Alors que les combats se poursuivent sur plusieurs fronts en Ukraine, plus de deux ans après le début de l’offensive russe lancée en février 2022, la structure de commandement militaire à Moscou continue d’évoluer. Cette guerre, marquée par des affrontements d’une rare intensité dans le Donbass, des frappes sur les infrastructures critiques et une mobilisation militaire prolongée, pèse sur l’appareil de défense russe, aussi bien sur le terrain que dans ses sphères dirigeantes. Sur fond de tentatives de médiation, notamment à Istanbul, la présidence russe reconfigure une partie de son commandement.
Une figure de l’armée déplacée vers un rôle politique
Le général Oleg Salioukov, en poste depuis 2014 à la tête des forces terrestres russes, a été relevé de ses fonctions par décret présidentiel. Le document, rendu public ce jeudi par le Kremlin, officialise sa nouvelle affectation : il devient secrétaire adjoint du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie. Cet organe, bien que consultatif, joue un rôle stratégique dans la formulation des orientations militaires et diplomatiques. Son repositionnement suggère un recentrage vers un rôle plus institutionnel, loin des lignes de front.
La longévité de Salioukov à la tête des forces terrestres avait fait de lui l’un des piliers de la hiérarchie militaire russe. Il avait notamment dirigé les opérations terrestres durant la guerre en Syrie, avant de jouer un rôle central dans la planification de l’intervention contre l’Ukraine. En mai dernier, il avait encore été mis en avant publiquement lors du défilé du 9-Mai sur la Place Rouge, une cérémonie qui revêt une portée symbolique forte, marquant cette année les 80 ans de la victoire soviétique sur l’Allemagne nazie.
Des changements au sommet dans un climat incertain
Le départ de Salioukov intervient à un moment où le Kremlin cherche à consolider son appareil décisionnel dans un contexte militaire et diplomatique tendu. Des négociations bilatérales entre représentants russes et ukrainiens sont attendues à Istanbul, tandis que les États-majors s’efforcent de maintenir un équilibre entre stratégie de terrain et préparation à d’éventuels compromis. La recomposition des équipes au sommet du pouvoir militaire laisse penser que Vladimir Poutine cherche à adapter son dispositif de commandement à une nouvelle phase du conflit.
Ce mouvement s’inscrit dans une série de nominations récentes qui traduisent des ajustements continus au sein des structures militaires. L’expérience de Salioukov pourrait désormais servir davantage à la planification qu’à l’exécution, à la table des décisions plutôt que sur le théâtre des opérations.
Un signal adressé à l’intérieur comme à l’extérieur
Au-delà de la réaffectation d’un seul homme, cette décision envoie un message plus large à l’ensemble des forces armées russes. Elle montre que la loyauté et l’efficacité ne garantissent pas l’intangibilité des postes, surtout lorsque le contexte évolue rapidement. Le remplacement d’un haut gradé aussi emblématique, peu de temps après un événement aussi symbolique que le 9-Mai, révèle aussi une volonté de maintenir un contrôle étroit sur les organes militaires à l’approche de discussions potentiellement cruciales.
Enfin, ce remaniement pourrait aussi être lu comme un signal envoyé aux partenaires et adversaires de Moscou. En déplaçant un commandant expérimenté dans une fonction stratégique de conseil, la Russie met en avant la continuité d’un commandement civil-militaire fortement centralisé, au moment où les pressions extérieures et les dynamiques internes exigent un pilotage resserré des affaires de défense.
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