Au Bénin, l’information a été donnée hier jeudi 15 mars 2018 au cours de la conférence de presse animée par le président de l’autorité nationale de lutte contre la corruption, Anlc, Jean Baptiste Elias, dans la salle de conférence de son siège à l’immeuble Dina au quartier Maro-militaire. Face aux micros et caméras des journalistes, Jean-Baptiste Elias a expliqué comment 328 millions de Fca auraient pu être détournés au ministère du cadre de vie par le truchement d’une commande d’achat de 84 motos cross. Une révélation qui coïncide avec l’engagement et la détermination du chef de l’Etat à lutter contre la corruption.
Dans le cadre du projet de gestion des forêts au ministère du cadre de vie et du développement durable, il a été a décidé de l’acquisition de 84 motos de marque Honda XL 125 Lek. Pour ce faire, le ministère du cadre de vie a lancé à travers la personne responsable des marchés publics, un appel d’offres qui selon le président de l’Anlc, a été confié à un seul organe de presse : le journal le « Potentiel » pour large diffusion. A la suite de cet appel d’offre, trois entreprises ont soumissionné : Atlantique motors, Global motors et Les Bagnoles motors. La commission de passation des marchés publics de ce ministère, après dépouillement et étude des offres, a retenu l’entreprise Les Bagnoles motors.
A la date du 14 décembre 2017 selon le président de l’Anlc, la personne responsable des marchés publics et le responsable de Les Bagnoles motors, ont procédé à la signature de contrat d’achat et de livraison de 84 motos cross de marque Honda XL 125 LEK, et des lots de pièces de rechange pour chaque moto composés comme suit : pignon avant, pignon arrière, chaine, jeux de patins de frein avant et patins arrière, câble d’embrayage, pneu avant, pneu arrière, chambre à air avant, chambre à air arrière, paire de gangs, antivol, bougie d’allumage, filtre à air, main d’embrayage.
Selon les termes de ce contrat rapporté par l’Anlc, l’entreprise Les Bagnoles motors s’engageait à livrer au ministère du cadre de vie les 84 motos, à raison de 5.142.121 FCFA la moto, soit une somme totale de 431.938.164 FCFA pour les 84 motos. Les Bagnoles motors s’engageaient aussi à livrer des lots de pièces de rechange pour chaque moto, à raison de 664465 FCFA soit 55.815.060 FCFA pour les lots de pièces de rechange des 84 motos. L’autorité de lutte contre la corruption ayant été saisie à propos de ce contrat, elle a bien voulu en savoir davantage. Selon Jean-Baptiste Elias, l’Anlc a engagé ses investigations pour démêler l’écheveau sur ce que les dénonciateurs dudit contrat qualifiaient de surfacturation.
L’Anlc a donc contacté le représentant de la marque Honda au Bénin, c’est-à-dire ATC Beko, à travers une correspondance aux fins de savoir combien coûte une moto de marque Honda XL 125 LEK, et à combien pourrait revenir l’unité dans le cadre d’une commande groupée de 84 motos. ATC Béko a répondu à l’ANLC que cette marque de moto n’est pas produite par leur entreprise mère au Japon. Elle est plutôt fabriquée par la filiale de Honda en chine, et réservée exclusivement au marché intérieur chinois. Que les motos vendues par ATC Béko sont plutôt de forme améliorée à celle vendue en Chine. Et que les motos dans leur boutique sont vendues à 1.475.000f l’unité ou 1.375.000f dans le cadre d’une commande groupée de 84 motos. Ces informations d’ATC Béko ont permis de remarquer une différence de près de 4.000.000f par moto, avec les prix proposés par Les Bagnoles motors. L’Anlc saisit le ministre du cadre de vie, celui des finances et l’Armp. Le ministre des finances écrit à son collègue du ministère du cadre de vie et du développement durable. Il lui demande de tenir compte des investigations de l’Anlc et de ses recommandations. Le ministre des finances saisit à son tour l’Autorité de régulation des marchés publics, Armp. L’Armp déclare son incompétence à annuler ce marché, mais opte d’infliger des sanctions administratives au responsable des marchés publics du ministère du cadre de vie, soit un an d’incapacité à siéger dans une commission de passation de marché public. Et six mois d’interdiction des membres de la commission de passation des marchés, en attendant les sanctions pénales éventuelles. Entre temps rapporte l’Anlc, le ministre du cadre de vie qui a été saisi depuis janvier 2018 n’a jamais répondu à la correspondance de l’Anlc. Le plus curieux encore, c’est que le même ministre a par trois fois écrit au ministère des finances pour lui demander l’envoie des agents de ce ministère pour assister à la réception des 84 motos et pièces de rechanges. Chose que le ministère a toujours décliné.
L’Anlc s’étonne aussi de la célérité avec laquelle ce contrat a reçu toutes les signatures en l’espaces d’une semaine : le 14 décembre 2017, la personne responsable des marchés publics du ministère du cadre de vie et Les Bagnoles motors ; le ministre du cadre de vie le 19 décembre 2017, le contrôleur des finances de ce ministère le 20 décembre 2017, et le ministre des finances le 21 décembre 2017. C’est donc au total 328 millions de surfacturation qui étaient en voie d’être faits à travers ce marché d’achat de motos. Au moment où le président Talon parle de lutte indiscriminée contre la corruption, voici une seconde affaire après celle du concours à polémique de la Cnss en 2017 classée sans suite par le gouvernement, qui attestera de sa bonne foi… On ne perd rien à attendre
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