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(ENQUETE) Lalo : l’eau potable, une denrée rare

Le monde entier a célébré, ce lundi 22 mars 2021, la journée internationale de l’eau. L’accès à cette source de vie reste encore une préoccupation dans certaines contrées au Bénin notamment dans la commune de Lalo dans le département du Couffo. Ici, les populations s’en sortent difficilement avec l’eau du fleuve Couffo.

Ahomadégbé est l’un des arrondissements de la commune de Lalo. Le Plan de développement communal, quinquennat 2017-2021, a fait une projection de 6038 habitants dans cet arrondissement. Ce vendredi 19 mars 2021, au niveau du seul puits artésien de ce village central de l’arrondissement, l’eau coule à même le sol. Et les enfants essaient de la recueillir dans des bidons de 20 litres. A côté, des femmes font la lessive (voir d’illustration de l’article). Selon Jean-Claude Nongbété, suppléant du chef d’arrondissement de Ahomadégbé, ce puits date de 1964. Et depuis plus de cinq ans, il n’est plus fonctionnel. Les canalisations sont tombées en ruine.Il renseigne que les canalisations installées pour le puits artésien de Ahomadégbé sont rouées. De sorte qu’il y a des fuites d’eau. Ce qui fait que la pression n’est plus assez forte pour faire monter l’eau. Il informe que deux projets ont tenté de réparer mais sans y arriver.

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Actuellement les femmes et les enfants vont dans le village Hagnonhoué, situé à trois kilomètres pour chercher de l’eau potable. Prisca, jeune dame vendeuse de nourriture rencontré à Ahodjinnako ne cache pas sa désolation : «nous souffrons trop par ici pour avoir de l’eau potable ». Elle explique que les femmes des villages comme Lokoli continuent d’aller chercher de l’eau dans le fleuve Couffo pour leur usage quotidien. Didier Akakpo confie :«nous avons de l’eau mais ce n’est de bonne qualité. Quand on consomme, on a la diarrhée. L’eau est salée et n’est pas agréable à consommer. C’est l’eau d’un forage et c’est encore difficile de l’avoir ». Il explique qu’il faut passer assez de temps avant d’avoir l’eau puisque c’est le seul forage qui dessert le village. Il relève que quand ils font la lessive avec cette eau, ça ne mousse pas. Mais, «on n’a pas le choix ».

Du taux de couverture de la commune 

La situation de l’accès à l’eau potable dans la commune de Lalo est bien un contraste à bien des égards. La nappe souterraine est pourvue en eau. Dans le Plan de développement de la commune (2017-2021), le taux de couverture global est de 65, 90 %. Mais, la situation est bien préoccupante au niveau  des arrondissements qui présentent un taux de desserte en eau potable bien bas. C’est le cas des arrondissements de Lokogba 17,57%, Ahodjinnako (26,17 %), Zalli (26,17 %) et Lalo centre (34,39 %). Selon le responsable service Eau et assainissement de la mairie, Habib Dikpè, la répartition des ouvrages d’approvisionnement en eau se fait par village et par localité. Il explique que selon la stratégie nationale qui gouverne le secteur, pour réaliser un forage pompe à motricité humaine, il faut le faire là où il y a au moins 250 habitants.

Pour réaliser un ouvrage Borne Fonden, afin de faire une extension, il faut au moins 500 habitants. A part le forage pompe à motricité humaine, la commune de Lalo dispose des Adductions d’eau villageoise qui couvrent certains villages dans certains arrondissements. Des localités comme Lokoli, Hêhoukpa, Govèta, Sawanou et Bayêkpa sont presque totalement dépourvues en ouvrages d’assainissement. Le responsable  service Eau assainissement précise que certaines de ces localités situées sur la terre noire comme les autres localités de la commune ont bénéficié des ouvrages mais à cause de la mauvaise gestion, ces ouvrages sont tombés en panne. Ces ouvrages ont besoin de grosses réparations. La commune doit les réhabiliter. 

Système de gestion

A Lalo, avant l’avènement de la décentralisation, c’était une gestion communautaire qui se faisait. Donc, après la réalisation de l’ouvrage, c’est la communauté elle-même qui s’organise pour gérer. La communauté ouvre un compte à la CLCAM qui est un compte Eau et santé. Et quand, elle vend l’eau, elle va verser les fonds dans le compte. Mais pour décaisser, il faut un processus. Alors, quand l’ouvrage tombe en panne, la communauté fait appel à un artisan à main de le réparer. Ce dernier fait un devis que la communauté envoie à la mairie. La mairie étudie et analyse le devis avant de l’envoyer au service de l’eau du Couffo. C’est ce service qui après étude, donne son aval. Le maire envoie, ensuite, à la CLCAM une lettre de décaissement. C’est alors que les fonds sont décaissés pour réparer l’ouvrage en question. Il s’est fait qu’au niveau de certaines communautés, l’argent de réparation dépasse les fonds en caisse. Donc, la mauvaise gestion a régné en maître, beaucoup de forages à motricité humaine sont tombés en panne et abandonnés. 

