Depuis quelques heures, la presse française se fait l’écho des propos de l’artiste congolais Gims sur l’Egypte, l’empire de Kush et l’Afrique en général. Dans un contexte où l’histoire de l’Afrique est souvent méconnue ou dévalorisée, les propos de Gims sur l’Égypte et l’Afrique sont interprétés par certains jeunes africains comme une tentative de mettre en lumière la riche histoire du continent, bien qu’ils contiennent des erreurs et inexactitudes. La réaction de la presse française, qui s’est moquée de l’artiste, témoigne d’une certaine condescendance héritée de la période coloniale et d’une approche sensationnaliste privilégiant le buzz plutôt que l’éducation et la compréhension mutuelle.
Il est important de reconnaître que Gims, comme beaucoup de jeunes Africains, est en quête de son histoire et que certains de ses propos, bien que controversés, sont en réalité fondés. Par exemple, l’existence de chevaliers noirs est documentée et reconnue par les historiens européens, et le peuplement de l’Europe par les Africains est également vérifiable. Des erreurs de dates et période évoquées par l’artiste sont certes flagrantes, mais ya-t-il lieu de faire une campagne aussi violente stimulant les internautes les plus racistes de la toile?
Le youtubeur Nota Bene a reconnu et admis ces faits dans une vidéo de qualité dans laquelle il a démonté ce qu’il considérait comme faux, tout en soulignant que les dates évoquées ne sont pas forcément exactes. Par contre les propos de Gims sont aussi basés sur des travaux de chercheurs, certes controversés, mais des travaux eux aussi basés sur des analyses et interprétations. Mais il vaut mieux discuter arguments contre arguments, plutôt que d’échanger des insultes et moqueries. Au lieu de se moquer de l’artiste, la presse aurait pu saisir cette occasion pour engager un débat constructif sur l’histoire africaine et sa contribution à la culture mondiale.
L’approche de Nota Bene est un exemple à suivre en matière d’éducation et de respect. Il a réussi à aborder le sujet de manière réaliste sans chercher à ridiculiser Gims, ce qui contraste avec la réaction de la presse française. Dans ce contexte, on peut se demander pourquoi il est nécessaire d’humilier un artiste et le faire passer pour un demeuré, alors que de nombreux autres artistes, y compris blancs, ont des connaissances historiques bien pires.
Sur la toile, les jeunes Africains ont été en grande majorité indifférents aux railleries de la presse occidentale elle-même accusée dans le passé de diffuser des fake news. Certains se rappellent encore de l’aberration des propos de l’ancien président Sarkozy qui affirmait que l’Afrique n’avait pas d’histoire, ou des fausses informations diffusées par la presse américaine sur l’Irak. Doit-on rappeler les fake news les fakes news sur certains présidents africains destitués dans le passé comme Bokassa que la presse française accusait à tort d’être un cannibale? ou d’autres accusés à tort d’être des terroristes comme Nelson Mandela ? La presse française est donc mal placée pour donner des leçons en matière de vérification des faits. Pour mieux percevoir l’histoire, et éviter des biais dans tous les camps (parce qu’ils existent également chez les européens mus par des idées colonialistes), il est important de discuter, d’apporter des preuves tout simplement et ne pas donner l’impression de lyncher certaines personnalités.
Il est temps que la presse adopte une attitude éducatrice et respectueuse envers les personnalités publiques noires et les sujets qu’ils abordent, à l’image de l’approche de Nota Bene, afin de contribuer à un débat public plus tolérant et enrichissant pour tous.
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