Sénégal : Mobilisation populaire à 1 milliard, Farba Ngom porte plainte

Malgré sa détention préventive à la Maison d’arrêt de Rebeuss, Farba Ngom ne reste pas silencieux. Ce mercredi, l’ancien député-maire d’Agnam a décidé de réagir fermement à la publication d’un article explosif paru à la une du journal Yoor Yoor, qui affirme qu’il a financé une manifestation à hauteur d’un milliard de francs CFA pour réclamer sa libération. Par l’intermédiaire de son avocat Me Baboucar Cissé, une plainte a été déposée contre Serigne Saliou Guèye, directeur de publication du média, pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles. Le dossier a été transmis au procureur de la République ainsi qu’au chef de la Division spéciale de cybersécurité.

La plainte vise un article daté du 29 juillet 2025, affirmant que des moyens colossaux auraient été mobilisés pour organiser un rassemblement massif à Ourossogui, avec la location de 120 bus, des primes versées à plus de 8 000 participants, ainsi que des gratifications à plusieurs figures politiques, influenceurs et médias. Une orchestration que les proches de Farba Ngom qualifient de pure fabrication, visant à alimenter une pression médiatique dans un moment judiciaire particulièrement délicat.

Une affaire de presse dans une affaire d’État

Ce nouvel épisode s’ajoute à un feuilleton judiciaire dense, dans lequel Farba Ngom reste sous le coup de plusieurs inculpations majeures : détournement de deniers publics, blanchiment, escroquerie sur des biens publics et enrichissement illicite présumé. Si la Chambre d’accusation a annulé l’inculpation pour association de malfaiteurs en bande organisée, les chefs restants maintiennent une menace judiciaire considérable sur l’ancien homme fort de la majorité passée.

La sortie médiatique visée par la plainte relance donc une guerre de récits, dans laquelle chaque camp tente de redéfinir les contours de l’affaire. Pour les avocats de Farba Ngom, l’article de Yoor Yoor participe à une tentative de diabolisation orchestrée. Du côté du journal, la défense de l’intérêt public est invoquée, au nom du droit à informer sur des mouvements politiques largement médiatisés.

Une bataille politique au-delà du pénal

Ce bras de fer illustre une tension plus profonde entre anciens cercles du pouvoir et nouveaux acteurs de la transparence publique. Farba Ngom, longtemps considéré comme un pilier du système de redistribution politique dans le Nord, cristallise aujourd’hui les critiques sur la gestion des ressources publiques, mais conserve un ancrage militant fort dans sa base électorale. La manifestation évoquée, qu’elle ait été spontanée ou financée, démontre que son nom reste capable de mobiliser.

À mesure que la procédure judiciaire avance, l’arène médiatique devient elle aussi un champ de bataille. En portant plainte contre un journaliste, Farba Ngom pose une limite juridique à la manière dont la presse couvre son dossier. Reste à savoir si ce geste sera perçu comme un acte de défense légitime ou comme une tentative d’intimidation à l’égard des médias indépendants. Dans les deux cas, l’issue judiciaire de l’affaire pourrait redessiner les rapports entre communication politique, responsabilité pénale et liberté de la presse.

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