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Après, la stratégie qui gouverne le secteur au plan national a mis un terme à cette forme de gestion. Cette stratégie a défini le rôle de chaque acteur dans la gestion des ouvrages d’approvisionnement en eau potable. Ce qui a débouché sur une gestion professionnelle des ouvrages.Et désormais, c’est une délégation. Après la réalisation de l’ouvrage, la communauté elle-même identifie un individu qui signe un contrat de délégation avec la mairie. Il paie une redevance à la mairie. Le contrat est d’un an renouvelable et la redevance varie de 30 à 100 mille FCFA par an pour les forages. C’est lui qui assure la maintenance et les petites réparations. En cas de grosses pannes, c’est la mairie qui vient à la rescousse.

«C’est vrai, nous avons un problème de lenteur administrative qui tarde les réparations. Car, même si un délégataire gère bien, en cas de grosse panne, la réparation n’est pas systématique à cause de la procédure de décaissement des fonds. Ce qui laisse les populations sans eau potable pendant un à trois mois », clarifie le responsable service Eau et assainissement de la mairie. Au niveau des Adductions d’Eau Villageoises(AEV), c’est l’affermage. La gestion d’un AEV est confiée à un fermier qui est une entreprise qui gère et rend compte à la mairie. Il paie la redevance par rapport à la quantité d’eau produite dans le mois. La redevance est de 120 FCFA par mètre cube d’eau produit. Habib Dikpè soutient qu’au niveau des AEV, il y a très peu de problèmes de gestion. C’est au niveau des forages qu’il y a assez de problèmes. 

Des efforts en cours

Depuis quelques années, la mairie s’est dotée d’une politique de réhabilitation des forages à motricité humaine abandonnés. Et chaque année, un budget est affecté à la réhabilitation de ces ouvrages. Cette année 2021, la commune a démarré la réparation et la réhabilitation de 21 forages de pompes à motricité humaine. La commune a budgétisé 10 millions pour la réhabilitation de certains forages. A l’encontre des délégataires qui n’honorent pas leurs contrats, la mairie enclenchent des actions et leur retirer la confiance de la commune. Depuis 2017, la gestion de l’eau est confiée à une agence par l’Etat central. Le gouvernement du Bénin a créé par décret no 2017 -039 du 25 janvier 2017 l’Agence nationale d’approvisionnement en eau potable en milieu rural (ANAEPMR) afin d’atteindre l’Objectif du développement durable 6. L’ODD 6.1 veut assurer «l’accès universel et équitable à l’eau potable, à un coût abordable » d’ici 2030. Habib Dikpè indique que le gouvernement veut fait un grand pas pour atteindre cet objectif en 2021. Dans ce cadre, Lalo a bénéficié de la réalisation de deux grands châteaux à système multi-villages. Chacun des châteaux doit couvrir tous les villages et toutes localités de l’arrondissement dans lequel, il est implanté. Ces deux châteaux sont en cours de construction dans les arrondissements de Ahodjinnako et de Lokogba.

Légende : Château d’eau en construction dans l’arrondissement de Ahodjinnako

Selon une source interne de la structure en charge de la construction du château de Ahodjinnako, cet château d’eau a une capacité de 200 m3 de capacité sur 18 m de hauteur et d’une station de pompage. C’est un Système d’approvisionnement en eau potable multi-villages. La station de pompage est composée de trois bâtiments (bâtiment administratif, traitement de l’eau et l’abri groupe), des points d’eau (20 forages ‘’Borne fonden’’ à réaliser). Des dispositions techniques ont été prises compte tenu du type de sol. Ainsi, les points d’eau seront sur pilotis. Il y aura aussi des regards en briques pour le logement des accessoires du réseau. Il y a aura 45 km, 100 linéaires de conduites de diamètre compris entre 63 et 225 cm.

Après six mois et demi du délai, le taux d’exécution physique des travaux est de 23,75 % pour une consommation de 45,33 % du délai contractuel. 298 m de conduites sont déjà posés. Cet ouvrage va desservir les cinq villages de l’arrondissement de Ahodjinnako, que sont Ahodjinnako centre, Dogoedeta, Lokoli, Hèli, Adonou. D’après la même source, le délai de 15 mois sera respecté malgré la saison de pluie qui est déjà là. Le château de Lokogba a même les caractéristiques de celui de Ahodjinnako mais il doit desservir les neuf villages que compte l’arrondissement. Les autres localités vont encore continuer à ruminer leur mal pour longtemps. Car, pour l’heure, rien n’est prévu pour leur permettre l’accès à l’eau potable.

Une réponse

  1. Avatar de Joeleplombier
    Joeleplombier

    Alexandre Zinsou ; une occasion de faire également quelque chose pour ton village en mobilisant les investisseurs pour y remédier.
    Talon ne peut tout faire en 5 ans raison pour laquelle il sollicité le suffrage des habitants de Lalo.
    On ne peut mettre les errements de 60 ans des gouvernements successifs de ce pays sur le dos du pouvoir actuel
    Le Plombier universitaire

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