Sénégal : Une nouvelle trajectoire spatiale confirmée à Washington

Lorsqu’en 2023, le Sénégal inaugure à Diamniadio un centre national de réception et de traitement de données spatiales, l’événement reste discret, presque confidentiel. Pourtant, ce moment constitue le socle technique de ce qui allait devenir, un an plus tard, une réalité historique : le lancement du satellite GAINDESAT‑1A. Le 16 août 2024, ce nanosatellite, construit en partenariat avec le Centre spatial universitaire de Montpellier, quitte la Terre à bord d’un lanceur Falcon 9 depuis la base de Vandenberg, aux États-Unis. Il emporte avec lui des ambitions bien ancrées : observer, comprendre et exploiter les dynamiques du territoire sénégalais grâce à des données autonomes, notamment dans les domaines de l’agriculture, de l’eau et de la sécurité.

Ce premier lancement marque l’entrée effective du Sénégal dans le cercle restreint des nations africaines disposant de capacités orbitales. Et plutôt que de s’arrêter à ce symbole, les autorités ont choisi d’amorcer une nouvelle phase, plus structurée et tournée vers l’avenir.


Une diplomatie de l’espace et des alliances stratégiques

Le 24 juillet 2025, à Washington, le Sénégal devient le 56ᵉ État signataire des Accords Artemis, un ensemble de principes régissant l’exploration spatiale civile à l’échelle mondiale. La signature a lieu au siège de la NASA, en présence de Brian Hughes, représentant de l’agence américaine, de Maram Kaïré, directeur général de l’Agence sénégalaise d’études spatiales (ASES), et de l’ambassadeur Abdoul Wahab Haïdara. Ce geste ne se limite pas à un engagement symbolique : il traduit une volonté assumée d’insérer le Sénégal dans les dynamiques diplomatiques de l’espace. « C’est une étape importante dans notre volonté de contribuer activement à une exploration pacifique, responsable et coopérative de l’espace », a souligné Maram Kaïré.

Au-delà de cette adhésion, le pays intensifie ses partenariats opérationnels. En juin 2025, le Sénégal initie le déploiement de sa première constellation de satellites, en collaboration avec l’État-major général des Armées (EMGA) et l’entreprise européenne Prométhée Earth Intelligence. Ce projet vise des applications concrètes : collecte d’images pour la surveillance environnementale, anticipation des crises climatiques, et renforcement de la souveraineté en matière de sécurité nationale.


Une autonomie en gestation

Au même moment, les équipes sénégalaises supervisées par le Professeur Gayane Faye entament l’assemblage de GAINDESAT‑1B, deuxième satellite du programme. Ce nouveau module, intégré dans le cadre du programme SenSAT, témoigne d’une volonté de produire localement des compétences et des solutions technologiques durables. À travers cette initiative, l’ASES cherche à dépasser la simple maîtrise des engins pour développer une expertise complète, de l’assemblage à l’analyse des données, en passant par la télémétrie.

Le déploiement simultané de satellites, la structuration d’un programme scientifique encadré et l’adhésion aux normes internationales forment un triptyque cohérent. Ce cheminement méthodique ouvre la voie à une série d’usages stratégiques : suivi de l’occupation des sols, détection précoce des feux de brousse, ou encore protection des zones frontalières.


L’ère GAINDESAT marque plus qu’un tournant technologique. Elle révèle une trajectoire maîtrisée, pensée à l’échelle du territoire, mais branchée aux enjeux mondiaux. À travers la signature des Accords Artemis, le Sénégal affirme qu’il ne veut pas seulement observer la Terre depuis l’espace : il veut aussi être reconnu comme un acteur crédible des décisions qui y sont prises.

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