Les hydrocarbures constituent depuis des décennies la principale source de devises pour l’Algérie. À l’heure où les enjeux énergétiques se complexifient sur le plan international, la stratégie de Sonatrach vise une modernisation de fond de ses infrastructures et un développement ciblé des gisements, pour assurer une montée en puissance durable de la production nationale. Le groupe public semble désormais miser sur une logique d’anticipation et de réarmement industriel plutôt que sur une simple exploitation des ressources disponibles.
Modernisation tous azimuts des infrastructures
À travers le territoire algérien, les chantiers s’accumulent, donnant la mesure de l’ambition affichée par Sonatrach. À Hassi Messaoud, cœur historique de la production pétrolière du pays, l’entreprise finalise une usine d’extraction de gaz de pétrole liquéfié (GPL) capable de traiter 10 millions de m³ de gaz par jour. Ce projet, dont la livraison est attendue l’année prochaine, prévoit une production quotidienne de 1 000 tonnes de GPL, 300 tonnes de condensat, et 8,7 millions de m³ de gaz. À quelques kilomètres de là, un second chantier piloté par la filiale Sarpi prévoit l’installation d’une station de pompage multiphasique à Rhourde Chegga. Ce dispositif traitera jusqu’à 20 000 barils de brut et 800 000 m³ de gaz associés par jour.
Plus à l’est, dans la région d’Illizi, une station de compression de gaz à Rhourde Nouss est en cours de construction. Avec une enveloppe de 850 millions de dollars et confiée à l’entreprise chinoise Jereh Oil & Gas, cette infrastructure vient compléter les investissements réalisés dans les complexes gaziers existants de Tinrhert, In Amenas et Alrar. Ce projet témoigne d’une volonté de maximiser la valorisation des champs existants, tout en renforçant les capacités de traitement locales.
Le Sud-Ouest comme relais stratégique
La région sud-ouest du pays, longtemps considérée comme marginale dans l’architecture énergétique nationale, fait désormais figure de pilier potentiel pour les années à venir. Reggane, In Salah et Timimoun deviennent des foyers d’intensification des efforts d’exploitation. Les réserves gazières, qu’elles soient conventionnelles ou issues de formations plus complexes, représentent un levier sur lequel Sonatrach entend capitaliser.
Le renforcement du réseau de canalisations, le raccordement des nouveaux puits aux centrales de traitement et la construction de stations de compression sont autant de signaux indiquant une volonté claire : faire de cette région un nouveau centre de gravité énergétique. Cette dynamique se connecte au projet d’extension du centre de collecte de gaz de Hassi R’mel, dont la troisième phase entre dans sa dernière ligne droite avec une échéance fixée à 2027.
Périmètres en croissance autour de Touggourt
Dans la zone du Grand Touggourt, les travaux avancent à grands pas sur les sites de Bir Sbaâ. La deuxième phase d’un vaste programme prévoit l’élargissement d’une installation de traitement de pétrole avec l’ajout d’un second train de séparation, doublant ainsi la capacité de 20 000 à 40 000 barils par jour. Deux stations de collecte supplémentaires sont en construction, accompagnées de plus de 400 km de pipelines pour relier les nouveaux puits. Cette approche intégrée — extraction, traitement, transfert — permet de sécuriser l’approvisionnement et de répondre plus rapidement aux fluctuations du marché.
Dans une Algérie qui cherche à conforter sa place dans l’équation énergétique mondiale, cette stratégie de développement s’apparente à une mise en ordre du terrain industriel. Au-delà des chiffres de production, c’est une logique d’ancrage et de consolidation qui se dessine. Chaque projet ne fonctionne pas en vase clos : les infrastructures, les réseaux et les capacités de traitement sont pensés en synergie pour garantir un système cohérent et résilient.
À mesure que les échéances de réception approchent, l’Algérie se repositionne non seulement comme un exportateur fiable, mais aussi comme un acteur capable d’anticiper les mutations technologiques et logistiques du secteur. Pour Sonatrach, préparer le terrain à une hausse de la production, c’est aussi renforcer les fondations sur lesquelles repose la souveraineté énergétique du pays.


