Emmanuel Macron a provoqué une crise diplomatique majeure avec plusieurs pays africains en déclarant que la France avait « proposé aux chefs d’État africains de réorganiser sa présence militaire » et que « par politesse » Paris leur avait « laissé la primauté de l’annonce« . Ces propos tenus lors de la réunion annuelle des ambassadeurs français ont immédiatement suscité l’indignation des dirigeants africains, alors que le retrait forcé de l’armée française se généralise sur le continent, touchant successivement le Mali, le Burkina Faso, le Niger, et plus récemment le Sénégal et le Tchad et la Côte d’Ivoire.
Une confrontation directe entre Dakar et Paris
Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a vigoureusement contesté la version du président français, qualifiant ses déclarations de « totalement erronées« . Réputé pour ses positions en faveur des intérêts africains, le chef du gouvernement sénégalais a affirmé qu’aucune négociation n’avait précédé la décision de son pays. Il a souligné que le choix de mettre fin à la présence militaire étrangère en 2025 émanait uniquement de la « volonté d’un pays libre, indépendant et souverain« . Sonko a particulièrement fustigé la capacité de la France à assurer la sécurité du continent, accusant Paris d’avoir au contraire déstabilisé certains pays, notamment la Libye, avec des répercussions désastreuses sur la stabilité du Sahel.
Le Tchad dénonce le mépris présidentiel
La tension a encore monté d’un cran lorsque Macron a déclaré que les dirigeants africains avaient « oublié de dire merci » pour l’intervention française contre le terrorisme au Sahel depuis 2013, ajoutant avec ironie que « ça viendra avec le temps ». Le ministre tchadien des Affaires étrangères, Abderaman Koulamallah, a réagi fermement en dénonçant « l’attitude méprisante » du président français. Dans un message télévisé, il a rappelé le « rôle déterminant » de l’Afrique et du Tchad dans la libération de la France pendant les deux guerres mondiales, une contribution selon lui « jamais véritablement reconnue« . Le chef de la diplomatie tchadienne a également critiqué les soixante années de présence française, marquées par une politique privilégiant les intérêts stratégiques de Paris au détriment du développement local.
Un bouleversement stratégique continental
Cette crise diplomatique reflète un changement profond dans les relations franco-africaines. Le Tchad, qui représentait le dernier bastion de l’influence militaire française au Sahel avec environ mille soldats stationnés sur son territoire, a rompu ses accords de défense fin novembre, exigeant le départ des forces françaises avant le 31 janvier. Pour le président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno, ces accords sont devenus « complètement obsolètes » face aux « réalités politiques et géostratégiques actuelles ». La Côte d’Ivoire a également annoncé la rétrocession de la base militaire française de Port-Bouet près d’Abidjan, illustrant cette volonté générale d’autonomie stratégique et de souveraineté renforcée qui traverse le continent africain.
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