Dictature de développement: Une curieuse recette censée conduire le Bénin à la prospérité

Evoqué sous le régime Yayi, le concept de dictature de développement semble faire recette sous le régime actuel. Sans le dire, ce système politique est appliqué de plus en plus par le gouvernement. Les partisans et défenseurs de l’instauration de ce système politique au Bénin le vantent surtout pour ses résultats. Ils le présentent comme le mode de gouvernance capable de conduire le pays sur la voie du développement.

C’est un député membre du bloc de la majorité parlementaire qui avait parlé de ce système politique au cours d’une journée de réflexion politique organisée par une organisation de la société civile. Le député en question avait au cours de ses réflexions, rapporté que quelqu’un de sérieux, ancien homme d’Etat lui avait fait la remarque que la démocratie ne peut permettre au Bénin de connaitre la prospérité. Puisque ce système politique libertaire, qu’est la démocratie, transforme presque la République en anarchie où chacun agit selon son bon-vouloir.

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C’est en quelque sorte cet état de licence dont parlait John Locke où, par nature chacun agit comme il veut. Le député arrive donc à la conclusion que pour un pays comme le Bénin où tout est à faire, c’est un régime fort qui est indiqué. Un régime qui restreint les libertés des citoyens, un régime qui instaure le dirigisme dans lequel le gouvernement n’est pas obligé de requérir l’avis des populations avant de poser des actes qui les concernent.

C’est ce régime, soutient-on souvent qui a permis à l’Allemagne d’Adolph Hitler  d’avoir une position de domination sur le reste de l’Europe. Au point où jusqu’aujourd’hui l’Allemagne demeure la 1ère puissance européenne. Les partisans de cette forme de gouvernance présente aussi des pays africains comme le Ghana ou encore le Rwanda où les dirigeants ont pu opérer des transformations d’envergure de leurs pays,grâce à la dictature de développement encore appelé dirigisme éclairé. C’est donc le mode de gouvernance qu’il faut adopter au Bénin conclut-il. Et apparemment, sans l’annoncer, quelques indices amènent à se demander si ce système politique n’est déjà pas déjà appliqué par le gouvernement actuel.

Lorsque le chef de l’Etat demande aux députés de voter des lois les yeux fermés, on peut comprendre par là qu’il semble dire que les attitudes démocratiques marquées par des débats sont improductives. Il a aussi demandé aux responsables syndicaux de ne plus s’opposer aux réformes comme pour dire que cette opposition aux réformes constitue un obstacle à la vision de développement qu’il a pour le pays. En somme, la façon dont l’opération de la libération de la voie publique a été menée avec une main de fer, démontre que la dictature de développement est en marche. Le vote des lois au parlement qui suppriment les grèves à certains agents de l’Etat, participe lui aussi de l’ambition d’annihiler l’esprit de contestation pour la remplacer par la culture de la soumission. Reste seulement à savoir si le Bénin qui a traversé 17 ans de régime autoritaire avec les séquelles psychologiques enregistrées, est encore prêt à embarquer dans un système politique qui ramènera ce passé douloureux.

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C’est pour dire non au régime totalitaire que le Bénin a été le 1er pays africain francophone à renouer à la démocratie. A l’expérience, il existe des pays africains qui ne sont démocratiques que de nom et qui vivent sous encore sous le joug de la dictature. Nombre de ces pays ne connaissent malheureusement pas une embellie économique. Au contraire, les richesses de ces pays, fruit du labeur des populations profitent seulement à la classe dirigeante qui garde le peuple dans une situation de misère à pleurer. Toute chose qui fait dire que la dictature de développement ou dictature éclairée ne peut pas être une panacée que l’on peut prescrire à tout pays qui veut passer du sous-développement à la croissance économique.

5 réponses

  1. Avatar de GbetoMagnon
    GbetoMagnon

    « ce système politique libertaire, qu’est la démocratie…anarchie » Là tu dis, le type n’a pas pris la peine d’aller lire le dico.

    « gouvernement…pas obligé de..l’avis des populations avant de poser des actes qui les concernent. »
    Là tu comprends qu’il est à l’Ouest

    « …ce régime…qui a permis à l’Allemagne d’Adolph Hitler d’avoir une position…Au point où…l’Allemagne…1ère puissance européenne » Et in fine tu comprends qu’il a attrapé quelques mots qu’il a retenu et que tout ça a fini en compote dans sa tête.

    l’allemagne 1ère puissance européenne grâce au nazisme. Il n’a pas vu beaucoup de photos de l’Allemagne au sortir de la guerre

    1. Avatar de Napoléon1
      Napoléon1

      @ GbetoMagnon,

      vous avez tout dit, je n’y ajouterai plus rien.

      « L’Allemagne 1 ère puissance européenne grâce au nazisme ». Clui-lá, ne serait-il pas un déréglé Psyche. Sait-il de quoi il parle?

  2. Avatar de Chat
    Chat

    Allomann
    J’ai lu avec attention le papier de Simplice Asongu qui est une bouillie qu’on nous sert qui nous inciterait encore et encore et toujours choisir entre 2 alternatives comme si nous ne sommes pas capables de trouver notre propre chemin; comme si nous ne saurons jamais inventer notre mode de gouvernance.

    C’est toujours la même rhétorique stéréotypée qu’on nous sert. c’est dommage.

    Pourquoi ne donne pas plus de tribune à Felivine Sarr que tu connais sans doute ?

