Notre patrimoine en question

Quatre questions pour éclairer une problématique. Où et comment conserver le patrimoine culturel et historique d’un peuple et qui est le plus habilité à le faire ?Ceux des nôtres qui vivent ou qui vont en Europe vous le diront : la plupart des regards qui se posent sur eux sont presque toujours chargés de la même et injurieuse injonction : »Va chez toi ! ». Première question : comment peut-on tant détester ses semblables et leur préférer des œuvres représentatives de leur patrimoine culturel et historique ? Ces œuvres, soit dit en passant, suite aux conquêtes coloniales, dorment depuis dans les musées de l’Occident.

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Un dignitaire français, il n’y a guère longtemps, a dit (citation) : « l’homme noir n’est pas rentré dans l’histoire. » Soit. Mais question : qu’on nous explique comment cet homme noir, par son génie créateur, a pu laisser des traces durables dans l’histoire, planter des bornes-repères solides dans le temps ? En portent témoignage à suffisance les musées de France et de Navarre.

Un autre dignitaire français, qui croit connaître les causes structurelles de la pauvreté de l’Afrique, trouve que les hommes africains se couchent trop souvent, entrainant leurs femmes à être en couches plus que de raison. Question : la pauvreté de l’Afrique ne tient-elle pas plutôt et davantage à la perte de ses repères identitaires ? Car, au cas où on l’ignorerait, l’ancien maître colon ne s’est pas contenté de chicoter les corps, il s’est surtout acharné sur les esprits, dépersonnalisant à tour de bras, dépouillant hommes et femmes de leur être profond.

Porto-Novo abrite le musée ethnographique Alexandre Adandé. Il fut un temps où cet établissement, qui porte pourtant le nom d’un illustre et valeureux dahoméen, ne pouvait instruire, vu son état, que le procès de chacun de nous. Criard notre laxisme, intolérable notre irresponsabilité en matière de conservation de notre propre patrimoine culturel et historique. Question : si nous-mêmes, sur place, montrions tant d’insuffisances et de défaillances vis-à-vis de notre héritage commun, que nous resterait-il de légitimité pour réclamer le retour au pays de nos œuvres dispersées aux quatre coins du monde ?

Ces quatre questions pour mettre en évidence et pour souligner l’extrême complexité du problème de la conservation du patrimoine. Saisissons-le en ses articulations essentielles.

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Au départ, ce sont des hommes de chair et de sang qui se sont rencontrés. Les uns sont venus de leurs contrées lointaines par l’appât du gain alléchés. Les autres, mis sous le joug des premiers, durent en subir la loi. « Vae victis » disent les Latins. « Malheur aux vaincus ». Exil sans retour pour des objets sacrés, des attributs royaux, des œuvres de beauté. Ils ont été réduits aux dimensions médiocres de simples trophées de guerre. Les vainqueurs en ont disposé à leur guise. Les vaincus n’ont plus eu que leurs yeux pour pleurer.

Mais les temps ont changé. Le colon d’hier cherche à se faire une virginité, s’efforçant d’effacer les traces honteuses d’un passé honni. Le colonisé d’hier a brisé ses chaînes. Il a accès aux grandes enceintes où se discutent les affaires du monde. Le colon et le colonisé d’hier, dans un contexte nouveau, se rencontrent, se parlent, échangent…Ensemble, ils peuvent lever bien des équivoques. Ensemble, ils peuvent aplanir bien des obstacles. A l’image et à l’exemple de la France et de l’Allemagne qu’un torrent de sang et de larmes avait tenu longtemps séparés. Aujourd’hui, les deux pays se donnent la main. Ensemble, ils construisent l’Europe.

Par rapport à quoi, quelques principes sont à affirmer aussi fortement que clairement.

1 – Ne parlons pas de guerre. C’est aussi inutile que futile. Le dialogue est à privilégier. Un accord intelligent est à trouver. Plutôt la force du droit que le droit de la force.

2 – Le droit du propriétaire légitime doit être reconnu et rétabli. Ce qui appartient à l’Afrique doit revenir à l’Afrique.  Un accident de l’histoire se corrige. Un tort se répare.

3- Il faut que se développe en Afrique et chez les Africains, une conscience aigue de conservation du patrimoine culturel et historique. C’est un devoir. Toute autre attitude est criminelle.

Au total, il faut rendre à César ce qui est à César pour nous obliger tous, sans exception, à rendre à Dieu ce qui lui est dû❒

Une réponse

  1. Avatar de Franco
    Franco

    Parlons de l’avenir. Maintenant ce sont nos sols qui les intéressent car le pétrole se fera rare dans quelques décennies…..

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