Sénégal : Guy Marius Sagna gagne une bataille, le Parlement face à ses contradictions

Débats à l’Assemblée nationale sénégalaise. Photo : SEYLLOU / AFP

Guy Marius Sagna, figure connue pour son franc-parler et son engagement social, a de nouveau provoqué une onde de choc à l’Assemblée nationale. Cette fois, sa cible est entres autres pratiques, le “Sukëru Koor”. C’est une tradition controversée de distribution d’enveloppes d’argent à l’approche du Ramadan. Pour le député, il ne s’agit ni plus ni moins que de clientélisme maquillé, en contradiction totale avec les engagements de rupture portés par le parti PASTEF.

Refusant de cautionner ce qu’il considère comme une forme déguisée d’achat de conscience, Sagna a dénoncé la remise de 100 000 FCFA à certains députés, sans critères transparents ni débat collectif. Malgré ses nombreuses tentatives de porter le sujet au sein du groupe parlementaire, il affirme avoir été systématiquement ignoré, voire marginalisé. Il dit pourtant rester optimiste : selon lui, le débat est désormais lancé, et ces pratiques pourraient être abolies d’ici 2026.

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Une réponse nuancée de la majorité

Face à cette sortie très médiatisée, Abdou Ahad Ndiaye, député de la majorité, a jugé nécessaire d’apporter des précisions. Selon lui, si les dénonciations de Sagna partent d’un souci de transparence, elles souffrent d’un certain manque de nuances. Il rappelle que depuis l’arrivée de la 15e législature, des progrès notables ont été enregistrés. Des commissions longtemps restées inactives ont été réactivées, et plusieurs réformes sont en cours pour rationaliser les dépenses. L’exemple du remplacement des indemnités de transport par un achat groupé de véhicules est, selon Ndiaye, révélateur de cette volonté de changement.

Le député souligne aussi les disparités de ressources entre parlementaires. Si certains peuvent s’acheter un véhicule ou se déplacer à leurs frais, d’autres ne le peuvent pas. C’est cette réalité qui justifie certains appuis, parfois mal perçus à l’extérieur. Pour lui, il est nécessaire de poser un débat structuré sur les moyens et les obligations des députés, sans tomber dans les procès d’intention.

Entre rupture revendiquée et inertie institutionnelle

La confrontation entre Guy Marius Sagna et une partie de l’Assemblée révèle une tension plus large : celle qui oppose les aspirations à une rupture éthique et la lourdeur d’un système hérité, où les privilèges sont souvent la norme. En mettant en lumière ces contradictions internes, Sagna a contribué à ouvrir une brèche. Mais le chemin vers une refonte durable des pratiques parlementaires reste semé d’obstacles.

Le débat ne fait sans doute que commencer. La crédibilité du changement promis par le pouvoir dépendra de la capacité des élus à dépasser les logiques partisanes et à répondre à une exigence de transparence de plus en plus pressante. Le “Sukëru Koor”, bien qu’emblématique, n’est que la partie visible d’un vaste chantier de refondation.

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