  3. Avatar de ALLOMANN
    ALLOMANN

    Pour alimenter les débats sur ce thème:

    La démocratie libérale en Afrique peut attendre
    La rédaction
    Les décisionnaires de l’Afrique comprennent qu’un leadership économique et politique fort est essentiel à la croissance et à la stabilité. Pendant des années, les économies africaines ont eu de meilleurs résultats que prévu, suite à leur engagement à améliorer leur gouvernance. La question est à présent de savoir comment encourager ce dynamisme.
    Les stratégies actuelles ne fournissent pas de réponse proportionnée. Bien que les dirigeants à une récente Conférence économique africaine à Addis-Abeba (Éthiopie), se soient engagés à maintenir les réformes de gouvernance en tête de de l’ordre du jour de l’Afrique, ils n’ont proposé aucun plan directeur. De mon point de vue, ce vide présente une occasion de considérer de nouveaux paradigmes de gouvernance, notamment ceux qui s’inspirent de deux modèles généralement discutés : le « consensus de Washington » et le « modèle de Pékin. »
    Les praticiens du développement ont longtemps débattu de la question du modèle censé proposer le meilleur cadre pour la réforme. En termes simples, le terme « gouvernance » se rapporte à un cadre dynamique de règles, de structures et de processus qui aident un gouvernement à contrôler ses affaires économiques, politiques et administratives.
    Mais les principes sur lesquels se concentre un gouvernement varient selon l’approche. Le modèle promu par l’Occident attache une grande importance aux droits de l’homme et à la démocratie, alors que celui préconisé par la Chine se soucie plutôt de la stabilité politique et de la croissance économique.
    Depuis l’élection du Président Donald Trump, les États-Unis, qui restent l’un des principaux donateurs de l’Afrique, se concentrent davantage sur les principes préférés par la Chine – à savoir la stabilité politique, le commerce et l’anti-terrorisme – plutôt que sur les droits de l’homme. Le raisonnement est que le modèle de Pékin est meilleur pour l’Afrique à court et à moyen terme. Bien qu’il ne soit pas très populaire de l’admettre, Trump a raison.
    Pour le dire simplement, la nourriture, le logement, la santé et de bonnes installations sanitaires sont plus pertinentes pour la plupart des Africains que le droit de vote. En outre, seule une population modérément riche, avec une classe moyenne saine, peut exiger adéquatement les droits consacrés par la démocratie. Paradoxalement, le meilleur moyen de construire une forte classe moyenne en Afrique consisterait à se rapprocher de la hiérarchie des principes que promeut le modèle chinois.
    Pour que l’Afrique réoriente son approche de la gouvernance et pour qu’elle adopte un consensus qui succède à celui de Washington, ses dirigeants doivent s’engager à améliorer l’efficacité des institutions et la gestion économique.
    Le premier train de réformes doit inclure l’établissement de lignes claires de souveraineté avec les partenaires internationaux. La relation de l’Afrique avec des donateurs occidentaux, par exemple, place historiquement les droits individuels au-dessus des droits nationaux. Mais de mon point de vue, les droits individuels ne doivent pas supplanter les droits souverains. Punir des pays entiers pour des lois qui affectent une minorité est contre-productif.
    Un exemple d’une telle punition collective s’est produit en Ouganda en 2014, quand la Banque mondiale a gelé près de 90 millions de dollars de prêts suite à l’établissement par le gouvernement d’une législation criminalisant l’homosexualité. Comme l’a déclaré alors un porte-parole du gouvernement ougandais, la Banque « ne doit pas faire du chantage à ses membres » pour qu’ils adoptent des valeurs occidentales. Pourtant, quand on juge des modèles de gouvernance seulement à l’aune du consensus de Washington, il y a très peu de choix possibles.
    Dans le même ordre d’idées, le deuxième train de réformes concerne le fait de donner la priorité aux droits économiques par rapport aux droits politiques. Par exemple, les politiciens qui contrôlent bien une économie ne devraient pas faire l’objet d’une limitation du nombre de leurs mandats. Ni Singapour ni la Chine ne sont des démocraties ; mais les dirigeants dans ces deux pays ont utilisé leur pouvoir politique pour améliorer les niveaux de vie. Forcer des dirigeants à se retirer au milieu de réformes économiques semble contre-productif.
    Ces idées ne sont pas farfelues. Actuellement, les dirigeants du Rwanda, un pays qui est largement considéré un exemple de réussite en Afrique, ont amélioré la stabilité en se distanciant de l’approche de consensus de Washington pour leur gouvernance.
    Sur le plan politique, le Rwanda est fort, discipliné et organisé, mais il n’est pas libéral. La victoire écrasante à la réélection du Président Paul Kagame l’an dernier a été davantage une affaire de pouvoir que de démocratie. Bien que Kagame reste populaire, on a reproché à son gouvernement d’avoir réprimé la liberté d’expression et les droits de l’homme à l’approche des élections. La conclusion que j’en tire n’est pas que les droits de l’homme n’ont pas d’importance, mais que la discipline politique et les formes imparfaites de démocratie sont acceptables si le compromis est un progrès durable en matière de gouvernance économique et institutionnelle.
    Nous devons être intellectuellement honnêtes et appeler un chat un chat. Les Rwandais ne doivent pas avoir honte d’accorder de la valeur à la force économique et administrative plutôt qu’à des élections libres et justes. Ainsi la question pour d’autres États africains qui cherchent à reformer leur modèle de gouvernance est de savoir à quel point il faut imiter l’approche du Rwanda.
    Ni le consensus de Washington, ni le modèle de Pékin ne fournissent toutes les réponses. Mais comme l’a démontré le Rwanda, si la discipline et le fort leadership améliorent les niveaux de vie et œuvrent pour le bien commun, peut-être que la démocratie libérale est une priorité à long terme.
    Simplice A. Asongu, économiste en chef du Département de recherches de l’Institut africain de gouvernance et de développement.

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