Financement de la Planification familiale: L’approche inclusive souffre du manque de vision des maires

Face aux défis relatifs à la Planification familiale au Bénin, il est une obligation pour les municipalités de s’engager aux côtés de l’Etat central, pour financer et soutenir à la base des activités d’accès de leurs administrés aux produits de contraception. Ce qui nécessite le leadership et un changement de mentalité, notamment au niveau des maires qui doivent en faire une priorité. La Planification familiale (Pf) n’est plus seulement une question de santé, mais un enjeu de développement pour lequel les municipalités doivent jouer pleinement leur rôle.

Malheureusement, tel n’est pas encore le cas au Bénin. Les besoins non satisfaits en Pf à la base, vont de 20% dans la Donga jusqu’à 44% dans le Mono. Pour cause, les difficultés d’accès des femmes et jeunes aux produits contraceptifs, le financement de ces produits et des activités y afférentes, entre autres. Même si l’Etat central a pris de nouveaux engagements, notamment celui de consentir une augmentation de 10% chaque année jusqu’en 2020 du budget alloué à l’achat des produits contraceptifs, l’approche inclusive de mobilisation de ressources impliquant les collectivités territoriales décentralisées, est aujourd’hui un impératif. « Nous ne pouvons pas attendre forcément que ce soit toujours l’Etat central et les partenaires techniques et financiers qui assurent tout », défend Loukman Aziz Tidjini, champion de la Pf pour la zone Afrique de l’Ouest. Dans cette approche inclusive de mobilisation de ressources, il s’agit entre autres explique-t-il, d’amener les municipalités à prendre en compte les questions de santé dont la contraception, dans leur Plan de développement communal (Pdc) et leur budget. C’est aussi de la mobilisation de ressources humaines qu’il s’agit. « Dans les communes, il y a un certain nombre d’acteurs du secteur privé et des bénévoles qui sont capables de mettre des ressources à disposition pour le bien être de la communauté. Les mairies doivent aussi les mobiliser pour la cause de la Pf », ajoute le champion. Conscient de la réalité, le conseiller municipal et président de la commission affaire sociale et culturelle de la mairie de Comè, Innocent Kouassi Dossou, affirme : « Je pense que la première des choses, c’est de prendre l’engagement de créer une ligne budgétaire. ». Se basant sur l’exemple de pays comme le Sénégal, qui grâce à l’implication des municipalités ont réussi à booster leur taux de prévalence contraceptive, le Bénin expérimente actuellement le « The challenge initiative » à Bohicon et à Abomey, à en croire le chef service Pf, santé des adolescents et jeunes, à la Direction de la santé de la mère et de l’enfant (Dsme), Dr Gaston Ahounou.

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Pas sans la vision et le Leadership des maires

Ce qui bloque encore l’effectivité d’une telle approche, partout sur le territoire national, c’est le leadership, la volonté et la compréhension des acteurs au niveau local, soutient Loukman Aziz Tidjani. C’est un fait que confirme Bernard Kokou Tossou, 2e adjoint au maire de Savalou, une ville déjà engagée pour la Pf. « Le seul avantage que nous avons eu à Savalou par rapport à d’autres communes, c’est que nous avons commencé tôt. Et c’est le maire lui-même qui avait ce dossier, qui a même fait plusieurs missions dans ce sens et donc maitrise beaucoup mieux le dossier. Il en a fait une priorité et nous conseillers, l’accompagnons. Aujourd’hui, c’est rentré dans les habitudes » rapporte-t-il. « C’est aussi une question de vision », dira le conseiller Innocent Kouassi Dossou. « Il faut comprendre que tous les élus n’ont pas la même vision. Quand on parle de financer la santé de la communauté, d’autres pensent peut-être qu’il faut faire d’abord les lotissements » relève-t-il. Comprendre l’enjeu, amènera les élus locaux à, en dépit des difficultés de ressources dans les mairies, sacrifier certaines lignes pour mettre le financement de la santé dans leurs priorités.

De la malhonnêteté des cadres et conseillers

Une fois les ressources sont mobilisées pour la Pf, il restera une question cruciale à régler à entendre le conseiller Innocent Kouassi Dossou. « Notre communauté souffre de l’intelligence et de la pauvreté de nos cadres, parce que nous élaborons très bien nos projets et programmes ; on fait tout pour avoir les financements mais pour l’exécution, il y a toujours des problèmes parce que les cadres vont se servir d’abord avant de mener quelques activités sur le terrain », regrette-t-il. Parfois dénonce le champion Pf Loukman Tidjani, le peu de ressources est orienté vers l’achat de cadeaux et l’organisation de fêtes en fin d’année. « Nous devons changer de mentalité ; chacun doit être conscient par rapport ce qu’on lui confie », exhorte Innocent Kouassi Dossou. Et pour ce, il soutient que les mairies ne doivent pas se charger de la gestion directe des lignes budgétaires qui seront créées pour la Pf. Elles doivent selon lui nouer un partenariat avec des structures ayant des compétences en matière de santé de la reproduction sexuelle, et leur donner la main pour travailler et avoir les résultats escomptés. C’est une condition sine-qua-non pour le développement, selon le 2e adjoint au maire de Savalou. « Si vous voulez parler de développement, donc du recul de la pauvreté, cela doit passer par le planning familial nécessairement. Les dernières conclusions sur les taux de grossesse en milieu scolaire sont catastrophiques, et même quand vous rentrez dans les familles, dans le milieu des artisans, l’incompréhension de la population sur la nécessité du planning familial est effarante », alerte le conseiller ❒

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