Sénégal : La commune de Mbane secouée après la visite du Président Diomaye

Photo de Pixabay

Depuis sa création en 1970, la Compagnie sucrière sénégalaise (CSS) joue un rôle central dans l’économie nationale. Seul producteur de sucre au Sénégal, elle emploie aujourd’hui plus de 8 000 personnes, en faisant le plus grand employeur privé du pays. Dans sa quête d’accroissement de sa capacité de production, l’entreprise vient de se voir accorder un important coup de pouce par la commune de Mbane, avec l’octroi de plus de 1 000 hectares de terres cultivables situées à Mourseyni.

Cette décision, prise à la suite d’une visite du président Bassirou Diomaye Faye le 12 juin dernier, a provoqué une onde de choc dans la population locale. Dans son allocution, le chef de l’État a salué les efforts de la CSS et réaffirmé la nécessité d’un appui étatique pour permettre à l’entreprise d’atteindre ses ambitions : porter sa production de sucre de 140 000 à 220 000 tonnes d’ici 2030. Un message perçu comme un signal fort aux autorités locales, les incitant à accélérer les procédures foncières.

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Des voix s’élèvent à Mourseyni face à une décision précipitée

Mais l’enthousiasme affiché par les autorités contraste avec l’amertume ressentie dans les rangs des habitants de Mourseyni. Le village, déjà engagé dans des démarches pour exploiter ces mêmes terres à des fins agricoles et communautaires, voit son avenir brusquement remis en question. Ousseynou Boh, un habitant, a fait part de l’amertume des populations, dénonçant une délocalisation imposée sans véritable concertation. En plus des 1 026 hectares cédés officiellement, 34 autres hectares seraient également touchés, selon des sources locales.

L’impact ne sera pas seulement agricole. Un enseignant de la commune sur les ondes de la SudFm a alerté sur les conséquences sociales de l’opération : des infrastructures scolaires seront trop proches des champs de la compagnie, mettant en péril la continuité pédagogique pour les enfants du village. La promesse de développement industriel se heurte ainsi à la crainte de voir disparaître des repères communautaires essentiels.

Le dilemme du développement : entre emploi et expropriation

Ce nouvel épisode soulève une question récurrente dans la dynamique économique sénégalaise : comment concilier le développement des industries stratégiques avec la préservation des droits des communautés rurales ? En favorisant l’expansion de la CSS, l’État espère renforcer sa souveraineté alimentaire et réduire les importations de sucre. Mais sur le terrain, ce volontarisme se traduit par des tensions, des déplacements forcés, et une fracture croissante entre les ambitions nationales et les réalités locales.

Le dossier de Mbane illustre avec acuité les défis à venir pour le président Diomaye Faye. En galvanisant les forces productives nationales, il prend le risque de heurter des équilibres sociaux déjà fragiles. À moins qu’une véritable politique d’accompagnement, équitable et concertée, ne vienne atténuer les conséquences de ces transformations industrielles.

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