Depuis plusieurs décennies, les États-Unis occupent une position prépondérante dans le domaine spatial mondial, s’appuyant sur des ressources financières colossales, des infrastructures avancées et des entreprises influentes. Leur capacité à lancer des missions complexes et à développer des technologies de pointe a largement façonné la course à l’espace. Cependant, face à cette domination, des acteurs européens cherchent à s’imposer en proposant des solutions plus agiles et économiques. La société française Latitude, installée à Reims, développe un lanceur innovant baptisé Zéphyr, qui pourrait bouleverser les codes traditionnels du secteur.
Une fusée compacte, conçue pour la rapidité et la rentabilité
Zéphyr se distingue par une conception résolument moderne, alliant légèreté et robustesse grâce à l’usage de matériaux composites. Cette approche permet de réduire la masse totale du lanceur tout en conservant une solidité nécessaire aux exigences du vol spatial. Latitude mise sur un procédé de fabrication industrialisé et verticalisé, visant à produire un volume important de fusées — jusqu’à cinquante par an à partir de 2026. Ce rythme est rendu possible par une usine équipée de technologies avancées, avec un soutien financier du plan France 2030, orienté vers la promotion de l’innovation industrielle.
La propulsion est assurée par un ensemble de moteurs Navier conçus en impression 3D : sept propulseurs actionnent le premier étage tandis qu’un moteur spécifique, optimisé pour le vide spatial, équipe le second étage. Alimenté par un couple classique : carburant fossile raffiné et comburant liquide, ce système offre un compromis efficace entre performance et maîtrise des coûts, avec un coût estimé par lancement inférieur à 2,5 millions d’euros. Zéphyr est ainsi capable de placer en orbite basse circulaire une charge utile de 200 kilogrammes, ou 80 kilogrammes en orbite héliosynchrone, répondant aux besoins des opérateurs de satellites légers.
Une alternative européenne face à la suprématie américaine
L’objectif de Latitude est clair : proposer une offre européenne compétitive, capable de contester la suprématie des acteurs américains du spatial. Là où ces derniers bénéficient d’une expérience et de moyens considérables, la startup française mise sur l’innovation technologique et une industrialisation agile. La possibilité d’effectuer des lancements depuis la France ou l’Écosse renforce cette souveraineté européenne et réduit la dépendance à des sites étrangers.
Cette démarche répond à une demande croissante de solutions plus accessibles pour le lancement de petits satellites, particulièrement prisés dans les secteurs des télécommunications, de l’observation terrestre ou de la recherche scientifique. En combinant compacité, performances solides et réduction des coûts, Zéphyr pourrait séduire un marché en pleine expansion, offrant aux acteurs européens une porte d’entrée vers l’espace sans recourir aux géants américains.
Vers une nouvelle ère pour l’industrie spatiale européenne
Au-delà de ses caractéristiques techniques, le projet Zéphyr incarne une volonté de transformer les modes de production du secteur spatial. Latitude ambitionne de développer une chaîne industrielle capable de produire en série des lanceurs fiables et abordables, à l’image des industries où la standardisation et la fabrication à grande échelle ont fait leurs preuves. Cette dynamique pourrait stimuler l’innovation, renforcer l’emploi et accroître l’autonomie technologique de l’Europe.
L’intégration de technologies de pointe telles que l’impression 3D et la maîtrise complète du processus de fabrication offrent à Latitude une position unique pour répondre efficacement aux besoins du marché des petits satellites, en pleine croissance. En réussissant ce pari, la startup pourrait contribuer à diversifier l’offre spatiale mondiale et favoriser une plus grande compétition, essentielle à l’émergence de solutions innovantes.
Zéphyr représente donc plus qu’un simple lanceur : c’est le témoignage d’une Europe décidée à s’imposer dans un domaine stratégique, en proposant des alternatives crédibles et audacieuses. Ce projet montre que la conquête de l’espace n’est plus réservée à une poignée de puissances, mais accessible à ceux qui savent combiner innovation technique et vision industrielle.



