L’histoire de l’humanité est marquée par des périodes sombres dont les conséquences se font encore sentir aujourd’hui. Parmi elles, l’esclavage et la colonisation occupent une place particulière par l’ampleur des souffrances infligées et la durée de leur pratique. Ces systèmes d’exploitation ont arraché des millions d’êtres humains à leurs terres, brisé des familles, anéanti des cultures et laissé des cicatrices profondes dans le tissu social, économique et culturel de nombreuses nations.
Les ravages de ces pratiques sont incommensurables : des générations entières ont été privées de liberté, de dignité et d’avenir. Les peuples colonisés ont vu leurs ressources pillées, leurs traditions bafouées et leur développement entravé. L’impact de ces crimes contre l’humanité perdure encore aujourd’hui, se manifestant à travers des inégalités structurelles, des préjugés enracinés et des traumatismes transgénérationnels. Face à l’ampleur de ces atrocités, aucune réparation ne saurait effacer pleinement les torts causés.
C’est dans ce contexte historique lourd que l’Église catholique vient de franchir un pas inédit.
Rome : un synode s’ouvre sur une note de repentance
Le mardi 1er octobre 2024, à Rome, s’est ouverte la session du synode sur la réforme de Gouvernance de l’Église catholique. De manière surprenante, cette assemblée a débuté par un acte de repentance de l’institution, présentant sept nouveaux péchés et demandant pardon, notamment pour l’esclavage et le colonialisme.
La cérémonie s’est déroulée dans la Basilique Saint-Pierre de Rome, lieu emblématique du catholicisme. Sept cardinaux ont lu des demandes de pardon écrites par le Pape François, chacune correspondant à l’un des sept nouveaux péchés identifiés par l’Église. L’ambiance était décrite comme particulièrement pesante par les observateurs présents, soulignant la gravité du moment.
« Nous avons été complices » : l’Église reconnaît son rôle dans l’esclavage et le colonialisme
Parmi ces demandes de pardon, celle concernant l’esclavage et le colonialisme a particulièrement retenu l’attention. Le cardinal Michael Czerny, d’origine tchèque, a lu un texte poignant :
« Nous n’avons pas reconnu le droit à la dignité de chaque personne humaine, en la discriminant et en l’exploitant – Je pense en particulier aux peuples indigènes – et pour les moments où nous avons été complices de systèmes qui ont favorisé l’esclavage et le colonialisme.«
Cette reconnaissance de la complicité de l’Église dans ces systèmes d’oppression marque un tournant dans son approche de son propre passé. Elle souligne une volonté de faire face à des aspects sombres de son histoire, longtemps passés sous silence ou minimisés.
La condition des femmes dans l’Église : un autre mea culpa retentissant
Un autre moment marquant a été la lecture sur le péché contre les femmes, par le cardinal Joseph Farell. Il a notamment déclaré : « Je demande pardon au nom de toute l’Église, en particulier de nous, les hommes, en ayant honte de toutes les fois où nous n’avons pas reconnu et défendu la dignité des femmes, où nous les avons rendues muettes et soumises et bien souvent exploitées, en particulier dans la condition de la vie consacrée.«
Le Pape François a justifié cette cérémonie inhabituelle comme nécessaire pour rendre les missions de l’Église « crédibles« . Il a souligné l’importance de reconnaître les erreurs du passé pour pouvoir avancer de manière authentique dans la mission de l’Église.
Sept nouveaux péchés : l’Église face à ses responsabilités
Les sept nouveaux péchés présentés lors de cette cérémonie sont :
- Le péché contre la paix
- Le péché contre la création, les peuples indigènes et les migrants
- Le péché d’abus
- Le péché contre les femmes, la famille et les jeunes
- Le péché de la doctrine utilisée comme des pierres à jeter
- Le péché contre la pauvreté
- Le péché contre la synodalité, le manque d’écoute, de communion et de participation de tous
Cette démarche de l’Église catholique, bien qu’historique, soulève de nombreuses questions. Si elle marque une volonté de confronter son passé et d’assumer ses responsabilités, elle met aussi en lumière l’ampleur des défis auxquels l’institution fait face. La reconnaissance des torts causés est un premier pas, mais beaucoup s’interrogent sur les actions concrètes qui suivront cette demande de pardon.
Face à l’immensité des souffrances causées par l’esclavage et la colonisation, dont les conséquences continuent d’affecter des millions de personnes à travers le monde, cette demande de pardon, bien que significative, ne peut être qu’un début. Elle ouvre la voie à une réflexion plus profonde sur le rôle des institutions religieuses dans la guérison des blessures du passé et la construction d’un avenir plus juste et équitable pour tous.
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