Par cette décision 17-262, la Cour ordonne la désignation des membres du Cos-Lépi par l’Assemblée nationale, au plus tard le 21 décembre 2017.Examinant les deux requêtes déposées par les sieurs Polycarpe Agboton en date du 14 septembre 2017, et Chabi Sika Abdel Kamar Ouassangari en date du 26 septembre 2017, aux fins de dénonciation de la non désignation par l’Assemblée nationale des membres du Cos-Lépi, la Cour constitutionnelle a rendu sa décision (lire ici) sur ces deux requêtes le 12 décembre 2017.
Une décision qui met à nue les cachoteries que le parlement avec à sa tête son chef, entretient avec le gouvernement.
La décision rendue par la Cour constitutionnelle au sujet des deux requêtes déposées par deux citoyens béninois, comprend 4 articles dont 3 concernent directement le Cos-Lépi :
- Article 1er.- L’Assemblée nationale doit procéder, au plus tard le 21 décembre 2017, à la désignation de ses représentants au sein du Cos-Lépi.
- Article 2.- Le Cos-Lépi doit être installé au plus tard le 29 décembre 2017 par la Cour constitutionnelle.
- Article 3.- La mission du Cos-Lépi prend impérativement fin le 30 juin 2018.
Les arguments des requérants
La Cour a rendu cette décision après examen d’une part des deux requêtes déposées les 14 et 26 septembre 2017, et d’autre part de la réponse produite par le président de l’Assemblée nationale sur les récriminations. Rappelons que les deux requêtes dénonçaient la non désignation par l’Assemblée nationale des membres du comité national de supervision (Cos), de la Lépi.
Lesrequérants ont fondé leur argumentaire sur les dispositions du code électoral. Ils ont dans leur requête indiqué que la loi a prévu la période d’activités du Cos, qui va de son installation le 1er juillet de chaque année, jusqu’au 31 janvier de l’année suivante. Ils ont expliqué que le code électoral a prévu la composition des membres du Cos : 5 députés désignés par la majorité parlementaire, 4 députés désignés par l’opposition parlementaire, le directeur de l’Insae et le directeur du service national en charge de l’état-civil.
Ilsont démontré que sur les 11 membres prévus, l’Assemblée doit en désigner 9, et arrivent à la conclusion que si ces membres ne sont pas encore installés depuis le 1er juillet 2017, c’est à cause de la non-désignation des 9 membres par le parlement. Les requérants demandaient donc à la Cour constitutionnelle de déclarer cette inaction du parlement contraire à la constitution.
Les explications du parlement
Répondant à ces deux requêtes déposées devant la Cour, le président de l’Assemblée nationale a produit des explications pour le moins curieuses. Le premier argument que chacun peut apprécier, porte sur ce qu’il appelle « les bouleversements » opérés dans la composition du parlement. « Or, au cours de ces derniers mois, l’Assemblée nationale a connu un bouleversement en ce qui concerne sa configuration politique. Cet état de choses n’a pas permis de statuer valablement sur certains dossiers dont celui de la désignation des neuf (09) représentants de l’Assemblée nationale au sein du Cos-Lépi ».
Al’évidence, il existe actuellement deux blocs parlementaires à l’Assemblée nationale. Le premier qui réunit environ 60 députés constitue le bloc de la majorité parlementaire, et le second bloc constitué de plus de 20 députés, dits de l’opposition parlementaire. Cette configuration du parlement existe ainsi avant juillet 2017. Le second argument du président de l’Assemblée nationale, a consisté à dire que la représentation nationale en sa séance du 24 septembre 2017, a désigné 9 membres sur les 18 qui composent la commission nationale de supervision du Ravip, qui explique-t-il, est un organe administratif au même titre que le Cos-Lépi. Il a aussi rappelé que le Ravipa a à sa tête, un membre du gouvernement nommé par décision du Conseil des ministres.
Ensomme, le président explique le choix du parlement à désigner ses représentants au sein de la commission nationale de supervision du Ravip, plutôt qu’ausein du Cos-Lépi pour ce qu’il nomme « l’approche d’opportunité » : « Au regard de tout ce qui précède, je voudrais réaffirmer que la démarche de la représentation nationale se justifie plus par une approche d’opportunité, qui devra permettre à terme d’améliorer le processus de recensement et d’identification de la population ».
Un argument discutable
On peut relever de ces explications du président de l’Assemblée nationale une grande curiosité. C’est incompréhensible que même s’il existe deux organes publics qui devraient gérer le fichier électoral, que ce soit l’organe qui a à sa tête l’un membre du gouvernement, qui remporte le choix du parlement. Le fichier électoral qui est un outil sensible et susceptible de polémique, devrait-il être géré par les membres du gouvernement alors que pour le cas du Cos Lépi, les membres sont élus en interne ?
Les clarifications de la Cour
Le prétexte avancé par le président de l’Assemblée nationale, selon lequel le Cos-Lépi et le Ravip remplissent les mêmes fonctions n’a pas convaincu la Cour. Elle est catégorique sur le fait que : « il ressort de ces dispositions que la Commission nationale de supervision et le Conseil d’orientation et de supervision de la Lépi, n’ont pas les mêmes missions ». La Cour est allée plus loin en levant l’équivoque sur des doutes semés dans les esprits depuis l’avènement du Ravip : « les données nominatives, personnelles et biométriques à produire au terme des opérations du recensement à vocation d’identification, dont la Commission nationale de supervision assure le suivi et la mise en œuvre, ne peuvent servir que pour l’établissement de la liste électorale permanente informatisée de 2021 ; qu’elles ne peuvent donc servir pour l’actualisation de la liste électorale permanente informatisée existante ; que dans ces conditions, l’installation de la Commission nationale de supervision du Ravip ne saurait faire échec à l’installation du Cos-Lépi, encore moins le remplacer ».
Uneprécision qui devra donc mettre un terme aux machinations entretenues entre le parlement et le gouvernement, qui par des arguties sophistiquées, entendaient violer allègrement la loi sur l’installation des membres du Cos-Lépi. Reste à espérer que l’Assemblée nationale n’ignorera pas elle aussi les décisions de la Cour constitutionnelle
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