Atelier de l’Abdc sur « La justice et les citoyens »: Pour une justice béninoise au service des justiciables

Joël Aïvo (Photo DR)

La salle de conférence du Centre de documentation et d’information juridique (Cdij), située dans l’enceinte de la Cour d’Appel de Cotonou, a servi de cadre le mardi 29 août dernier, au Workshop de l’Association béninoise de droit constitutionnel (Abdc).Il portait sur le thème : « La justice et les citoyens ». Ce workshop organisé en partenariat avec la fondation Hanns Seidel, vise à susciter un débat sur la perception de la justice par l’ensemble des différents corps professionnels, pour une justice au service des justiciables et débarrassée de toutes pesanteurs.

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La situation judiciaire au Bénin n’est guère reluisante. C’est du moins ce que l’on peut retenir du workshop (atelier), organisé par l’Association béninoise de droit constitutionnel (Abdc), en partenariat avec la fondation Hanns Seidel. Axé sur le thème : « La justice et les citoyens », cet atelier intervient dans un contexte où les béninois ont de moins en moins confiance en la justice de leur pays.

Le but de cette rencontre d’une part, est de présenter les voies d’accès à la justice, et les difficultésy afférant, et d’autre part susciter un débat sur la perception de la justice par l’ensemble des acteurs et non acteurs de la justice. L’atelier s’est déroulé en trois phases. Primo, la phase de la cérémonie d’ouverture. Deusio, celle de la présentation des communications. Tertio, la phase relative à la clôture dudit atelier. Le représentant régional Afrique de l’ouest de la fondation Hanns Seidel, Klaus Grütjen, n’a pas manqué de souligner la pertinence du thème dans ses propos introductifs.

Selon ses explications, le thème autour duquel s’est cristallisé les échanges, préoccupe toutes les sociétés du monde. Il estime que les violences observées çà et là dans les pays, sont dues en partie à une forte concentration du pouvoir dans les mains d’une même autorité.  Cette rencontre, poursuit-il, permettra aux acteurs de la justice de se remettre en cause. « Le fait de se remettre en cause permet à une société d’évoluer » a-t-il déclaré. Il a invité les uns et les autres à ne pas avoir peur du changement, car c’est de celui-ci (changement) que naît une société plus juste et paisible, avant de lancer ledit atelier.

Pour permettre aux différents participants de mieux appréhender le thème choisi, quatre communications ont été présentées. La première est relative aux constats de l’accès à la justice au Bénin. La deuxième porte sur la perception du magistrat, sur la question de savoir si la justice est au service du citoyen. La troisième est celle de l’avocat, puis la dernière est la perception du justiciable sur la même question.

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Première communication

S’agissant de la première communication, Mathilde Abalo, juriste à la Cour Constitutionnelle du Bénin, a fait savoir que l’accès à la justice au Bénin est une garantie réelle. Cependant, argue-t-elle, il y a certains facteurs qui font que cet accès n’est toujours pas effectif. A l’en croire, la question de la gratuité de cet accès et celle de la proximité des tribunaux en sont à la base. Elle estime qu’en dépit des efforts faits, il n’existe pas une aide étatique pour permettre aux citoyens de faire face aux frais de justice.

S’agissant de la proximité des tribunaux, la juriste a laissé entendre que les juridictions ne sont pas réparties de façon équitable sur le plan national. « Sur 28 tribunaux de première instance, seulement 14 sont fonctionnels. De plus, sur les 14, beaucoup sont concentrés dans les départements de l’Atlantique et du Littoral », s’est-elle désolée. Elle a fait observer qu’il y a eu aujourd’hui des avancées notables par rapport au droit à l’accès à la justice. Entres autres avancées : le nouveau code de procédure pénale qui donne aujourd’hui droit à la défense. La Cour Constitutionnelle peut sanctionner une décision d’une juridiction de droit commun s’il y a violation des droits de l’homme. Elle statut et censure les décisions de la Cour Suprême.

Deuxième communication

Ici, Michel Adjaka, président de l’Union des magistrats du Bénin (Unamab), n’a pas tari de mots pour faire remarquer que les tares du système judiciaire sont dans la constitution. Selon ses explications, la Constitution béninoise en son article 125, déclare que le président de la République assure l’indépendance de la justice. Alors que cette même constitution, affirme-t-il, déclare aussi la séparation des pouvoirs. Il a ainsi peint le tableau pour montrer combien ily a une forte politisation dans les décisions de justice.

« L’œuvre de justice est si délicate qu’il serait prétentieux de croire que la justice serait au service du citoyen », s’est-il fendu.

A l’en croire, la politisation est le premier ennemi de l’efficacité de la justice.

Troisième communication

Dans la troisième communication, Maître Cyrille Djikui, bâtonnier de l’ordre national des Avocats du Bénin, a fait observer que la justice n’est justice que lorsqu’elle est au service du citoyen.

« Au-delà des textes, est-ce que la justice est vraiment au service de la population ? », s’est interrogé le bâtonnier.

Il a fait observer que l’Etat doit pouvoir aider les citoyens qui n’en ont toujours pas les moyens (financiers), à accéder à la justice. Face à l’absence de l’aide juridictionnelle, témoigne-t-il, le barreau a mis en place un fond pour aller au secours des justiciables.

Quatrième communication

Plus amer que ses prédécesseurs, Ralmeg Gandaho, président de l’Ong Changement social-Bénin et représentant des justiciables, a, après avoir reconnu que la justice béninoise n’est pas au service du citoyen dans les faits, demandé aux avocats, huissiers et notaires, d’aller vers les populations pour leur expliquer ce qu’ils font. Parce que ces dernières sont très peu informées de leurs droits et devoirs, a mentionné le président de ladite Ong. Il estime que les préalables concernant l’accès à la justice du citoyen ne sont pas réunis. De ce fait, il sollicite une implication singulière et particulière des différents corps professionnels de la justice, pour que cet accès soit une réalité au Bénin.

Des solutions

Après la présentation desdites communications, ont suivi des débats. De ces débats fructueux, des solutions ont été trouvées pour que la justice béninoise soit réellement au service du citoyen. Ces solutions sont entre-autre : la réorganisation du Conseil supérieur de la magistrature, permettre à la justice à avoir une autonomie financière, renforcer la formation des magistrats, augmenter l’effectif des magistrats et des greffiers, rendre opérationnelle l’expression judiciaire. Le président de l’Association béninoise de droit constitutionnel, Joël AÏvo, a remercié les différents corps de droit pour avoir participé aux travaux, avant de faire remarquer qu’il y a certes des problèmes au niveau de la justice, mais que cela ne doit pas émousser l’ardeur des uns et des autres, afin de permettre au citoyen de toujours faire confiance à la justice

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