« Gbagbo avait gagné… »: les révélations fracassantes de Robert Bourgi

Robert Bourgi (© BERNARD BISSON/JDD/SIPA)

La Côte d’Ivoire, joyau de l’Afrique de l’Ouest, a connu une période tumultueuse en 2010-2011. L’élection présidentielle, censée marquer le retour à la stabilité après une décennie de tensions, a plongé le pays dans une crise sans précédent. Opposant Laurent Gbagbo, président sortant, à Alassane Ouattara, ancien Premier ministre et candidat de l’opposition, le scrutin s’est soldé par une confrontation sanglante. Deux camps se sont formés, chacun revendiquant la victoire, provoquant une paralysie institutionnelle et une escalade de violences. L’intervention militaire française, sous mandat de l’ONU, a mis fin au conflit en avril 2011, mais a laissé des cicatrices profondes dans la société ivoirienne et soulevé de nombreuses questions sur la légitimité du processus électoral et le rôle des puissances étrangères dans la résolution de la crise.

Les dessous d’une manipulation politique

Robert Bourgi, figure emblématique de la Françafrique, vient de lever le voile sur les coulisses de cette période trouble. Dans un entretien accordé à France 24, l’ancien conseiller officieux de l’Élysée pour l’Afrique a fait des révélations explosives sur l’élection présidentielle ivoirienne de 2010. Selon lui, Laurent Gbagbo était le véritable vainqueur du scrutin, contrairement à ce qui a été officiellement reconnu par la communauté internationale. Cette déclaration remet en question la légitimité de l’accession au pouvoir d’Alassane Ouattara et jette une lumière crue sur les manœuvres diplomatiques de l’époque.

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Bourgi, visiblement ému, a confessé avoir été « complice d’une trahison » envers le peuple ivoirien. Il a dépeint un tableau saisissant des tractations en coulisses, impliquant les plus hautes sphères du pouvoir français. L’avocat a notamment révélé une tentative de négociation orchestrée par Nicolas Sarkozy, alors président français, visant à convaincre Gbagbo de renoncer au pouvoir en échange d’avantages substantiels. Cette proposition, qui incluait un statut d’ancien chef d’État, une rente confortable et même une chaire universitaire, a été catégoriquement rejetée par Gbagbo, qui aurait répondu avec défiance : « Tu diras à Sarkozy que je serai son Mugabe. »

Les conséquences d’un refus et l’intervention française

Face à l’intransigeance de Gbagbo, la réaction de Sarkozy aurait été sans équivoque. Selon Bourgi, le président français aurait menacé de « vitrifier » son homologue ivoirien, une expression lourde de sens qui préfigurait l’intervention militaire à venir. Cette révélation jette un éclairage nouveau sur les motivations et les méthodes employées par la France pour influencer le cours des événements en Côte d’Ivoire.

L’intervention militaire française qui a suivi, justifiée officiellement par la nécessité de protéger les civils et de restaurer la démocratie, apparaît désormais sous un jour plus ambigu. Si les propos de Bourgi sont avérés, cette opération pourrait être perçue comme une ingérence visant à installer un dirigeant plus favorable aux intérêts français, au mépris de la volonté populaire exprimée dans les urnes.

Les révélations de Bourgi soulèvent des questions fondamentales sur l’intégrité du processus démocratique en Afrique et le rôle des anciennes puissances coloniales. Elles mettent en lumière les mécanismes opaques de la Françafrique, ce réseau d’influence informel qui continue d’exercer un pouvoir considérable sur le continent africain. Au-delà du cas ivoirien, ces déclarations invitent à une réflexion plus large sur la souveraineté des États africains et la nécessité d’une refonte des relations internationales basée sur le respect mutuel et la non-ingérence.

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Alors que la Côte d’Ivoire s’efforce aujourd’hui de tourner la page de cette période sombre, les paroles de Robert Bourgi résonnent comme un rappel douloureux des défis qui persistent. Elles appellent à une réévaluation critique de l’histoire récente du pays et à un dialogue national inclusif pour panser les plaies du passé. Pour de nombreux Ivoiriens, ces révélations pourraient raviver des tensions latentes, mais elles offrent aussi une opportunité de vérité et de réconciliation, essentielles à la construction d’un avenir plus juste et démocratique.

3 réponses

  1. Avatar de Mohamed Ibn Aboubacar Sidick
    Mohamed Ibn Aboubacar Sidick

    Bourgi sait-il que lorsque le CC constate qu’il y a lieu des fraudes de nature à entacher la sincérité du scrutin ( 7 départements ), le CC annule l’élection et les électeurs sont convoqués dans un délai de 60 jours. Pourquoi le CC a-t-il annulé toutes les voix de Ouattara dans ces 7 départements pour déclarer Gbagbo vainqueur? Non, monsieur Bourgi, Gbagbo n’a pas gagné et ne peut pas gagner.

  2. Avatar de sonagnon
    sonagnon

    Rien ne prouve que Gbagbo avait gagné les élections en ce temps. D’ailleurs Robert Bourgi n’a apporté aucun élément qui accrédite cette thèse. Il s’est seulement référé à la décision du conseil constitutionnel de Côte d’Ivoire. Ce qui est normal pour un juriste.

    Mais pour que le conseil constitutionnel de Côte d’Ivoire en arrive là, il a fallu l’annulation massive des votes dans les fiefs de OUATTARA, ce qui est à l’origine de la crise post électorale.
    Si non, le résultat des urnes, avec évidemment des fraudes de part et d’autre donnaient OUATTARA gagnant.

    Mais de quel droit un président français devrait menacer un président africain, même mal élu???? Toute la question est là.
    La France doit apprendre à respecter la souveraineté des pays africains, c’est la pierre angulaire des nouvelles relations que la France doit désormais concevoir pour des relations cordiales avec les pays africains. II y va de l’intérêt de la France elle même.

  3. Avatar de The Atlantean
    The Atlantean

    Le peuple Ivoirien est la vraie victime de cette manipulation diabolique française. Et aujourd’hui sur la scène politique en France, la France voit le retour des retributions retournées contre elle, et les effets se voient dans la politique intérieure de la France, après avoir foutu des pagailles dans les colonies, elle boit aujourd’hui les eaux amères de cette sale politique sur son sol. Le retour du karma des actions nuisantes du passé est irrévocable, sa frappe vient avec le temps.

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