sur différents sites. Au 31 décembre 2011, 942 logements étaient entièrement achevés, habitables. Mais depuis, plus rien. Plus grave, les chiffres ne concordent pas avec les données exposées par le ministre du cadre de vie Didier José Tonato.

Interpellé par les députés, il souligne que ce sont 893 villas qui sont effectivement achevées. D’où la Direction générale de l’Agence foncière de l’habitat tire alors ses chiffres. Pour M. Gabin Aclombessi, directeur départemental du cadre de vie du Mono-Couffo, le projet a échoué à cause de « certaines personnes qui ont tôt fait de le politiser». A Avrankou, Parakou, Lokossa et Abomey-Calavi, la catastrophe est évidente. Le projet est un échec.

 Enquête réalisée dans le cadre du projet « Pour des médias plus professionnels au Bénin » de la Maison des Médias financé par OSIWA

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