Les faits divers, miroir de notre société

Les faits d’actualité barrent la « Une » de nos journaux. Les journalistes savent les articuler en des titres accrocheurs et en des caractères marqués. Les faits divers quant à eux sont relégués à l’arrière-plan. Ils sont à la périphérie de l’essentiel. Lumière sur les faits d’actualité. Ombre sur les faits divers.

Trump, dans une énième déclaration jupitérienne, fait trembler le monde. Un chef d’Etat africain abat ses cartes. Il veut jouer les prolongations au pouvoir. La Cour pénale internationale (CPI) juge et se déjuge. A grand renfort d’arguments aussi savants qu’obscurs. La légendaire rivalité entre Ronaldo du Real Madrid et Messi de Barcelone, en cette saison chaude de coupe du monde, déchaîne des passions et fait monter les enchères. Partout, le terrorisme frappe. La guerre économique divise les alliés d’hier. La guerre des migrants prend la figure d’un bateau-cimetière en errance sur les océans.

Publicité

Ainsi défilent, chaque jour, sous nos yeux, les faits d’actualité qui rythment la marche du monde. Des faits d’actualité si bruyants et si brillants qu’ils éclipsent les faits dits divers. Des faits à la périphérie de nos journaux. Des reliquats d’informations expédiés, dans nos rédactions, à la rubrique dite des « chiens écrasés ». Aux bons soins de journalistes débutants au seuil d’une carrière. Les faits divers seraient ainsi de l’ordre du dérisoire et de l’accessoire. C’est l’à-côté de l’information.

Inscrivons-nous en faux contre cette vision étriquée des choses. On a beau reléguer les faits divers dans les catacombes de nos médias, ils ne sont pas et ne restent pas moins le miroir de nos sociétés. Avec eux, nous pouvons sonder l’âme de notre peuple. Grâce à eux, nous pouvons connaître la température de notre société. Par eux, nous pouvons sentir battre le cœur collectif de notre pays.

Un directeur d’école, père de famille de son état, à l’heure de la récréation, est soudainement pris d’un désir irrépressible. Il convoque dans son bureau une écolière de 10 ans. La gamine, sauvagement déflorée, est laissée pour morte, dans une mare de sang.

Une jeune fille est enceinte des œuvres de son papa par ailleurs chef religieux et responsable politique. Pour effacer la laideur de l’acte posé et pour masquer le scandale qui pointe à l’horizon, ce père indigne fait flèche de tout bois. Recours aux féticheurs de tout poil. Prise de risque maximale avec des anges noirs agissant depuis des cliniques clandestines d’avortement. Un pseudo père est recherché. Contre une forte récompense.

Publicité

Un cybercriminel, estampillé à la béninoise « gayman », met un point d’honneur à hypnotiser ses victimes, avant de les soulager de tous leurs biens. Pour mener une telle entreprise, il dispose de puissants moyens occultes. Le voyou travaille en réseau avec un groupe de criminels qui lui fournit du sang humain. C’est, dit-on, le carburant dont auraient besoin les forces obscures à l’œuvre. Nombre de concitoyens ont payé de leur vie les folles lubies de ces malfaiteurs.

Voilà quelques échantillons de faits divers. La rubrique « Wa sé ho » sur CAPP FM, pilotée de mains de maître par Thomas Hèmadjè, en offre, chaque semaine, à nos auditeurs qui en redemandent. Trois raisons militent en faveur de la réhabilitation et du repositionnement des faits divers dans nos médias.

1- Les faits divers comme un miroir social. En ce qu’ils nous renvoient l’image de nous-mêmes. Nous ne sommes ni anges ni bêtes. Nous sommes des êtres de chair et de sang, plongés dans l’aventure de la vie, ballotés entre vices et vertus, nous assumant comme tels sur l’échelle universelle de l’humaine condition. Les faits divers, c’est presque toujours le point de départ d’une enquête, d’un travail d’investigation journalistique. Pour mieux faire savoir et faire comprendre.

2- Les faits divers comme un révélateur. Au sens de ce qui dévoile quelque chose, ou constitue un indice, un signe. L’acte ignoble du directeur d’école, pédophile doublé de violeur, instruit le procès de notre système éducatif. Le nombre croissant de jeunes élèves mères est un indice éloquent. L’alerte est forte. Nettoyons au plus vite les écuries d’Augias.

3 – Les faits divers comme un tocsin interpellateur. Au sens où ils aident à mettre la plume dans la plaie. Les faits divers nous indiquent où nous avons mal. Les faits divers indiquent également les chemins de la guérison. Après ce qui vient d’être dit, avons-nous encore des réserves sur les faits divers ? En tout cas, pas nous.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité