Elon Musk : cette promesse qu’il reconnaît ne pas pouvoir tenir

Elon Musk (The New Yorker)

Dès son ralliement à Donald Trump pendant la campagne présidentielle, Elon Musk avait fait des économies budgétaires son cheval de bataille. Le milliardaire, connu pour ses entreprises Tesla et SpaceX, promettait de révolutionner l’administration fédérale américaine en y apportant l’efficacité du secteur privé. La promesse était alléchante : réduire les dépenses publiques de 2 000 milliards de dollars par an, soit près de 40% du budget fédéral américain. Une ambition démesurée que beaucoup d’experts considéraient déjà comme irréaliste, mais qui a néanmoins séduit une partie de l’électorat américain, attiré par cette vision d’une gestion publique calquée sur le modèle entrepreneurial.

Des ambitions à la baisse : l’évolution des objectifs du DOGE

L’histoire de cette promesse ressemble à un ballon qui se dégonfle progressivement. Après sa nomination à la tête du Département de l’Efficacité gouvernementale (DOGE), structure créée spécialement pour lui par l’administration Trump, Musk a rapidement revu ses ambitions à la baisse. Des 2 000 milliards initialement promis, l’objectif a été divisé par deux en quelques semaines seulement.

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Mais la réalité administrative s’est avérée bien plus complexe que prévu pour l’entrepreneur. La semaine dernière, nouvelle concession : Musk a publiquement admis que même l’objectif réduit de 1 000 milliards était inatteignable. Il se contenterait désormais de 150 milliards de dollars d’économies – soit à peine 7,5% de sa promesse initiale. Un aveu d’échec pour celui qui prétendait transformer radicalement le fonctionnement de l’État fédéral américain.

Selon l’analyse du New York Times, même ce nouvel objectif reste hors de portée. Le quotidien américain pointe du doigt la méthodologie douteuse employée par l’équipe de Musk : « Quand le groupe de M. Musk fait ses calculs, il inclut des erreurs à plusieurs milliards de dollars en intégrant des dépenses qui ne seront pas réalisées dans la prochaine année fiscale, et en imaginant d’autres dépenses qui ne seront pas faites du tout. » La différence entre les promesses grandioses et les résultats concrets s’explique en partie par cette comptabilité créative.

Les chantiers inachevés et le manque de transparence

Le fonctionnement même du DOGE soulève des questions. L’organisation promet de « travailler pour afficher toutes les factures d’une manière transparente et compréhensible« , mais reste floue sur des aspects essentiels comme le calendrier de mise en œuvre des économies annoncées.

La stratégie employée par Musk rappelle celle qu’il a appliquée dans certaines de ses entreprises : réduction drastique des effectifs et rupture de contrats. Ces méthodes, controversées dans le secteur privé, suscitent encore plus de remous lorsqu’elles sont appliquées à l’administration publique. Les licenciements massifs ordonnés par le DOGE ont certes généré quelques économies immédiates, mais à quel prix pour le fonctionnement des services publics américains ? Cette question reste sans réponse précise de la part de l’équipe de Musk.

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La tentative de transposer les méthodes de gestion du secteur privé vers le secteur public se heurte aux spécificités de l’administration : missions de service public, contraintes légales et réglementaires, nécessité de continuité des services essentiels. Comme un pilote habitué aux avions de chasse qui tenterait de manœuvrer un paquebot, Musk découvre que le changement de cap dans l’administration fédérale ne s’opère pas à la même vitesse que dans une startup.

Un départ anticipé sur fond de controverse politique

L’aventure de Musk au sein du gouvernement pourrait d’ailleurs se terminer plus tôt que prévu. Des élus démocrates réclament son départ en invoquant la législation fédérale, qui limite à 130 jours la présence d’un « employé spécial du gouvernement » – statut sous lequel Musk opère. Si cette interprétation de la loi est retenue, le milliardaire devrait quitter ses fonctions avant la fin du mois de mai.

Musk lui-même ne semble pas opposé à ce calendrier, estimant qu’il aura alors accompli « la majeure partie » de sa mission. Cette sortie par la petite porte lui permettrait de se retirer sans avoir à assumer l’échec de ses promesses initiales, tout en revendiquant d’avoir initié un mouvement de réforme.

L’expérience de Musk au DOGE illustre le fossé entre les promesses de campagne et la réalité gouvernementale. Elle témoigne aussi de la difficulté à appliquer des solutions simplistes à des problèmes structurels complexes. Couper dans les dépenses publiques s’avère bien plus compliqué que de supprimer des lignes dans un tableur Excel, surtout quand ces dépenses correspondent à des services attendus par les citoyens ou à des engagements légaux de l’État.

Pour Donald Trump, qui avait fait de la nomination de Musk un argument de campagne, l’échec relatif de cette initiative représente un revers politique. Mais l’histoire n’est pas terminée : même si les économies réalisées sont loin des promesses initiales, les méthodes introduites par Musk pourraient laisser des traces durables dans le fonctionnement de l’administration américaine – pour le meilleur ou pour le pire.

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