Les concepts de « rupture » et de « nouveau départ » associés à la gouvernance du Président Patrice Talon étaient assimilés à la démarcation avec les travers du passé et à l’avènement d’une approche rationnelle et vertueuse de gestion des affaires publiques. Beaucoup y voyaient transparence et austérité dans la gestion des ressources publiques. La culture de l’opacité et de l’énigme est devenue une des caractéristiques du gouvernement du nouveau départ.
La récente décision de la Cour constitutionnelle au sujet du refus du gouvernement de communiquer les éléments du décret sur les salaires des ministres sonne comme une confirmation de l’attachement morbide de ce régime à l’opacité. On ne peut pas comprendre que le gouvernement selon la décision de la Cour constitutionnelle, se refuse de communiquer à la plus haute juridiction des éléments qui doivent permettre à cette institution judiciaire de se prononcer sur une saisine.
Un cas d’obstruction à la justice à la justice aurait-on pu conclure si les auteurs dudit forfait avaient été des citoyens ordinaires. Cela ne devrait pas étonner puisque la rigueur et la rationalisation dans la dépense publique n’ont jamais été au rendez-vous. Pour bien comprendre tout cela, faisons un peu d’histoire. Le 06 mai 2016, soit seulement un mois après sa prise de fonctions, le chef de l’Etat installe au cours d’une cérémonie solennelle au Palais de la Marina, la commission chargée d’étudier les réformes institutionnelles et politiques. Quelques semaines après, l’opinion apprend par voie de presse que 500 millions de F Cfa ont été distribués aux 33 membres qui composaient cette commission.
Le ministre de la justice, président de ladite commission acceptera plus tard après que le gouvernement a observé le silence sur cette dépense que ce montant a été effectivement dépensé pour désintéresser les membres de cette commission. Une somme que l’opinion avait jugée exorbitante pour un gouvernement qui clamait l’austérité et la rationalisation des dépenses publiques.
En juillet 2017, à travers une correspondance adressée au ministre des finances, publiée par certains organes de presse, à ce dernier de mettre fin à la pratique de gré à gré qui a été érigée en norme dans l’attribution des marchés publics dans l’administration. Mais l’opinion s’était bien avant posé des questions sur de nombreux marchés attribués aux entreprises en conseil des ministres sans que l’on ne comprenne la procédure de passation de ces marchés.
Des contrats ont même aussi été signés entre le gouvernement et des structures privées, sans que le gouvernement ait jugé utile de porter à l’attention de l’opinion la teneur des clauses. Jusqu’à ce jour nul ne maîtrise le contenu du contrat qui a été signé entre la société Bénin control et le gouvernement béninois pour la reprise des activités du Pvi. C’est le même mystère qui entoure les contrats de cession des hôpitaux aux privés, du port de Cotonou et même de l’aéroport international de Cotonou. Sur presque tous les dossiers, c’est la loi de l’omerta qui règne. C’est aussi cela la rupture et le nouveau départ.
Dans un tel contexte, inutile de vouloir retrouver le décret qui fixe les salaires des ministres et assimilés. Surtout que les décrets qui fixent les salaires des collaborateurs des ministres, des préfets et leurs collaborateurs ont été rendus publics par des médias. Et c’est sûr que la vague de réactions d’indignation que les montants de ces salaires ont suscitées, étaient de nature à conforter les décideurs à renforcer le secret sur ces salaires des ministres.
Un fait d’une grande curiosité, puisque tous les pays qui promeuvent la transparence ne calculent pas pour rendre publics les salaires des membres du gouvernement, des autres pouvoirs et institutions. C’est le cas au Burkina Faso où tous les citoyens savent que le chef de l’Etat perçoit 2.5 millions de F Cfa, les députés moins et les magistrats 2.850.0000 F Cfa. C’est étonnant qu’un régime qui déclare faire de la lutte contre la corruption, le combat de tous les instants, soit lui-même réfractaire à rendre publiques les décisions qu’il prend sur la dépense publique. C’est peut-être de la rupture avec la transparence et un nouveau départ dans l’opacité
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