Alors que la situation politique reste tendue à Lomé, la visite du président Bassirou Diomaye Faye au Togo continue de faire réagir au Sénégal. Ce déplacement diplomatique, officiellement destiné à renforcer les liens entre Dakar et Lomé, a provoqué une vague de commentaires contrastés sur les réseaux sociaux. Pour certains internautes, l’image du président sénégalais aux côtés de Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005, suscite malaise et incompréhension.
Une visite officielle sur fond de crise politique togolaise
Le séjour du Président Diomaye Faye au Togo intervient dans un contexte où les libertés publiques y sont fortement contestées. Plusieurs organisations civiles dénoncent une répression persistante des voix dissidentes, avec des arrestations, des dispersions violentes de rassemblements et une restriction progressive de l’espace démocratique. À Dakar, une manifestation de soutien au peuple togolais, prévue pour le 5 juillet, a été interdite par le préfet, au motif de menaces à l’ordre public. Cette décision avait été critiquée par des défenseurs des droits humains, soulignant une dissonance entre les principes défendus par les nouvelles autorités sénégalaises et certaines réalités administratives.
Face à cette toile de fond, le geste diplomatique du chef de l’État sénégalais n’a pas été interprété de manière unanime. Si certains saluent une volonté d’apaisement régional, d’autres y voient une contradiction avec les combats pour la démocratie qui ont marqué la trajectoire politique de Diomaye et de son Premier ministre, Ousmane Sonko.
Des critiques qui s’expriment sans détour
Sur les réseaux sociaux, plusieurs militants, activistes et simples internautes ont exprimé leur désaccord. Des publications virales accusent le président sénégalais de légitimer, par sa présence, un régime qualifié d’autocratique. « J’ai soutenu tous ses voyages, mais pas celui-ci. On ne devait pas s’afficher avec Faure », peut-on lire dans certains commentaires largement partagés. Le parallèle est souvent fait entre Faure Gnassingbé et Macky Sall, accusés tous deux par leurs opposants de méthodes autoritaires.
L’avocat Juan Branco, figure controversée en France et proche de Sonko, a également réagi sur le réseau social X (ex twitter), en évoquant « les victimes de la répression togolaise ». Ce même avocat avait été expulsé du Sénégal en 2023 après avoir critiqué violemment le régime de l’époque. D’autres voix sur la toile relativisent la portée de cette visite en rappelant que la responsabilité du changement appartient d’abord aux peuples concernés. « Ce n’est pas son rôle. Chaque peuple doit se lever pour sa propre liberté », souligne un commentaire parmi les plus partagés.
Une diplomatie sous pression populaire
La situation montre les limites du consensus autour de l’action présidentielle. En accédant au pouvoir, Président Faye a hérité d’un champ diplomatique complexe, où les intérêts stratégiques doivent composer avec une base militante exigeante, attachée aux valeurs de transparence et de justice. Son déplacement au Togo met en lumière une tension entre realpolitik et fidélité aux engagements populaires, notamment dans un pays comme le Sénégal où la jeunesse reste attentive aux symboles.
Le débat né de cette visite rappelle que les gestes diplomatiques ne sont jamais neutres. Dans une région marquée par les crises de gouvernance, l’image d’un président sénégalais accueillant ou saluant un homologue contesté peut être perçue comme un désaveu pour les aspirations démocratiques. La réaction mitigée à ce voyage montre aussi que la communication politique ne peut ignorer les dynamiques citoyennes transnationales, surtout à une époque où les mots, les images et les gestes circulent à grande vitesse.
Si Diomaye Faye a remercié publiquement Faure Gnassingbé pour son accueil et évoqué « la qualité des échanges », l’écho de cette déclaration n’a pas suffi à apaiser tous les doutes. Sur les réseaux sociaux, les débats continuent de refléter une opinion publique sénégalaise toujours vigilante face aux symboles diplomatiques et à leur signification.



